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Tébessa: Si la place de la Victoire m'était contée

par A. Chabana

Un grand ouf quand les agents de l'ordre se sont postés en plusieurs endroits, pour débarrasser la place de la Victoire (ex-Carnot) et ses ruelles adjacentes, de dizaines de revendeurs à la sauvette qui ont pris l'habitude d'ériger les étals de fortune tout autour de la piétonnière. Les passants hument une bouffée d'oxygène, enfin pour une fois la placette emblématique est redevenue fréquentable, pas pour longtemps, car les squatteurs reviennent à la charge, dès que l'alerte est levée.

Autrefois, le cours faisait la fierté de beaucoup de citadins qui s'y rendaient et s'attablaient sur les terrasses des cafés, faire ses courses dans les boutiques collées les unes aux autres dans un parfait alignement.

La placette a vu passer des gens, des personnalités de la ville, Malek Bennabi, Abdelaziz Khaldi, le médecin intellectuel, Cheikh Larbi Tébessi, Ali Alia le premier maire élu de l'Algérie indépendante.

Pour certains, c'était le passage obligé en allant vers le marché couvert, un autre monument historique et bijou architectural, aujourd'hui cerné par les immondices. Les nostalgiques évoquent avec un brin d'amertume la situation dégradée du lieu, lorsqu'il est livré à des cohortes de vendeurs informels.

« Il est de plus en plus difficile de marquer une halte, ne serait-ce que pour quelques minutes, en empruntant la place Carnot rebaptisée place de la Victoire tellement on se rend compte de son rabaissement, même les travaux de son aménagement avaient été exécutés sans tenir compte de certains paramètres d'architecture propres à l'espace. « Un projet qui aurait pu être plus valorisant et attractif pour les visiteurs avec, peut-être, de meilleurs équipements », nous dira un citoyen, enfant de l'antique Theveste, qui était un témoin attentif de plusieurs évènements vécus par le cours Carnot.

Et d'ajouter « dans le temps on venait s'asseoir ici, discuter et se raconter des histoires, prendre des nouvelles, l'après-midi, on faisait une virée dans les salles de cinéma du coin, Palace, salle des fêtes (El Maghreb) et la mythique Chahrazed, pour voir des films d'action et péplums, c'était l'adolescence heureuse. Pour me ressourcer, parfois je replonge dans mes souvenirs en noir et blanc, le temps paisible d'une époque révolue !! » Depuis des choses sont passées, l'endroit garde toujours une chaleur, une intimité, une senteur qu'on ne trouve nulle part ailleurs, la preuve, ces centaines de personnes qui s'y bousculent, en venant savourer son café, feuilleter son journal et récolter quelques rayons de soleil.