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Dr Bekkat Berkani: «La seule arme contre le virus reste la vaccination»

par Abed Chérifi

Saluant l'intervention du ministre des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, qui a plaidé, mardi à Matera (Italie) lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères du G20, pour «le multilatéralisme afin de réduire les effets du Covid-19», le Dr Med Bekkat Berkani est allé dans le même sens pour appeler à plus de solidarité internationale face au fléau du coronavirus. En effet, s'exprimant sur les ondes de la Radio nationale, le Dr Bekkat Berkani a estimé que de «nombreux pays pauvres dans le monde sont privés de vaccins anti-Covid, pris en étau entre le diktat des grands laboratoires pharmaceutiques mondiaux et la course effrénée à qui gagne le plus d'argent», a-t-il déploré. «Le ministre des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, a parfaitement raison de mettre l'accent sur cette situation paradoxale, dénoncée par l'OMS elle-même», a affirmé docteur Berkani, relevant «un monopole flagrant et agressif par certains laboratoires détenteurs de la propriété de brevets de vaccins faisant fi de tout esprit humanitaire pour faire chanter des pays qui n'ont pu avoir accès au vaccin anti-Covid», a-t-il souligné. «Le monde est devenu un grand village, et personne n'est à l'abri, ce qui doit nous faire prendre conscience de la responsabilité commune de tous les pays face à ce type d'affections hautement transmissibles qui doivent être prévenues par des actions globales», a encore indiqué Bekkat Berkani, ajoutant que «les détenteurs de laboratoires industriels doivent garantir la disponibilité de ce remède afin de vaincre la pandémie». «Producteurs comme utilisateurs de vaccins, tout le monde doit avoir cette latitude de se procurer le vaccin pour la sécurité de tous, surtout que les pauvres ne peuvent, pour des raisons économiques, se le procurer», a-t-il relevé.

Il a également indiqué que «les relations dans le monde sont basées sur une logique froide du profit, il est donc clair que les laboratoires les plus développés gagnent de l'argent pour en faire une arme économique, voire un outil de pression, et par ricochet, c'est la santé financière de ces trusts pharmaceutiques qui prime sur la santé humaine», a-t-il déploré. «Heureusement», s'est réjoui le Dr Berkani, que «les pays producteurs commencent à prendre conscience de ce dilemme et qu'ils affichent, désormais, un intérêt palpable pour que toute l'humanité soit protégée sans discrimination», allusion faite aux positions des uns et des autres exprimées au sommet du G20 à Matera.

«Garantir notre indépendance en matière de médicaments»

«On ne vit pas en autarcie sur cette planète, le monde développé doit savoir que la priorité des temps modernes est de prendre en charge l'humanitaire d'abord», a encore plaidé Bekkat Berkani, ajoutant que «les puissants de ce monde doivent savoir que les pays à faibles revenus ont d'autres besoins à satisfaire au lieu de courir derrière des vaccins excessivement chers par rapport à leurs revenus respectifs», a-t-il souligné. Mettant en avant la situation paradoxale que vit le monde actuellement, le Dr Berkani a relevé que «si le monde est réorienté vers l'économie et la finance, il faut savoir que les places financières à travers le monde n'ont jamais été aussi fortes que maintenant», a-t-il tranché, invitant ces puissances à «comprendre que l'infiniment petit qu'est la fraction virale est là pour nous faire réapprendre notre fragilité en tant qu'êtres humains et surtout notre humilité», a-t-il dit.

Lançant un véritable cri d'alerte, il a affirmé qu'«il y avait menace sur l'humanité, et si on veut préserver l'espèce humaine, il faudra que ces laboratoires qui courent après le profit pensent à faire bénéficier les pays aux revenus faibles de la vaccination contre le Covid-19, parce que réellement il y a menace sur l'humanité tout entière», a-t-il mis en garde. «Pasteur n'a pas gagné de l'argent en inventant le vaccin contre la rage», a-t-il tenu à rappeler.

S'exprimant sur la facture du médicament qui frôle les 4 milliards de dollars, l'orateur a considéré que le ministre chargé de l'Industrie pharmaceutique, Lotfi Benbahmed, «a été nommé à juste titre à ce poste pour donner une substance et une contenance à cette industrie afin d'assurer notre autonomie en fabricant 50% de nos besoins en médicaments et en vaccins», a-t-il relevé. «Il est grand temps de garantir notre indépendance en matière de médicaments, ne serait-ce que pour le volet des maladies chroniques et le Covid-19», a-t-il estimé.

Revenant sur l'épidémie, le même intervenant a rappelé que la seule arme pour détruire le virus reste la vaccination : « nous avançons à petits pas», a-t-il déploré, «une situation aggravée par la réticence des citoyens à se faire vacciner, surtout à cause d'un déficit flagrant en matière de communication par les parties concernées», a-t-il conclu.