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Tlemcen - Coronavirus: «pas encore la psychose mais l'angoisse monte»

par Khaled Boumediene

Depuis l'apparition du coronavirus en Algérie, le sujet est dans toutes les conversations à Tlemcen. La rue est de plus en plus paniquée et les craintes des habitants s'intensifient.

De nombreuses familles suivent de près le développement cette épidémie qui promet de prendre de l'ampleur dans les jours à venir et menace tous les pays du monde, sachant que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a qualifié récemment l'épidémie du Covid-19 de pandémie. Il est à rappeler dans ce cadre que c'est au mois de décembre, dans la ville chinoise de Wuhan (11 millions d'habitants), que les premiers cas d'un coronavirus inconnu sont détectés.

En l'espace d'un mois, le virus se propage largement en Chine et fait des milliers de contaminés et des centaines de morts.

La contagion a ensuite gagné plusieurs pays d'Asie, à l'instar du Japon, de la Corée du Sud et bientôt d'autres régions du monde dont l'Italie et la France.

A Tlemcen, à l'instar des autres régions du pays, des familles commencent à se poser des tas de questions sur la menace posée par ce coronavirus. « Faut-il serrer ou non la main de mes collègues au travail ou dans la rue? Quelles mesures de protection essentielles dois-je prendre pour mes enfants pour les protéger contre ce nouveau coronavirus ? Faut-il aller ou non aux fêtes de mariage de mes proches, des voisins ou de mes amis, de peur de rencontrer des personnes infectées ? Faut-il siroter un café dehors avec des amis ? Ce sont des questions qui me viennent tous les jours à l'esprit. Et on commence vraiment à s'inquiéter pour notre santé et celle de nos enfants ! Chaque jour, je donne des conseils à mes enfants pour prendre soin de leur santé. Par exemple, je leur demande de se laver fréquemment les mains avec une solution hydro-alcoolique ou à l'eau et au savon, d'éviter les contacts avec d'autres personnes, d'éviter de se toucher les yeux, le nez et la bouche et de maintenir une distance d'au moins un mètre avec les autres personnes, en particulier si elles toussent, éternuent ou ont de la fièvre. Je leur dis que lorsqu'une personne infectée par un virus respiratoire, comme le COVID-19, tousse ou éternue, elle projette de petites gouttelettes contenant le virus. Si vous êtes trop près, vous pouvez inhaler le virus, c'est tout ce qu'on peut faire ! Il y a aussi certaines règles d'hygiène qu'on essaie de respecter à la maison contre ce coronavirus. Ces petits gestes offrent une grande protection ! », a souligné avec anxiété un habitant de Tlemcen. Un autre père de famille, prudent, de la ville de Mansourah, a indiqué que « tous les jours je surveille la température de mes enfants. En cas de fièvre, de toux et de difficultés respiratoires, je les emmène sans tarder chez le médecin pour consultation, car il peut s'agir d'une infection respiratoire ou d'une autre affection grave ». Certains pères de famille ont parfois hésité à envoyer leurs enfants à l'école (avant la décision d'avancer les vacances scolaires) et d'autres encore ont carrément annulé tous leurs déplacements. Il y en a aussi ceux qui ont annulé leurs voyages à l'étranger. Selon certaines sources, des familles de Nedroma et Ghazaouet ont fui leurs proches émigrés pour ne pas leur serrer la main et éviter tout contact éventuel avec le coronavirus. A Chetouane, des étudiants de l'université avaient demandé à un collègue qui a éternué pendant les cours de quitter immédiatement la classe par crainte d'être contaminés par le coronavirus.

Le même incident s'est produit dans un bus de transport urbain où le chauffeur a exigé d'un jeune enrhumé pris d'une forte toux de descendre du bus malgré l'opposition affichée par quelques passagers qui n'ont pas toléré le comportement inexpliqué de ce conducteur de bus. La journée de mercredi dernier a été marquée par des échanges virulents et parfois violents entre une femme et deux autres clients d'un taxi. Au cœur de la discorde : la peur du coronavirus.

Tout a commencé lorsqu'une femme n'ayant pas supporté les éternuements d'un jeune a demandé au chauffeur de la déposer tout de suite, ce qui a déplu aux deux autres jeunes assis dans le taxi. Mais, pour un médecin-spécialiste du service de chirurgie «A» du CHU de Tlemcen, il n'y a pas lieu de paniquer pour le moment. « Non ce n'est pas encore la psychose, mais on sent quand même, peu à peu, monter l'angoisse, et c'est normal quand on voit le développement du coronavirus dans le monde, cela fait vraiment peur ! ».

Par ailleurs, le centre hospitalo-universitaire « Damerdji Tidjani » de Tlemcen et l'établissement public hospitalier de Remchi n'échappent pas à la campagne de rumeurs sur le décès de personnes atteintes de l'épidémie du coronavirus, pour semer la psychose chez les patients. Les rumeurs les plus folles circulent tous les jours sur les réseaux sociaux après l'annonce de la mise en place d'isoloirs au CHU et d'une unité spéciale de veille à l'EPH de Remchi. Face à cet état des choses, la directrice de la santé, Mme Nabila Allili, le directeur général du CHU, Nasreddine Mazouni et la directrice de l'EPH de Remchi, Mme Amina Soufi, ont organisé de nombreuses rencontres avec les personnels médicaux et proches de malades afin de les appeler à garder leur sang-froid et leur bon sens. « Depuis l'apparition de ce coronavirus, l'hôpital est assailli de dénonciations sans fondement, d'informations erronées et de bruits divers. Des mesures sanitaires préventives ont été prises par la DSP, le CHU de Tlemcen et l'EPH de Remchi, pour accueillir les patients atteints et limiter les risques de contamination », a affirmé Nasreddine Mazouni, DG du CHU de Tlemcen.