L'Ukraine
a-t-elle perdu la bataille des chars d'assaut dans sa guerre contre la Russie
avant même de l'engager sur le terrain des hostilités ? Les alliés occidentaux
et américains, qui ne lésinent pas sur les moyens militaires mis à la
disposition de l'Ukraine, ont marqué le pas quand le président Zelensky s'est mis à réclamer l'envoi de chars d'assaut.
Réunis vendredi dernier en Allemagne, les alliés de l'Ukraine n'ont pas donné
leur accord à la demande pressante du président Zelensky,
qui a fait ces derniers jours de cette livraison des chars d'assaut un enjeu
militaire d'une grande importance, allant jusqu'à lier l'envoi de ces chars
lourds à une victoire contre la Russie ou un échec militaire sur le terrain
dans le cas où cette demande resterait sans suite. Pourtant, quelques jours
avant cette réunion en Allemagne, trois ou quatre pays, la Pologne, la Finlande
et le Royaume-Uni, ont exercé une grande pression sur l'Allemagne et la France,
notamment, pour une livraison rapide des chars d'assauts à l'Ukraine, et on a
cru dans ce sillage qu'il n'était plus question que de régler les mécanismes
logistiques pour l'envoi de ces chars lourds sur le front ukrainien. Mais au
bout de leur rencontre en Allemagne, les alliés de l'Ukraine sont restés
indécis, voire évasifs, sur cette question de l'envoi des chars d'assaut sur le
front ukrainien. Aussi bien les Etats-Unis que la France et l'Allemagne, sur
lesquels comptaient les Ukrainiens pour se doter en chars lourds, aucun pays
n'a répondu favorablement à cette demande. Pourquoi cette réticence alors que
le soutien militaire apporté par ces pays à l'Ukraine semblait illimité, en
témoignent les livraisons de systèmes d'artillerie HIMARS ou de défense
anti-missiles Patriot par les Américains, ainsi que
d'autres blindés légers servant au transport des troupes et des véhicules de
combat d'infanterie ? Une chose est sûre, la livraison à l'Ukraine des chars
d'assaut ou chars lourds pose des problèmes aux pays alliés sur le plan
stratégique. D'une part, selon les déclarations des responsables militaires des
pays concernés, la livraison de chars lourds en Ukraine implique une formation
à dispenser et un suivi sur le terrain en matière d'entretien du matériel. Soit
un engagement franc de l'Otan sur le front ukrainien, qu'on cherche à éviter
depuis le début de cette guerre.
D'autre
part, en guise d'argument justifiant les retenues face à la livraison des chars
d'assaut à l'Ukraine, on rappelle que les alliés sont là pour aider l'Ukraine à
se défendre contre la Russie pas pour mener des offensives pouvant menacer
l'intégrité territorial de la Russie, ce à quoi serviraient des chars d'assaut,
et pousserait à une escalade militaire qu'on imagine bien très difficile à
supporter par l'Ukraine. Et, c'est exactement ce que pense le ministère russe
des Affaires étrangères, qui a souligné dans ce contexte que «l'escalade en
Ukraine est une voie dangereuse, et elle peut avoir des conséquences
imprévues». Le couple franco-allemand a réaffirmé sa détermination sans faille
à aider l'Ukraine, tant que cela sera nécessaire, mais la livraison des chars
lourds, c'est une autre histoire. Même lorsque le président Macron relève à ce
propos que «rien n'est exclu», ces mots sont synonymes d'une profonde
hésitation, voire un niet exprimé d'une manière diplomatique.