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Selon une étude menée par Sonelgaz- Covid-19 : le tabagisme, un important facteur de risque

par Mohamed Mehdi

Sur un total de 988 agents de Sonelgaz atteints de Covid-19, recensés entre le 17 mars et le 31 août 2020 (le nombre est passé de 1 à 487 cas en novembre 2020), 612 ont fait l'objet d'une étude épidémiologique menée par la Direction Centrale Santé Sécurité Environnement (DCSSE) du Groupe, dirigée par le Dr Chertouh M'hamed. La population étudiée est composée de 551 hommes et de 61 femmes ayant répondu au questionnaire de l'enquête. Par classes d'âge, 75% des répondants (459/612) ont entre 30 et 50 ans, alors que les 50-60 ans représentent 17% (104/612).

L'objectif de l'étude, intitulée «Tabagisme et Covid-19», était de «connaître les différentes formes cliniques développées par les travailleurs de Sonelgaz atteints de la Covid-19, selon la notion de tabagisme (fumeurs actifs, fumeurs passifs et anciens fumeurs)», explique Dr Chertouh, directeur du DCSSE. Etaient également recherchés les «autres facteurs de risque influençant la sévérité des cas Covid-19 tels que âge, obésité, antécédents médicaux». Il s'agissait également d'établir une comparaison des incidences «entre les fumeurs et anciens fumeurs» et de «proposer des recommandations».

Les données de l'étude ont été puisées dans les «Bilans du Reporting Quotidien - BRQ)» de la «période allant du 17 mars au 31 août 2020» et provenant des «34 Centres de Médecine du Travail (CMT)» du Groupe Sonelgaz.

Vulnérabilités

L'étude mentionne que 28.6% (175/612) des travailleurs de Sonelgaz atteints de Covid-19 ont des antécédents médicaux. Parmi eux, 10,3% (63 cas sur 612) sont hypertendus (HTA), 10,8% (66 cas) présentent un diabète de type 2 (non insulinodépendant), 2,3% (14 cas) ont une allergie respiratoire, 1,8% (11 cas) ont développé un asthme et 1,5% (9 cas) ont des antécédents thyroïdiens, 1,1% (7 cas) ont des antécédents cardiovasculaires et 0,7% ont une pathologie digestive (4 cas).

Il apparaît des résultats que «33,3% des fumeurs actifs et 35% des anciens fumeurs ont des antécédents médicaux», ce qui rend ces personnes «vulnérables au coronavirus» et à ses «formes sévères». Un «calcul du test khi-deux» a déterminé «qu'il existe une relation entre l'hypertension et le type de lésions Covid», note le document. Ainsi, «16,7% des personnes hypertendues ont développé des lésions modérées à sévères» contre «seulement 5,3%» chez les cas «sans antécédents d'hypertension».

Associé à la cigarette, «l'indice de masse corporelle (l'IMC)» est aussi un facteur de risque. L'étude mentionne que «49% des cas Covid (301/612) présentent un surpoids, 21% ont une obésité dont 8% présentent une obésité morbide». «Chez les anciens fumeurs 66% sont en surpoids et 33% sont en obésité modérée», alors que «chez les fumeurs passifs, on retrouve 88% de surpoids».

Tabac et lésions pulmonaires

Le document explique que «74% de la population d'étude ont développé une lésion pulmonaire supérieure ou égale à 10%, allant de la forme modérée à la forme sévère, dont 67% ont manifesté la forme modérée». Quant à la population de tabagiques, «66% des fumeurs actuels ont développé une lésion pulmonaire étendue (supérieure ou égale à 25%). Chez les fumeurs passifs «66% ont développé une lésion pulmonaire supérieure ou égale à 25% allant de la forme modérée à la forme sévère». Alors que «85% des anciens fumeurs ont développé une lésion pulmonaire supérieure ou égale à 10% allant de la forme modérée à la forme sévère».

Hospitalisation des cas Covid fumeurs

«Dans notre étude 100% des fumeurs actifs atteints de la Covid-19 dont l'âge moyen est de 40 ans ont été hospitalisés», lit-on dans le document. Sachant que «tous les fumeurs actifs sont des hommes, et 56,66% des fumeurs actifs consomment entre 5 et 15 cigarettes par jour (...) et 31,21% des anciens fumeurs consommaient quotidiennement entre 10 à 30 cigarettes».

Les résultats «ont démontré que 43,6% des personnes ayant développé des lésions sévères ont été hospitalisées, alors que 23,1% ont été hospitalisées puis confinées». Aussi le test du «khi-deux» «réalisé afin de déterminer la relation entre le type de prise en charge et le type de tabagisme» révèle que «les fumeurs actifs étaient tous sujets à l'hospitalisation». «On constate que 68% de notre population d'étude a été confinée à domicile, contre 21,8% qui a été hospitalisée et seulement 9,1% a été hospitalisée puis confinée à domicile». Par ailleurs, «96,4% des personnes (hospitalisées et confinées) ont eu une bonne évolution, tandis que 3,6% d'entre eux ont eu une mauvaise évolution». Le document précise encore que le «test du khi-deux a démontré qu'il existe une relation entre l'hypertension et l'admission en réanimation». Ainsi, «16% des personnes présentant une HTA ont été admises en service de réanimation, contre 3,6% qui ne sont pas hypertendus». A noter aussi que sur les 5% de la population d'étude (30 personnes) admise en réanimation, on dénombre 13 décès.

Protocole de soins et séquelles

L'étude montre que 118 agents atteints de Covid-19 (soit 19,30% de la population d'étude) «a reçu un traitement médical à base d'hydroxychloroquine», alors que les 80,7% restants «ont reçu un traitement symptomatique».

Quant aux «séquelles en phase de guérison», elles concernent «23,52% de la population d'étude» avec «prédominance de certains symptômes comme l'asthénie (9%), et «12,7% ont manifesté des symptômes divers ou une association d'autres symptômes».

Pour ce qui est du lien entre «les séquelles survenues après guérison et le protocole médical institué», le test du khi-deux montre que «27% des personnes ayant développé des séquelles après guérison ont été mises sous chloroquine, contre 16% sans séquelles et mises sous chloroquine».

Par ailleurs, la «répartition selon la symptomatologie respiratoire liée à l'exposition au tabagisme passif révèle que 98,6% de la population d'étude exposée à la fumée du tabac a manifesté des signes respiratoires avec prédominance du syndrome grippal avec 86,70%».

Recommandations

L'étude du DCSSE de Sonelgaz dresse un certain nombre de recommandations. Ainsi, outre le «strict respect» des «mesures barrières» (distanciation physique, port du masque, lavage fréquent des mains)», il est conseillé «d'éviter d'échanger les outils de travail» entre employés.

Le document appelle à orienter «tout cas suspect de Covid-19, cas contact, cas probable ou confirmé, vers le médecin du travail». Et recommande la vaccination du personnel fortement exposé (médical et paramédical) et des personnes vulnérables (malades chroniques).

Pour l'aspect tabagisme, l'étude recommande «d'instaurer l'interdiction de fumer en milieu de travail et la faire respecter», «d'aménager des espaces fumeurs et de veiller à leur bonne hygiène et aération».

L'étude appelle à mener des «campagnes d'information et de sensibilisation sur la nocivité du tabac», «d'installer un réseau d'aide au sevrage tabagique», et alerte sur le danger du «partage des produits du tabac et des cigarettes électroniques».

Elle rappelle la nécessité de consulter le médecin «au moindre symptôme» de Covid-19 et «l'obligation des visites médicales réglementaires et à la demande du médecin du travail».