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Pourquoi un étranger pour évaluer le potentiel de notre domaine minier ?

par Reghis Rabah*

(Première partie)



Il est établi à travers des faits historiques que les dirigeants algériens restent plus sensibles aux sirènes qui retentissent de l'étranger que celles déclenchées par leurs propres enfants. Ainsi la question des «gaz de schiste» est venue dans le débat public en Algérie avec la publication par l'Agence Américaine d'Information sur l'énergie (EIA), en avril 2011, de chiffres tendant à démontrer que l'Algérie occuperait la 3éme place dans les réserves de gaz de schiste et serait le pays le mieux doté dans cette ressource .Bien que ces chiffres aient été, depuis lors, révisés à la baisse, ils font état de ressources extrêmement importantes. Tout récemment avec l'avènement de la deuxième république, un article paru dans la prestigieuse revue Britannique « Financial Times » (01) sur la situation de l'Algérie a crée un tollé sur les réseaux sociaux, repris et traduit par des journaux en Arabe et en Français et dit-on même a fait l'objet d'une discussion « chaude » dans les coulisse de club des Pins où venait juste de s'achever une rencontre de haut niveau entre le président et son gouvernement avec les 48 walis et les élus locaux. Le titre de l'article signé par un célèbre économiste, professeur /chercheur au King's Collège de Londres et dirige un laboratoire d'idées très réputé pour la pertinence de son analyse et jouit d'un aura dans le monde auprès des sociétés pétrolières et des bailleurs de fonds. Cette article est titré « New Head of Sonatrach is an opportunity of Algeria » (une nouvelle tête à Sonatrach est une opportunité pour l'Algérie). L'analyste n'est pas passé par 36 chemins pour exprimer son pessimisme sur la situation de l'Algérie pour la lier au sort de Sonatrach et surtout sur les épaules du nouveau PDG. Sur le fond, rien n'a été révélé par ce chercheur qui ne l'a pas été fait tous les jours par les experts Algériens dans la presse, les medias lourds et les différents forums universitaires Mais Nick Butler a excellé dans la transmission de deux messages d'une manière politiquement correcte aussi bien pour les dirigeants de l'Algérie que leurs partenaires européens.

1- les exemples de ces experts ne manquent pas.

Un Docteur d'Etat es sciences du nom de Nacer Eddine Kazitani, qui a rejoint très tôt Sonatrach alors dirigée par Belaïd Abdeslam et dont il a été responsable d'exploration de l'Algérie du Nord et de l'offshore jusqu'en 1978. Il a ensuite fondé et dirigé le CRAG (Centre national de recherches et d'application des géosciences). Il a également enseigné dans diverses universités algériennes et étrangères. Il dirige depuis une trentaine d'années un bureau d'études basé en France. Ce chercheur n'arrête pas d'alerter les responsables qu'ils perdaient leur temps dans la prospection et la recherche en offshore car pour lui il est convaincu, études à l'appui qu'il n'existe pas de roche mère dans la province géologique sous notre océan par voie de conséquence de pièges réservoirs. Il a même soutenu de réorienter cette recherche dans les métaux rares que le domaine Algérien en regorge. Un autre Abdelkader Saâdallah qui avait enseigné à Bab Ezzouar et s'est installé en Norvège à son compte. Géologue, expert auprès de nombreuses compagnies pétrolières. Il avait fait une proposition fortement documenté sur l'Atlas Saharien à l'Agence Nationale pour la valorisation en hydrocarbures (Alnaft) sans obtenir la moindre réponse ne serait-ce qu'un encouragement. Cette étude, envoyé le 18 mai 2020 offre une base solide pour évaluer le potentiel des hydrocarbures à travers des analyses structurales et géologiques de l'Avant Pays Atlasique. Il s'agit d'un ensemble de discussion et avis avec de nombreux geoscientistes. Sa soumission aux spécialistes aurait permis à l'expert de finaliser une proposition de haut niveau. Il se trouve que toutes ses tentatives pour servir son pays ont fini par des déboires. En effet, lors de sa communication dans les 11èmes Journées Scientifiques et techniques (JST11) de Sonatrach qui se sont tenues du 16 au 19 avril 2018 à Oran, au moment de communiquer comme par hasard il y a eu une coupure d'électricité. Son article, au demeurant très pertinent a été repris dans une prestigieuse revue en Anglais (02). En 2017, il soutenait que le Djurdjura renferme 60 milliards de m3 d'eau. En faisant une tournée dans les universités Algériennes pour le démontrer géologiquement, voilà ce qu'il lui arrive (02).

