Mon ami,
quand il ne trouve rien à dire sur le quotidien de tous les jours, «yebzalha» et il commence à inventer des bêtises d'un autre
temps. Mon ami, «mesquine mazal niya
» et il croit toujours aux illusions, aux errements et aux apparences qui sont
souvent trompeuses et qui font miroiter une vie artificielle. Ma mère, Allah yerhamha, de son vivant, lorsqu'elle parlait de quelqu'un
qui avait la tête dans les nuages et qui rêvassait beaucoup, elle disait de lui
: « Hadhak elkhali bna el khali, rah
ikheir mesquine » (ce simplet est en train de
délirer). L'autre jour, alors que nous battions le pavé tous les deux -en
réalité il n'y a plus de pavés dans le bled-, mon cher ami a lancé un pavé dans
la mare, et c'est vrai les chemins pour circuler sont pleins de mares d'eau et
de nids-de-poule. Et pendant que nous improvisions des sauts en longueur et que
nous sautions au-dessus des mares d'eau, il m'a dit : « J'ai l'impression que
les gens n'affectionnent plus l'activité culturelle, les arts et ils sont
devenus très renfermés. Les gens ont éradiqué le mot spectacle de leur
vocabulaire. On ne lit pas beaucoup de livres et de journaux. On boude la
poésie. On ferme les librairies et on ne dessine pas et on ne visite pas les galeries
d'arts. Les gens ne sont pas de fervents amateurs de pièces de théâtre et le
rire les a quittés depuis belle lurette. Les gens sont solitaires et sournois,
ils fredonnent des airs seulement dans leur tête. Ils se fichent des cafés
littéraires et des dédicaces ». « Il ne faut pas en rajouter mon ami. Ce n'est
pas vrai ce que tu dis », lui ai-je répondu. « Tu sais mon ami, il y a un
proverbe populaire de chez nous qui dit : « Ki techbaa el kerche, tgoul le rasse ghani » (lorsque le ventre est rassasié, il dit à la tête
tu peux chanter). Dans ce présent brûlant, les gens sont préoccupés par autre
chose. L'augmentation des prix des produits de première nécessité fait
l'actualité et les gens ne savent plus où donner de la tête. Il faut aussi
comprendre qu'il y a des priorités dans la vie et les gens font passer d'abord
la nourriture, les dépenses médicales, les frais scolaires, les dépenses
vestimentaires, etc., avant de se distraire et de chanter comme la fourmi. Et «
ki tech'baa el kerche », tout ira bien pour nous. L'être humain passera à
autre chose, pour vivre comme le reste du monde et il se divertira pour son
plaisir, voyagera et visitera des pays, passera de bonnes vacances et
s'achètera une voiture pour se déplacer et bien d'autres choses. Mais en
attendant ce jour, et dans ces moments, les gens ont choisi de se nourrir la
panse avec du pain, des patates et du lait, plutôt que de se nourrir l'esprit
avec des mots et des images sur des pages d'un livre. Aujourd'hui, « el benna, fel makla, lebssa,
z'waj, wel machta » (le plaisir de la vie est dans la bouffe, les
vêtements, le mariage et la coiffure).