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Le président du CNESE dénonce: «De la surfacturation à la sous-facturation»

par M. Aziza

Le président du Conseil national économique, social et environnemental (CNESE), Redha Tir, a dénoncé hier, la fausse facturation avec ses deux visages, «la surfacturation à l'importation et la sous-facturation à l'exportation», un phénomène horrible qui gangrène l'économie algérienne.

Intervenant lors de la tenue d'un atelier professionnel autour de « l'inclusion financière et le rôle du secteur privé dans le financement de l'investissement » ayant lieu à l'Ecole supérieure d'hôtellerie et de restauration d'Alger, M. Tir a qualifié ces deux phénomènes de «cancer destructeur de l'économie». Et de souligner qu'après avoir lutté contre la surfacturation à l'importation, on est aujourd'hui passé à la sous-facturation, notamment après que l'Algérie a décidé, à travers les instructions du président de la République, d'augmenter les exportations hors hydrocarbures à 5 milliards de dollars au moins d'ici fin 2021. Et ce, dans le cadre du plan de relance pour une nouvelle économie. En précisant que depuis cette annonce, l'on assiste malheureusement à une nouvelle pratique frauduleuse, la sous-facturation qui commence à émerger dans le domaine de l'exportation. Le président du CNESE affirme que le gouvernement est en train de lutter contre cette nouvelle forme de fausse facturation. Et ce, en élaborant des nouveaux textes et en modifiant d'autres.

Le CNESE recommande, dans ce contexte, une nouvelle stratégie de lutte « moderne » contre ce phénomène nocif qui impliquera différents intervenants, le ministère du Commerce, les douanes, les services fiscaux, l'investisseur et l'exportateur lui-même. Et de préciser que l'Etat doit connaître la valeur en douane du marché de l'exportation, comme c'est le cas pour le marché de l'importation. M. Tir a également souligné que le CNESE encourage le gouvernement à revoir petit à petit le tarif douanier de toutes les opérations avec la notion de spécification. Le président du CNESE a regretté le fait qu'il y ait des investisseurs qui utilisent tout un système et tous les dispositifs de facilitations et incitations pour s'enrichir personnellement au détriment du Trésor public. Il dira en outre que « certains investisseurs sont en concurrence avec l'Etat pour contourner les règles établies ». «On doit sortir du mauvais équilibre vers le bon équilibre, où chacun trouvera son compte, l'Etat, l'investisseur ou l'opérateur économique et le citoyen», préconise-t-il. Et le président du CNESE d'appeler à œuvrer pour garantir « une citoyenneté économique » et « un patriotisme économique». M. Tir a plaidé, par ailleurs, lors de son intervention, pour une inclusion financière rapide et la levée de l'importante épargne qui se trouve hors circuits bancaires. En précisant qu'il est ainsi prouvé l'existence d'une relation entre l'inclusion financière, la stabilité financière et la croissance économique. Et de souligner qu' « il est difficile de concevoir une durabilité de la stabilité financière alors qu'une partie des entreprises demeure financièrement exclue du système économique», ajoutant que « l'inclusion financière pourra favoriser la concurrence entre les institutions financières en œuvrant sur la diversité et la qualité de leurs produits afin d'attirer un grand nombre de clients et de transactions».

Habib Attia, spécialiste du secteur financier au Fonds monétaire arabe (FMA), a pour sa part affirmé lors de son intervention que l'inclusion financière est un processus qui peut se réaliser dans la durée, cinq années au minimum. Le CNESE, selon son président, est pour des solutions à court terme pour baliser le terrain à d'autres solutions à moyens et à long terme. Et de préciser qu'il faut par exemple secouer la Bourse d'Alger. Les solutions urgentes doivent tourner autour des différentes incitations économiques. Il a rappelé que l'objectif de cet atelier est de connaître les différentes sources de financement notamment d'origine privé du secteur dans le secteur économique et quelles perspectives pour le financement privé des grands projets et des investissements.

Le CNESE hostile à l'option du changement de la monnaie

M. Rédha Tir a affirmé, par ailleurs, que l'argent de l'informel n'est pas une masse monétaire stockée, mais de l'argent qui circule 12 à 13 fois par an dans le secteur économique, à travers les transactions commerciales, financières et économiques. Le président du CNESE indique que les détenteurs de l'argent de l'informel s'enrichissent en fuyant les impôts et les déclarations au niveau des caisses de la sécurité sociale. L'on assiste malheureusement à une extension du marché officiel au marché parallèle. «C'est une réalité, certains opérateurs économiques ont bénéficié de financement public en faisant des bénéfices, mais ces derniers ne sont jamais réinvestis et placés dans l'épargne».

Interrogé sur l'option relative au changement de monnaie afin de drainer l'argent de l'informel, M. Tir a affirmé que le CNESE n'est pas favorable à cette option en précisant que «les solutions adoptées pour lutter contre l'informel ne doivent pas être prises sur la base de contribution des experts ou intervenants sur les plateaux de télévision, mais il faut aller vers des propositions et solutions constructives qui prennent en considération la situation de l'économie nationale qui est aujourd'hui confortable du point de vue des réserves de changes qui sont aujourd'hui à 44 milliards de dollars», sachant, dit-il, que l'Algérie n'a pas de dettes extérieures. Il a précisé que « ceux qui ont opté pour cette solution sont souvent des pays qui ont dû faire face à un effondrement total de leur économie ». Ce que préconise, aujourd'hui, le CNESE est la révision des lois régulatrices.