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Confusion autour des prix

par Abdelkrim Zerzouri

Les maquignons affutent leurs armes ou sont-ils déjà fin prêts pour saigner à blanc les citoyens ? Probablement qu'ils ont déjà concrétisé une grande part de leur stratégie, notamment en effectuant des achats massifs de moutons pour dominer le marché à la veille de la fête du sacrifice et fixer, surtout, les prix qui leur conviennent.

Cependant, il y a lieu de faire remarquer que de nombreux paramètres entrent en jeu cette année et brouillent complètement les prévisions autour du prix du mouton, dont le contexte exceptionnel de la crise sanitaire qui va réduire les déplacements et les surfaces non réglementées destinées à la vente du mouton du sacrifice, chose qui handicaperait les mouvements et augmenterait les risques pour les maquignons. Ainsi que l'autre facteur lié au pouvoir d'achat des citoyens, qui a chuté durant ces derniers mois à cause de l'arrêt de la machine économique et des activités commerciales dans le sillage d'un long confinement dans le cadre de la lutte contre la propagation du Covid-19, et qui va automatiquement provoquer une baisse de la demande dont les effets se répercuteraient sur les prix du mouton du sacrifice, disponible en abondance cette année à cause de la mévente entraînée par la fermeture des marchés de bétail ces derniers mois.

Par contre, d'autres estimations fournies par des membres de la fédération nationale des éleveurs placent haut la barre du prix du mouton du sacrifice. Selon leurs évaluations, une hausse de pas moins 10.000 dinars, devenue traditionnelle au fil des ans, n'est pas à exclure par rapport au prix du mouton du sacrifice pratiqué l'an dernier. Evidemment qu'ils ont leurs raisons ou arguments pour annoncer la flambée sur les marchés, certaines s'inscrivant dans la logique, comme le grand nombre d'intermédiaires en place et la sécheresse qui pousse les éleveurs à s'approvisionner en aliment de bétail, cher et rare, mais sans tenir compte de données non moins logiques, et qui plaident pour des prix relativement bas, notamment l'indice de la baisse évidente de la demande. La fête de l'Aïd El Adha, tout comme la précédente fête religieuse de l'Aïd El Fitr, sera cette année très particulière.

A près d'un mois de l'Aïd El Adha, donc, la vision du marché du mouton reste très incertaine, accrochée entre deux hypothèses opposées. Et, on n'a pas encore vu la réaction des ministres du Commerce et de l'Agriculture, qui peut également influer le cours du marché à travers plusieurs dispositions et mécanismes à leur portée. A condition, bien sûr, qu'on tire la leçon de l'échec des prévisions concernant le prix de la viande du Ramadhan, annoncé à 800 dinars mais le consommateur en eu droit pratiquement pour le double. D'ailleurs, c'est peut-être cet échec qui pousse les autorités concernées à garder le silence et affiner une stratégie dans la discrétion pour casser toute initiative des intermédiaires et des maquignons en général qui se frottent en ces moments les mains derrière le dos mais qui pourraient y laisser des plumes dans le cas où leur plan serait mis à mal. En tout cas, il est indispensable que les autorités marquent de leur empreinte cette fête religieuse en cassant les prix du mouton du sacrifice.