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Walis... de Bouteflika à Tebboune

par El Yazid Dib

Le récent mouvement opéré dans le corps des walis est à apercevoir différemment. Il y a ceux qui sont partis, ceux qui sont restés et ceux qui arrivent. Pour les premiers, la page est tournée. Pas définitivement, peut-être. Les seconds, qui n'ont pas bougé, portent toujours la signature de Bouteflika. Ainsi, ils le perpétuent ne serait-ce qu'à travers les arrêtés qu'ils prennent portant en leurs visas les références du décret présidentiel les nommant. Leur maintien est une confirmation tacite et non pas une nouvelle désignation frappée du sceau du nouveau président. L'histoire des collectivités locales, leur biographie ne manqueront pas à leur écriture de mentionner cet encombre. Quant aux derniers, ceux qui arrivent l'on y décèle toutefois des revenants. Ils sont censés servir dans une nouvelle république, loin de ces reflexes d'arrogance, de mépris et d'orgueil. Mais les relents du contexte dans lequel ils se sont vus doucereusement naître prendront à l'évidence le dessus.

Les critères à ce niveau-là pour cette hiérarchie sont imperceptibles, sans apparence. Personne n'osera ainsi percer le voile oh ! Combien mystérieux de ce pouvoir que l'on appelle discrétionnaire. Il s'exerce à l'humeur, l'accointance et le plus souvent à l'air de proximité. C'est dire que tous les walis depuis au moins 2015 sont estampillés du timbre de Bedoui. Le rappel au service de walis évincés un temps est pris ou pour une réhabilitation ou pour une crânerie et une vengeance. A défaut de connaître les causes de l'évincement l'on ne peut justifier ce retour. C'est ce défaut de bilan qui justement laisse croire que le pouvoir discrétionnaire est impensable, intime et personnel. Il ne se baigne pas dans l'objectivité publique. Sinon, pourquoi la réapparition de walis s'applique pour les uns et pas pour les autres ?... Et puis l'Algérie compte des millions de cadres et il n'y pas que ceux qui en ont fait métier d'aller et de revenir de pourvoir aux dits postes.

Bedoui ministre de l'Intérieur aurait fait de la nomination un acte social. Un geste de charité biblique. Car il y a, en conséquence, des chefs de daïra qui moisissent sur place depuis des années dans des contrées abruptes au moment où d'autres nouvellement embarqués se mettent à la dégustation novice des fruits de mer. Si un ministère de souveraineté n'arrive pas à localiser, sur un plan de carrière préétabli, ses cadres, leur ascension professionnelle, leur itinéraire fonctionnel, il ne saura que les faire avancer dans les échelons indiciaires. Pour les échelles, c'est comparable à un escalier ; l'on monte palier par palier. En bon droit, l'on ne doit pas encourager l'empressement de griller les étapes. Le mode crescendo a le mérite de permettre la maîtrise par l'expérience. L'on voit mal un wali qui n'a pas fait la locale à différents niveaux puisse se déterminer à ses profonds actes. L'on voit aussi des wilayas classées médiatiquement importantes confiées à des neufs commis à l'emploi.

L'aspiration de tous à un Etat de droit, fort, juste, aéré est toujours une revendication du peuple et du pouvoir. Seulement espérer un changement n'aboutit pas à sa réalisation. Lui créer ses conditions, agir et espérer qu'il réussisse n'aboutira qu'à son triomphe. Tout le monde souhaite et exige que rien ne puisse être comme avant, et personne ne s'attelle à en faire une exigence d'abord pour soi. Ce changement souhaité est condamné à passer par ceux qui incarnent l'autorité des institutions de cet Etat.

Si le wali garde les pieds sur terre, ne parle pas trop - il y en a ceux qui n'ont que du vent à vendre - règle en urgence les problèmes soulevés et ne les confie pas au temps ou à des commissions infinies, parfois inutilement à la «justice», s'abstient d'être pédagogue et s'investit davantage dans le souci du citoyen, ne gueule pas, ne se compromet nullement, ce sera un début de commencement d'une ère nouvelle de ces démembrements de la république.