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La verbalisation !

par Abdelkrim Zerzouri

Un Aïd El Adha sous le signe de la prudence, dites-vous ? Malheureusement, c'est absolument le contraire qu'on voit et qu'on vit durant cette période qui précède cette fête religieuse. La courbe des contaminations qui enregistre une croissance fulgurante ces derniers temps ne semble pas retenir l'attention, pas plus que le besoin alimentaire qui pousse les masses sur la piste d'une course effrénée aux achats. Partout, les rassemblements sont impressionnants, à commencer par l'épicier du coin où se forment de longues chaînes pour dénicher un petit sachet de lait, les surfaces commerciales où l'on se bouscule pour arracher un bidon d'huile, opérer une razzia sur les étals des fruits et légumes, avant d'arriver au dernier vendredi avant l'Aïd El Adha, également dernier jour du marché hebdomadaire des bestiaux, dont le plus célèbre se situe dans la ville d'El Khroub, à Constantine, qui a fait le buzz sur les réseaux sociaux, enregistrant un nombre record de visiteurs. Cinquante mille visiteurs, soixante, voire plus, tous regroupés sur une petite surface de deux terrains de football, collés les uns aux autres et circulant difficilement entre des centaines de moutons exposés à la vente. Une véritable marée humaine où le non-respect des règles sanitaires fait planer le scénario tunisien ou pire encore le scénario indien. La tête ailleurs, le citoyen se fout complètement des appels à la prudence lancés par les autorités compétentes et des épidémiologistes. Pourtant, le contexte sanitaire, particulièrement inquiétant ces jours-ci, et le cadre social caractérisé à la veille de la célébration de l'Aïd El Adha par la ruée massive des citoyens vers les marchés, recommandent le respect rigoureux des mesures préventives en matière de lutte contre la propagation du coronavirus, plus qu'on ne le ferait en temps normal. Le virus ne se déplace pas tout seul, c'est le citoyen qui le véhicule et le propage dans ses déplacements, là où il va. Une vérité que tout le monde connaît par cœur, mais peu y prête attention. Les autorités chargées de l'application des mesures sanitaires sont-elles dépassées par les circonstances ? Est-ce une fatalité de vivre dans cette ambiance anarchique que semblent privilégier de larges pans de la population ? Ou est-ce le manque de rigueur dans l'application de la réglementation et des lois, qui favorise ce désordre dans tous les domaines de la vie quotidienne ? En attendant le pire après le sacrifice du mouton. Craignant les effets catastrophiques de la pollution environnementale dans le sillage de l'abattage anarchique dans les espaces publics et le jet des déchets n'importe comment et n'importe où, le ministère de l'Environnement a lancé des appels à quelques jours de l'Aïd El Adha pour exhorter les citoyens à recourir aux abattoirs agréés et contrôlés par les vétérinaires et de placer les résidus dans des sacs étanches avant de les mettre dans les endroits réservés à cet effet. L'appel sera-t-il entendu ? Il faudrait faire un tour avec les camions de ramassage des ordures et les agents d'hygiène dans la journée de l'Aïd pour s'en rendre compte. Quand s'arrêtera-t-on de lancer des appels et passer à la verbalisation?