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UN PREMIER MINISTRE ET UNE PROXIMITé DISCRèTE

par Abdou BENABBOU

Comme dit l'adage populaire, Abdelaziz Djerad est sorti de derrière les roseaux. Riche d'un diplôme en béton et d'une carrure en fer forgé, il ne traîne aucune casserole, sinon d'avoir été à deux reprises secrétaire général de très hautes institutions avec un long passage à la tête de l'ENA. Il a entrepris cependant un passage discret au FLN et n'a pas gardé une accointance particulière avec le pouvoir sinon d'avoir été remercié sans ménagement par Bouteflika. Il doit cependant en connaître parfaitement ses passerelles et ses gués pour avoir été un chargé de mission dans l'ombre de tous ses gestes et ses mouvements. Cette proximité discrète est un atout pour lui. Elle va lui permettre de bien mesurer l'intensité des dits chuchotés dans les couloirs officiels et les non-dits tus dans les salons des inimitiés.

On retiendra qu'il est nommé Premier ministre et non chef du gouvernement. La nuance est importante car elle souligne la nature de la gouvernance présidentielle que le chef de l'Etat veut établir. Elle préfigure d'ores et déjà les grands axes de la future Constitution annoncée et le poids des responsabilités du prochain exécutif gouvernemental face au Parlement.

Djerad reste cependant une surprise et il est fort à parier que d'autres seront annoncées avec un personnel gouvernemental auquel peu d'initiés attendaient. D'aucuns présagent à tort ou à raison qu'il ne sera pas puisé du décor politique trop visible jusqu'ici, sinon de faire appel à quelques supposés expérimentés sous un faible éclairage et on doit reconnaître que dans ce domaine le président de la République en respectant ses engagements s'est volontairement plié à une des principales revendications du Hirak.

Il est aisé de penser qu'il ne s'arrêtera pas à ce mi-chemin. Celui-ci est cependant si long et si sinueux et son défrichage va s'annoncer très ardu. L'emprunter relève de la gageure car le redressement du pays ne saurait se suffire de l'engagement seul de quelques hommes, quelles que soient leurs hautes qualités et compétences car il s'avère essentiel de redéfinir en profondeur, de la base au sommet de la société algérienne, un nouveau profil des acteurs politiques et économiques engagés dans la marche du pays.