2- Pourtant, les étrangers restent fortement sollicités pour cette évaluation.

Le dimanche 29 septembre 2019, l'Agence Nationale pour la Valorisation en Hydrocarbures (Alnaft) avait annoncé dans un communiqué avoir signé une convention avec le géant américain ExxonMobil portant sur la participation de cette compagnie à « l'étude d'évaluation du potentiel en hydrocarbures des bassins du domaine minier Algérien.» C'est, lit ?on dans cette annonce la quatrième compagnie multinationale à rejoindre l'agence dans cette étude après l'Italien ENI, la française Total et la norvégienne Equinor. (03) L'objectif laisse t- on entendre est de consolider et de compléter le travail en cours confié à Beicip-Franlab dont le contrat a été signé le 10 septembre 2017 pour obtenir un livrable définitif en octobre 2020 car l'agence a jugé ces quatre compagnies comme leaders dans ce domaine notamment l'exploitation du gaz de schiste. Il faut souligner que la compagnie française Beicip-Franlab a fait une évaluation dans une première étape qu'elle a clôturée en juin 2019, phase qui a montré un potentiel qui « place l'Algérie aux premiers rangs mondiaux en termes de ressources en hydrocarbures mais ne précise pas leur nature conventionnelle ou pas. Ce qui a été déjà identifié selon ce communiqué c'est l'ensemble des bassins du Sahara avec les gisements les plus prometteurs. Les détails de ces zones sont prévus être livrés durant le premier semestre 2020 pour lancer les appels à la concurrence pour la conclusion des contrats conformément à la nouvelle loi sur les hydrocarbures dont les textes sont encore en cours d'élaboration. Selon le nouveau ministre en charge du secteur Abdelmadjid Attar, 17 sur 43 textes d'application sont prêts et se trouvent actuellement en cours pour avis et appréciation des autres secteurs conformément à la procédure en vigueur. Est-ce ceux là les fameux 150 gisements dont n'arrêtait pas de parler son prédécesseur Mohamed Arkab ?

1- Examinons d'abord la consistance de cette étude.

Ce contrat avec le consultant français (Beicip-Franlab) qui en a fait toute une publicité sur son site pour certainement attirer une clientèle, a tout révélé sauf le montant que le site e-bourse évalue à 3,69 millions de dollars (04). En quoi consiste cette étude exactement selon le consultant lui même ? Il s'agit d'une mise à jour et d'une synthèse pétrolière des bassins du Sahara Algérien dans «une opportunité multi-clients » qui est intégrée en 3G géologie-Géophysique ?Géotechnique (05) et basée sur 262 000 km de sismique 2D, 1800 puis et 70 000 Km2 de sismique 3D pour livrer lit-on sur ce site 230 cartes géologiques et géophysiques, 50 résultats de modélisation du système pétrolier et «150 cartes des risques pétroliers. » Comment procéder ? Interpréter d?une manière exhaustive les données souterraines, faire de même pour la géologie géophysique du Cambrien au Trias, analyser et cartographier les fairways à jour enfin modéliser le système pétrolier. Les régions concernées sont les bassins de : Tindouf /Reggan pour 34100 km, Timimoun pour 78100 km, Ahnet /Mouydir pour 26 400 km, Oued Miya pour 16500 Km, Berkine /Illizi 804 000 km et Hassi Messaoud pour 27 300 km. Le consultant français déclare avoir mobilisé 25 000 heures ?Hommes, consacrées uniquement à l'évaluation du potentiel d?hydrocarbures dans ce domaine.

2- Une redondance par excellence d'études réalisées par Sonatrach.

