On pouvait
accorder le bénéfice du doute au président américain sortant, Donald Trump, quand il parle de fraude aux élections
présidentielles au courant du vote ou lors du comptage des voix, mais ses
gesticulations perdent tout bon sens quand l'écart des voix atteint une
proportion impossible à réduire, quand ses plaintes devant les tribunaux sont
rejetées par les juges les unes après les autres. Pourquoi alors n'accepte-t-il
pas sa défaite plusieurs jours après la victoire de son rival, Joe Biden, qui a obtenu les faveurs de 306 Grands électeurs
(victoire à 270) et plus de 78 millions de voix, contre 232 Grands électeurs
pour Donald Trump et plus de 73 millions de voix
(source AP) ? L'écart n'est pas des moindres, voire indiscutable avec plus de 5
millions de voix et 74 Grands électeurs, pourtant le président sortant, s'il
commence à reconnaître à demi-mot la victoire de son rival, n'en continue pas
moins de jouer une comédie hollywoodienne qui lui fait croire, et à une opinion
crédule, qu'il est encore le maître de la Maison Blanche. Une conduite
réprouvée par de nombreuses personnalités politiques américaines, y compris au
sein de son propre camp républicain, mais rien à faire, Donald Trump se complaît dans des déclarations pleines
d'ambiguïté. L'évolution enregistrée ces trois derniers jours dans son
discours, quand il concède une victoire à son rival avant de revenir
immédiatement à la charge pour affirmer que cette victoire n'est acquise que
grâce à une élection truquée et réitérer sa volonté d'aller jusqu'au bout pour
en contester ses résultats, jette plus de confusion sur ses réelles visées.
S'agit-il de mythomanie, d'une habile manœuvre politique qui permettrait aux
candidats républicains de gagner plus de sièges au Sénat (élection en cours en
parallèle à l'élection présidentielle) ou encore d'une suite de campagne qui
lui rapporterait assez d'argent pour préparer l'avenir ? Si le président
sortant arrive à croire à ses propres affabulations et si l'on observe
l'influence des sorties du président sortant sur ses électeurs, qui adhèrent
avec grande conviction à la thèse de la fraude électorale, le cas psychiatrique
ne serait pas à écarter. Mais, selon des observateurs avisés, l'attitude de Trump est bien calculée. Il sait pertinemment qu'il va
quitter la maison le 20 janvier prochain mais, certain qu'il a un avenir
politique, il veut empêcher les démocrates de remettre en cause tout ce qu'il a
bâti durant son mandat en leur mettant les bâtons dans les roues pour faire
échec à leurs projets sous la présidence de Joe Biden,
qui sont de toute évidence totalement opposés à ses convictions politiques. En
cela, la bataille autour du contrôle du Sénat est capitale. L'enjeu du
renouvellement du Congrès, dont un tiers du Sénat, qui se joue très serré entre
républicains et démocrates, ne serait pas étranger à cet entêtement de Trump à vouloir rester jusqu'à la fin du délai
réglementaire en tant que président à 100%, afin de garder son aura
présidentielle et faire gagner des sièges à ses poulains au Sénat pour asseoir
une majorité républicaine qui réduirait considérablement la marge de manœuvre
de son successeur. Et durant cette même période, il serait en train de collecter
des fonds auprès de ses électeurs et sympathisants, soit dit pour mener sa
guérilla judiciaire, mais en réalité, c'est pour renflouer des caisses épuisées
et s'assurer une pole position de chef de l'opposition dans les quatre années à
venir. Et tant qu'on est dans le show si affectionné par Donald Trump, pourquoi ne pas se représenter aux élections
présidentielles de 2024 ? Lui qui n'aime pas les perdants serait, ainsi, un
futur gagnant.