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L'INCENDIE N'EST PAS ETEINT

par Abdou BENABBOU

Les mouvements de masse se libèrent malgré une chape d'inquiétude patente. Tous les signes de l'animation sociale reparaissent sauf les rois d'entre eux, leur seigneurie les cafés première nature coutumière des Algériens, berceaux et antres en même temps où s'étuvent les plus lourds des soucis et des préoccupations de la société. Hier tribunes et refuges faute de cercles fertiles pour une intelligence savante et conséquente, les cafés et leurs terrasses, toujours muets, pérennisent aujourd'hui par leur bannissement prolongé le ricanement d'une pandémie décidée à ne pas s'en aller.

Tout est organisé en surface avec un tâtonnement n'avouant pas son nom pour que la vie sociale redevienne comme avant. Les superettes et les marchands de fruits et légumes qui se sont bien frotté les mains renouent avec la somnolence après une activité débordante que le coronavirus leur a chichement rémunérée pour qu'en définitive on s'interroge avec raison sur un bilan d'un confinement ni-figue, ni-raisin. On a observé avec regret des paradoxes flagrants, résultat d'un impossible contentement d'une population à laquelle il fallait permettre de boire et de manger, mais les responsables politiques ne pouvaient s'autoriser une indulgence confondue avec une faiblesse qui nuirait à leur autorité. Tous les acteurs économiques n'ont cependant pas bénéficié de la même largesse contrainte et s'en est suivi au grand jour la débrouillardise et les comportements incongrus quitte à piétiner la prudence et le civisme.

Malgré les assurances et l'optimisme des chiffres et des statistiques, l'incendie dévastateur n'est pas éteint et dans plusieurs pays les braises réaniment le feu. Le danger fatal pour les Algériens comme l'ensemble du monde serait de croire que par les libertés accordées par des mesures en trompe-l'œil la vie a renoué avec la normalité. Les frontières qui s'ouvrent, les aéroports qui se réveillent ou les transports qui redémarrent ne seraient que les signes d'un armistice dérisoire signé avec une épidémie satanique toujours tenace dont le dernier mot n'a toujours pas encore été dit.