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La bonne affaire pour l'Afrique ?

par Abdelkrim Zerzouri

Par la force des évènements, l'Afrique se fraie un petit chemin sur la voie de la production des vaccins anti-Covid. L'Algérie, l'Egypte, l'Afrique du Sud, le Maroc et le Sénégal sont très bien placés pour produire sur le court terme, et en grandes quantités, les vaccins anti-Covid. Fini les inquiétudes au sujet du manque d'accès aux vaccins pour les pays africains, qui pourraient sur le court terme se procurer les doses nécessaires auprès de ces cinq pays, et plus encore si d'autres rejoignent ce club des pays producteurs de vaccins sous licence ? A entendre ces nouvelles, on pourrait avoir l'espoir pour l'Afrique qui fait face à une troisième vague qui s'amplifie et s'accélère gravement sur le continent, où « un tiers des pays africains vit une dangereuse résurgence de cas » , selon l'OMS, contrairement aux deux premières vagues qui n'ont pas fait beaucoup de dégâts. D'où l'exigence d'un approvisionnement urgent en vaccins pour éviter tout scénario catastrophe. Et, comme il ne faut pas compter sur un approvisionnement rapide en vaccins de plusieurs de pays africains, on ne peut miser que sur l'entrée en production des sérums par ces pays africains.

Souffrant toujours d'un énorme retard en matière de vaccination des populations locales, avec des taux parmi les plus faibles au monde, 90% des pays africains ne peuvent pas atteindre l'objectif mondial de vacciner un dixième de leur population d'ici septembre, selon des estimations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), l'Afrique ne peut plus compter que sur elle-même. Le déséquilibre entre les pays riches et les pays pauvres est flagrant en matière de vaccination. Et, sans s'émouvoir, les pays riches sont allés jusqu'à interdire toute exportation des vaccins avant qu'ils n'aient fini, eux, de mettre à l'abri leur population. Le mécanisme Covax qui a redémarré ces derniers jours son approvisionnement des pays pauvres, après un arrêt de plusieurs mois, n'a pas encore atteint ses objectifs, à cause d'une faiblesse de la production des vaccins ou l'impossibilité d'assurer les commandes pendantes de pays « prioritaires », qui ont été les premiers à conclure les marchés avec paiement à l'avance de leurs commandes.

Donc, il n'y a pas mieux que la production des vaccins par des pays africains pour régler les défaillances en matière de taux de vaccination des populations locales. Et, on n'aurait pas tant espéré si la Russie et la Chine n'avaient pas fait les premiers pas dans cette direction. Européens et Américains ne se sont décidés qu'après avoir compris que le marché africain allait leur échapper, suite à une implantation des Russes et des Chinois en Algérie, au Maroc et en Egypte. C'est alors que les vaccins produits par des laboratoires européens et américains ont annoncé leur entrée sur le continent africain, au Sénégal et en Afrique du Sud. Une bonne affaire pour l'Afrique ? Assurément. Que cela soit fait dans un esprit humanitaire et/ou commercial, les pays africains devraient tirer profit de cette compétition et œuvrer, surtout, pour le transfert de la technologie qui leur permettrait de produire à l'avenir les médicaments et les vaccins qui leur manquent affreusement.