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Mafias locales : Illusions ou réalités de pouvoir?

par Ahcene-Djaballah Belkacem

Lors des procès intentés contre la corruption, on a noté la forte présence de «notabilités» locales, dont des élus ou/et des fonctionnaires de tout bord, se trouvant impliqués dans des affaires douteuses. Soit par une participation directe, soit par un soutien discret, mais tous rémunérés d'une façon ou d'une autre: en bon et bel argent, en dinars ou en devises, d'un appartement, d'un lot de terrain à bâtir, d'une parcelle de terre agricole, ou tout simplement d' un «coup de pouce» au fils prodigue ou à la fi-fille à marier ou devant réussir un examen . La panoplie des avantages est très large, permettant souvent, du moins le croit-on, de «brouiller les pistes» et ainsi, d'échapper à la justice des hommes en cas de?

Lors des procès intentés contre la corruption, on a noté la présence de beaucoup de petites gens, parfois des gens de rien, baltaguias en col blanc et hommes de main infiltrés dans les réseaux et profitant des occasions offertes pour ramasser un gros lot et sortir de la «misère» rapidement et facilement, se croyant «protégés» par on ne sait quel «haut» fonctionnaire, ou un haut gradé, ou un détenteur de l'Autorité (même locale, ce qui n'est pas peu de nos jours) ou de la Décision, administrative, sécuritaire, judiciaire, parrain ou ami ou parent. Ce qui est absolument sidérant, c'est que malgré les campagnes de dénonciation (parfois par les plus hautes autorités du pays dont le Chef de l'Etat lui-même), les arrestations et les condamnations, le mal de la corruption, de l'escroquerie, de la triche et de la fraude continue son bonhomme de chemin comme si de rien n'était. De quoi s'interroger sur les tenants et aboutissants d'un comportement que l'on peut classer, au départ, d'inconscient ou d'irresponsable. Voilà du pain sur la planche pour nos psycho-sociologues qui devraient se donner, bien souvent, la peine de descendre sur le terrain !

Pour ma part, simple observateur social, j'ai la nette impression que cela découle, tout simplement et en bonne partie, de la «démission» de l'Etat, à partir des années 2000, avec son populisme débridé acceptant (et parfois devançant) toutes les demandes sociales et économiques même les plus farfelues, démission aggravée par la politique de «Réconciliation nationale» ayant absout tous les crimes et criminels des années 90. Face au «Beylik», l'individu s'est, peu à peu, trouvé, parfois sans le rechercher, investi d'un sentiment de «puissance» que rien ne peut arrêter. Et, ce qui étonne le plus, c'est de découvrir que ce sentiment de «puissance» (se conjuguant avec celui d'une impunité, ou d'une sanction difficile ou lente) augmente à la base, localement, bien plus qu'au sommet ou proche de la Capitale, le glaive de la Justice se trouvant bien loin à Alger. Heureusement, les réseaux sociaux et la presse locale sont là. Plus dure est la chute. Mais les leçons sont-elles facilement retenues tant que le ou les centres nerveux (le pouvoir des «bureaux», la force financière des «affairistes» et la «compréhension» de certaines autorités chargées des sanctions, presque toujours fortes de leur statut) continuent d'exister, souvent incontrôlées ?