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« Chitta »: suite et fin?

par Belkacem Ahcene Djaballah

«La politique du temps de crise (qui est le temps normal des gouvernements) n'est pas un concours d'entrée dans les grandes écoles, la gestion cool d'une start-up ou un renvoi d'ascenseur à «ceux qui ont pris part à l'aventure». C'est une vraie fonction qui exige de connaître et de sentir le pays, de le prendre tel qu'il est et non tel qu'on rêverait qu'il soit. Elle réclame de l'expérience, le sens du possible, une réflexion rapide avant de parler et même parfois de la modestie» (Thierry Lentz , historien et directeur de la Fondation Napoléon, avril 2020) Ouf ! Il était vraiment temps que les choses soient mises au clair. Cela commençait à nous «énerver» car nous rappelant l'époque de «fakhamatouhou», du «Programme du président», etc? Tout un vocabulaire venant surtout d'officiels (ministres, walis et autres administrateurs subalternes), mais aussi de personn(ag)es de la société civile (des journalistes et autres «experts» y compris) qui, à leur moindre prise de parole, invoquaient, évoquaient et «convoquaient» le Chef de l'Etat.

A tout bout de champ! De quoi faciliter les critiques des contempteurs du président de la République. Mais en fait, à mon sens, une «manière d'être et un art de faire» pour se «réfugier» - inconsciemment, pour beaucoup, ce qui les excuse, provisoirement cela s'entend - derrière le paravent présidentiel et, en cas d'échec ou de couac, éviter de «prendre des coups» et de s'en sortir indemne. Pourtant, lors de la cérémonie de prestation de serment, le nouveau chef de l'Etat a été on ne peut plus clair: «Svp ! plus de «fakahmatouhou» (Son Excellence)». Pas plus clair que ça, il n'y avait pas mieux et pas plus ! Mais, il a commis l'erreur ( ?) -même pas ! Pour ne pas alourdir son discours- de ne pas donner plus de précisions, comptant assurément sur le courage et l'engagement de ceux qui allaient l'accompagner dans sa gouvernance, sur l'«intelligence naturelle» des nouveaux impétrants, et sur l'humilité des «candidats». Certainement gêné ou peut-être même énervé (cela se comprend d'autant que le confinement, dû à cette saleté de Covid 19, a accru, chez les confinés, le temps de vision des «infos» et de consultation des réseaux sociaux et leur niveau de la «critique» tous azimuts ), comme bien d'entre-nous (je parle ici des gens de la com'), le Chef de l'Etat, par le biais du ministre porte-parole de la présidence de la République, vient d'ordonner à l'ensemble des départements ministériels et des institutions de l'Etat de cesser d'utiliser l'expression «sur orientations et sur instructions du président de la République». Clarifications: «le président ne demande pas à être sacralisé ou glorifié, mais de lui apporter un soutien solide». Et, je suppose, après avoir participé activement à la conception du programme (il y a, en fait un plan d'action, ce qui est moins contraignant), surtout d'adhérer, d'agir et de réussir. Tout en rappelant les propos du président de la République, lors de son investiture : «si je réussis, aidez-moi et encouragez-moi, et si j'ai failli corrigez-moi.           

Le culte de la personnalité est révolu dans l'Algérie nouvelle». A bon entendeur ! Sera?t-il entendu ? Pas si sûr tant il est vrai que la manière «larbiniste» de s'exprimer, sous-couvert de «respect», un produit détesté et détestable, produit à la chaîne durant des décennies à travers une vie politique autoritariste et/ou paternaliste, s'est implémentée dans les comportements des individus, les transformant peu à peu en véritable attitude sociopolitique. Une maladie, quoi !

Il est vrai que de l'autre côté du miroir (plutôt en son haut), certains, aveuglés par le pouvoir - réel ou fictif -ou voulant le récupérer, ont insidieusement imposé la façon de dire et de faire: je me souviens avoir présenté un ouvrage autobiographique («Appelez-moi Colonel»! Un témoignage de Achour Bounoui, préfacé par Hocine Zehouane. Koukou Editions. Alger 2012. 259 pages, 650 dinars) d'un cadre d'entreprise économique publique qui décrivait l'«enfer» vécu avec un chef de la sécurité-un retraité de l'armée, disait-il - qui forçait quasi-physiquement tout le monde à l'appeler «mon colonel !» en souvenir, peut-être, d'un passé pourtant révolu. La caserne transférée!

Bien sûr, tout cela n'empêche nullement que ces «amabilités» soient dites dans un cadre amical, ne serait-ce que par respect pour les moments positifs d'une carrière, surtout si elle a été bien remplie de réalisations.

Ainsi, pour ma part, je ne dédaigne pas , j'en éprouve même une certain plaisir, rencontrant un de mes anciens collaborateurs ou un de mes anciens étudiants, d'être appelé «Monsieur le Dg !» ou «Professeur !» et je suis très à l'aise de dire, lors d'une rencontre par hasard, à quelqu'un qui l'a été, «Monsieur le ministre !» ou «Mon Général !», même s'il ne l'est pas depuis bien longtemps sauf, sauf s'il n'a pas été bon ou s'il a été, à mon avis, mauvais. Dans ce cas-là, j'utilise seulement son nom ou prénom précédé, par politesse, d'un «Si !» ou, bien mieux, je l'évite et je salue de loin. Tout simplement ! La distanciation, un (nouveau) geste-barrière bien plus sain pour éviter tous les virus ! Celui de la «chitta», y compris.