Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Rapport Stora sur la colonisation: Pas de «repentance ni d'excuses»

par El-Houari Dilmi

  La « réconciliation des mémoires », voulue par l'Elysée, n'est pas pour demain. En effet, alors que la remise du rapport Stora sur la colonisation et la guerre d'Algérie était attendue pour hier mercredi en milieu d'après-midi, la présidence française a annoncé que « des actes symboliques sont prévus mais il n'y aura ni repentance ni excuses».

L'Elysée a précisé, dans son communiqué, qu'Emmanuel Macron « participera à trois journées de commémoration dans le cadre du 60e anniversaire de la fin de la guerre d'Algérie en 1962 : la journée nationale des harkis le 25 septembre, la répression d'une manifestation d'Algériens le 17 octobre 1961 et les Accords d'Evian du 19 mars 1962 ». L'historien français Benjamin Stora devait remettre hier à l'Elysée, le rapport dont l'a chargé en juillet Emmanuel Macron pour «dresser un état des lieux juste et précis du chemin accompli en France sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d'Algérie». Macron « s'exprimera en temps et en heure sur les préconisations de ce rapport et de la commission qui sera chargée de les étudier », a encore précisé la présidence française. « Il y aura des mots et des actes du président dans les prochains mois », selon le communiqué de l'Elysée, pour lequel s'ouvrait une « période de consultations ». Il s'agit de « regarder l'histoire en face d'une façon sereine apaisée, afin de construire une mémoire de l'intégration », est-il indiqué dans le texte rendu public par l'Elysée. C'est « une démarche de reconnaissance, mais il n'est pas question de repentance et « de présenter des excuses », a tranché la présidence française, en s'appuyant sur l'avis de Benjamin Stora qui cite en exemple le précédent des excuses présentées par le Japon à la Corée du Sud et à la Chine sur la Deuxième Guerre mondiale qui n'ont pas permis de « réconcilier » ces pays. Inspirés des 22 recommandations du rapport Stora, figure parmi les actes envisagés, l'entrée de l'avocate anticolonialiste Gisèle Halimi, décédée le 28 juillet 2020, au Panthéon qui accueille les héros de l'Histoire de France. Un hommage solennel devrait lui être rendu aux Invalides au printemps «quand les circonstances sanitaires le permettront», toujours selon le palais de l'Elysée.

La présidence française a par ailleurs souligné qu'Emmanuel Macron ne « regrettait pas » ses propos prononcés à Alger en 2017 dénonçant la colonisation comme « un crime contre l'humanité ». « Que pouvait-il dire de plus ? Il n'y a rien à dire de plus, en revanche, il y a beaucoup à faire », souligne le communiqué de l'Elysée.

« L'historien souhaite la mise en place d'une commission « Mémoire et Vérité » chargée d'impulser des initiatives mémorielles communes entre les deux pays », rapportait le Journal Le Monde dans son édition d'hier. L'historien propose que cette commission soit composée de « différentes personnalités engagées dans le dialogue franco-algérien », selon le même journal, qui précise que cette commission « pourrait formuler des recommandations sur 22 points ». Parmi ces points figurent la question des archives, le dossier des disparus (algériens et européens), les déchets issus des essais nucléaires français en Algérie et la pose des mines aux frontières algériennes, les restes humains des résistants algériens conservés au Muséum national d'histoire naturelle, ou encore le canon de Baba Merzoug pour lequel une commission franco-algérienne d'historiens sera créée afin « d'établir l'historique du canon « La Consulaire », ravi lors de la conquête d'Alger en 1830 et installé à l'arsenal de Brest, et de «formuler des propositions partagées quant à son avenir, respectueuses de la charge mémorielle qu'il porte des deux côtés de la Méditerranée ».