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LOBBY OR NOT LOBBY ?

par Belkacem Ahcene-Djaballah

On a, souvent, par le passé, parlé « de la création d'une diaspora algérienne ». Tout en notant au passage qu'il est presque difficile, sinon impossible, de créer quelque chose qui est trop « dispersée » à travers le monde, et souvent insaisissable et qu'il aurait été plus rentable de parler franchement d'aide ou de soutien à la formation de lobbies, ici et là. C'est ce dont l'Algérie a (eu) toujours besoin, la Diaspora, « dominante ou dominée », selon les mots récents de Slimane Zeghidour, bien que, peut-être, attachée à son pays d' « origine », n'étant pas toujours (et totalement) fidèle à ses racines. Il n'y a qu'à voir les transferts d'argent effectués annuellement, minimes ou même ridicules par rapport à ceux des autres pays du Sud. C'est normal, vu les situations politiques perturbées et les conditions économiques nationales, peu accueillantes, par le passé. Et, puis, business is business! Car, un lobby, c'est quoi ? C'est, tout simplement un groupe de pression, formé d'amis (concitoyens émigrés ou étrangers), fort intéressés ou non, en tous cas se sentant tous concernés directement par les affaires d'un pays ou d'une entreprise. C'est devenu, au fil du temps, un moyen de communication (et d'action) incontournable et bien des pays ont investi énormément d'argent et de temps pour en construire un ou plusieurs (avec ou sans leur diaspora, mais c'est bien mieux avec), là en tout cas où leurs intérêts sont les plus grands: la Tunisie, le Maroc, l'Egypte, Israël, le Gabon, sans parler de la Chine, de l'Inde...

Certains pays, directement ou par le biais d'entreprises, ont investi dans les amitiés et les réseaux d'influence, d'autres avec des investissements dans des créneaux « porteurs ». Ainsi, les Associations (ou réseaux) d'anciens étudiants (au Canada, aux Etats-Unis, en France ...) foisonnent et déjà nous couvrent. Ainsi, la diplomatie américaine a, en place, depuis bien longtemps, un réseau extraordinaire d'accueil, par des représentants de la société civile, de ses « invités ». Ainsi, le Maroc a le réseau le plus influent de France formé d'intellectuels et de journalistes (marocains ou autres d'origine marocaine ou ayant des « liens assez forts », comme Bhl, Debbouze, Gad El Malah, Jack Lang, les Clinton, Trump et beaucoup d'autres) influents, grâce aux portes de ses «riadhs» et de ses médinas toujours grandes ouvertes et sans complexe sociétal ou même cultuel. Ainsi, la Libye de Kaddafi avait pris des participations, en Europe, dans des entreprises étrangères importantes, tout particulièrement celles liées à la communication et les médias. La Russie avait -par l'entremise d' « oligarques », pas toujours et tous clean (alors que la Chine a bien réussi dans ce domaine)- beaucoup investi dans les médias et le football, premières victimes des mesures de rétorsion, occidentales en ce temps de confilt russo-ukrainien. Dans tout ce remue-business, l'Algérie a raté moult occasions en ne rachetant pas tout ou parties d'entreprises de presse ou industrielles importantes alors en difficulté. Ou, si elle l'a fait, nul n'est au courant, à l'exception d'Augusta. Ou, si ça été fait, c'est « en douce » et au seul bénéfice d' »oligarques » corrompus. Par ailleurs, elle n'a pas encore réussi à avoir et à maintenir une Agence de coopération extérieure ou de créer un organisme de Communication extérieure capable de « gérer » ses élites exilées ou des réseaux d'amitié influents. Querelles de clocher et inter-personnelles ? Les soutiens de la guerre de Libération, leurs héritiers, ou les masses d'étudiants africains et arabes qui ont fréquenté nos universités ont été, plus ou moins, perdus avec des réveils tardifs seulement lors des grandes commémorations. Heureusement, il reste à nos présidents d'Apc ou de clubs sportifs, quelques vieux pieds-noirs nostalgiques du paradis perdu. Gentils, sympas mais pas très rentables !

Aujourd'hui, la tâche est rendue encore plus difficile avec la mondialisation, les détenteurs réels de capitaux étant insaisissables. Mais, c'est aussi une chance à partir du moment où l'Algérie est actuellement détentrice de réserves de change appréciables qui donnent, encore et toujours, le tournis à bien des hommes d'affaires et d'affairistes se trouvant à l'étranger, d'origine algérienne ou autres. C'est ce tournis qu'il faut entretenir et manipuler à son profit. Et, de nos jours, cela peut (et doit) se passer dans la transparence totale, et sans pudibonderie (en réalité, le monde des affaires et de l'argent, ici ou là, s'en fout), sans « nationalisme » sourcilleux ou politicien et dans le cadre d'organismes ayant pignon sur rue. C'est cela le « patriotisme » vrai. Trêve de confidentialité et d'actions relevant d'on ne sait quel « domaine réservé » ! En tout cas, jusqu'ici, cela n'a point payé.

La leçon est-elle retenue ? Pour l'instant, on en doute. On ne fait pour l'instant que « chercher »

Dans un gouvernement, dirigé alors par Ouyahia, on avait «rajouté », au ministère de la Solidarité nationale, la Communauté nationale à l'étranger. C'est bien, mais ce ne fut guère suffisant, car une appellation trop politique.

Si Affif (un député, pour ceux qui s'en souviennent encore) avait alors « calculé » trop loin. Puis, on avait chargé Ould Abbas de serrer de près (les émigrés en vacances, certainement !). Encore une fois, la cible était trop large, trop floue et le tir a été, encore une fois, imprécis. Le reste est, à peu près, de la même veine. Depuis peu il y a, rattachée au MAE, la Communauté nationale à l'étranger, mais cela ne semble pas suffire. Pour régler seulement les problèmes d'intendance, nombreux il est vrai ?

Faudrait-il attendre la création d'un Fonds souverain qui permettra alors des activités à l'extérieur? Dans cinq ou dix ans car, comme il a dit, lui, « il faut bien réfléchir ». Un jour, oui, un jour non. Réfléchissons donc ! En attendant, la caravane des lobbies étrangers avance.