Le plus curieux dans cette affaire est que le même consultant français a déjà réalisé pour le compte des différentes structures de Sonatrach les études de ces régions séparément. Il existe donc une base de données exhaustive pour que les ingénieurs de la direction exploration de Sonatrach puissent exploiter sans apport extérieur de consultations. Il est clair et établi que ces bassins sont connus en détail par les équipes de Sonatrach. Comment peut-on concevoir que la dixième compagnie mondiale confie son domaine minier déjà étudié à un consultant français pour réorienter sa stratégie pétrolière et gazière. Il faut souligner par ailleurs que le cambro-ordovicien renfermant les hydrocarbures conventionnels est parfaitement maitrisé par les équipes géologiques de la direction exploration de Sonatrach depuis des décennies pour ne pas dire depuis sa création. Maintenant en ce qui concerne le gaz de schiste ou les bassins shale gas, une équipe pluridisciplinaire sous la conduite de SH/PED (production-Engineering ?développement) a été chargée en février 2011 d'évaluer le potentiel du point de vue production et économie des bassins Shale Gas en Algérie. De manière globale, ce projet a été subdivisé en deux phases complémentaires. La première était réservée l'estimation du potentiel des basins Shale Gas en Algérie et leur évaluation économique préliminaire. La deuxième de confirmer le potentiel par région pour leur développement et exploitation éventuelle. Ce travail a été finalisé dans les détails et qui a permis une publication par l'Agence Américaine d'Information sur l'énergie (EIA), en avril 2011, de chiffres tendant à démontrer que l'Algérie occuperait la 3éme place dans les réserves de gaz de schiste et serait l'un des pays les mieux doté dans cette ressource. Cette agence reprend le document des équipes de Sonatrach pour donner les moindres détails par niveau producteur Dévonien / Silurien : superficie Totale, celle prospectée du réservoir, la profondeur du réservoir, le Total Organic Carbon TOC, les réserves en place et celles récupérables. Les régions visées sont Tindouf, Reggane, Timimoune, Ahnet, Mouydir Ghadamès/ Berkine et Illizi. Il est très difficile avec ces détails d'attendre ce qui vont donner ces nouvelles études conduites par cinq géants pétrolier et un cabinet de consulting qui n'a jamais quitté l'Algérie ?

*Consultant, économiste pétrolier

A SUIVRE  - COMMENT BECEIP-FRANLAB A ACCOMPAGNE SONATRACH DANS L'ACHAT CONTROVERSE DE LA RAFFINEREIE ITALIENNE D'EXXONMOBIL AUGUSTA

Renvois:

(01)-https://www.ft.com/content/5bd9859c-4e4b-11ea-95a0-43d18ec715f5

(02)-https://l.facebook.com/l.php?u=https%3A%2F%2Fassets. geoexpro.com%2Fuploads%2F366fb341-ff7e-4755-ade3 5c6414266bac%2FGeoscience_Magazine_GEO_ExPro_V16i3_2019.pdf%3Ffbclid%3DIwAR3QfT5xTKz01gT_2ZwKj0W9jrOEx7prN95piDVD54FBFYlX42e5ZaTl7Ns&h=AT2s4fkPD_wTrbq4DvGFk4SFCWBP6pumBo4njW9dDpMD_e4inPsGMqX3vUNeSReW1UH2_1kYSpQdlHEJQoVdoGxlanXBdlqFKNrrXEtZBvVHp

VZ5jNjyJpS1Rd9X0tk8YL8V

(03)-https://www.elwatan.com/edition/economie/lalnaft-la-annonce-hier-exxonmobil-associee-a-levaluation-du-potentiel-en-hydrocarbures-de-lalgerie-01-10-2019

(04)-http://bourse-dz.com/alnaft-369-millions-pour-une-etude/?fbclid=IwAR2_QsWboZVyzyHSSrp-fZCgj_QMqw_fLlYGYQ4wFchUFXZQwXo6mg5ZeQM

(05)-http://algerian-sahara-synthesis.com/?fbclid=IwAR2ww0uNvOcwn9gVo5es4jo2BfhKWYlIOJ2qfZhqExkvxLeW3IXcooCflVw