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La règle 51/49 dans le flou

par Abdelkrim Zerzouri

Encore des bobos avec ce fâcheux écart des textes d'application qui vont généralement de pair avec toute loi de finances. La règle 51/49, régissant l'investissement étranger en Algérie, qui focalise de fait les intérêts des opérateurs économiques et hommes d'affaires étrangers, demeure entourée d'un flou opaque plus de 20 jours après la parution de la loi de finances 2020. Il est bien stipulé que sa suppression concerne les secteurs non stratégiques, mais en laissant dans le vague la définition du secteur « non stratégique » où la règle en question sera annulée, et où tout investisseur pourrait lancer son projet sans contrainte de recherche d'un quelconque partenaire algérien, associé à hauteur de 51% dans une société, à créer, de droit algérien. La nouvelle de la suppression de la règle 51/49, qui fait polémique depuis son instauration en vertu de la loi de finances 2009, a mis dans l'attente, depuis au moins trois mois, la curiosité des potentiels investisseurs étrangers, qui veulent connaître les détails des secteurs non stratégiques qui leur seront ouverts sans la condition de concéder la majorité des actions à un investisseur local. Et, l'attente s'avère longue car, même après la publication au début du mois de janvier de la loi de finances 2020 dans le journal officiel, rien n'est venu éclairer leur lanterne. On commence, ainsi, à s'impatienter dans les milieux des affaires dans et hors du pays. C'est le président de la Chambre algérienne de commerce et d'industrie (CACI), Abdelkader Gouri, qui a publiquement rompu le silence à ce sujet, en signalant qu'il a été sondé sur la suppression de la règle 51/49 par des représentants des ambassades et des entreprises étrangères déjà présentes en Algérie. Tous lui demandaient des explications sur les nouvelles dispositions concernant la règle 51/49, notamment des précisions autour des secteurs non stratégiques concernés par la suppression en question. Hélas, en l'état actuel des choses personne ne peut leur donner le moindre éclairage sur les zones d'ombre qui entourent le dossier. Sans les textes d'application de ces nouvelles dispositions, on reste dans le domaine de la spéculation.

Questionné quelque deux mois avant la signature de la loi de finances 2020, sur les secteurs considérés comme stratégiques en Algérie, l'ex-ministre des Finances Mohamed Loukal avait indiqué qu'il s'agit surtout des secteurs de l'Energie et des Finances.

Restant, donc, dans l'à priori, il indiquera inclure dans ce cadre le secteur des hydrocarbures et des mines, le secteur des banques et des assurances, où la règle des 51/49 sera toujours en vigueur. Mais, le voile ne sera pas pour autant levé, pas tant que les textes d'application ne suivent la loi de finances 2020. Pour ne rien laisser au hasard et aux supputations, seul un décret exécutif définira avec précision la nomenclature des secteurs stratégiques, où la règle 51/49 sera maintenue, et les secteurs non stratégiques, concernés par la mesure de sa suppression. S'agit-il d'un travail laborieux pour enregistrer tout ce retard ? Bien que des considérations technico-politiques peuvent, effectivement, générer des hésitations et retarder encore ces textes d'application, il serait judicieux de trancher avec célérité dans le dossier si on veut vraiment toucher au gain recherché à travers l'instauration de ces nouvelles dispositions, soit l'amélioration du climat des affaires et l'attractivité de l'économie nationale. Parce que le flou qui persiste ne peut que détourner les investisseurs étrangers vers d'autres contrées, qui les accueillent à bras ouverts.