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Un permis de tuer !

par Abdelkrim Zerzouri

En sus de plusieurs mesures à mettre en œuvre dans le cadre d'un durcissement de la législation contre les chauffards, très accessibles en matière d'exécution, il y a cette instruction «d'application des peines les plus lourdes à l'encontre des parties impliquées dans la délivrance de permis de conduire aux candidats non qualifiés», pas du tout aisée de la mettre en mode pratique. En premier, il y a lieu de déterminer «ces parties impliquées dans la délivrance de permis de conduire aux candidats non qualifiés». Quelles parties sont habilitées à délivrer les permis de conduire ? L'auto-école, première destination de tout candidat qui postule pour le permis de conduire, prend dans ce sens une grande responsabilité sur le plan de l'apprentissage de la conduite et des règles du code de la route aux candidats.

Mais, au bout de cette phase du parcours, la responsabilité de l'auto-école s'arrête à ce stade des cours de conduite à donner aux candidats, et n'a aucune aptitude à délivrer le permis de conduire aux candidats. Seul «l'examinateur» désigné par la direction des Transports est juge en la matière. Le candidat passe trois examens devant cet «examinateur», code, créneau et conduite, avec au minimum quinze jours entre chaque examen, et c'est à «l'examinateur» que revient le dernier mot du succès ou de l'échec du candidat à chacune des trois étapes. Il est donc évident que l'examinateur est entièrement responsable quand il déclare un candidat apte ou inapte à la conduite. Aucune partie ne peut l'obliger à prendre une décision qui va à l'opposé de son constat ou jugement. Parfois, certes, des parties dans la délivrance de permis de conduire s'organisent en complicité pour délivrer les permis de conduire sans considération des résultats obtenus dans les trois examens, mais l'examinateur endosse à la fin, toujours, l'entière responsabilité «exécutive». Et, dans tous les cas de figure, il est, surtout, très difficile, voire impossible, de confondre une partie ou une autre dans cette activité illicite de délivrance des permis de conduire aux candidats non qualifiés.

Quand des parties malhonnêtes délivrent des permis de conduire aux candidats non qualifiés, mettant en danger de mort le candidat lui-même et des autres automobilistes, aucune loi ne peut les arrêter. Parce que, même si on soupçonne que des permis de conduire sont délivrés à des candidats non qualifiés (les statistiques confirment que les nouveaux permis sont la cause de nombreux accidents de la circulation), on ne peut pas en apporter la preuve formelle, notamment dans cet environnement réglementaire et fonctionnel régissant l'examen du permis de conduire. Faut-il dès lors penser à réformer de fond en comble cet examen du permis de conduire, et faire en sorte de limiter au maximum cette probabilité de délivrance d'un permis de conduire à un candidat non qualifié ? Les juristes l'ont toujours approuvé, sur le plan de la lutte contre la corruption, notamment, entre soumettre l'homme au respect de la loi ou le soumettre à sa propre conscience, ils optent pour la conscience, quand elle est là, prémunie contre les contraintes externes et bien plus sûr que tous les textes de lois quand celle-ci nous accompagne dans toutes nos actions. Quelle inconscience de donner un permis de tuer à une personne ?