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LA FRANCE INSOUMISE ET L'OBLIGATION DE RESERVE

par Abdou BENABBOU

On aurait aimé voir Mme Mathilde Panot, responsable parlementaire française, présidente potentielle de l'Assemblée, assister aux funérailles de la directrice d'une école maternelle à Pantin dans la banlieue parisienne plutôt que de la surprendre se faufiler au cœur d'une marche protestataire d'adolescents à Béjaïa. Sa présence aux côtés des milliers d'enseignants venus manifester leur peine et leur solidarité à l'adresse de la directrice d'école qui s'était suicidée aurait été mieux indiquée pour témoigner sa compassion militante et aurait mieux convenu au combat du parti de M. Jean-Luc Mélenchon. L'infortunée directrice d'école s'était donné la mort non pas par extrême penchant passionnel, mais à cause du désespoir et la mal-vie qui déshumanisent et détruisent une large couche de la société française.

Malgré l'adhésion et la solidarité que l'on est libre de témoigner pour les revendications souvent violentes d'une partie du peuple ami français, on imagine mal un responsable parlementaire algérien, portant un gilet jaune, aller s'engouffrer dans les marches revendicatives des Champs-Elysées. On pourra rétorquer que l'on voit bien de temps à autre des drapeaux de l'Algérie se pavaner avec maladresse dans les rues parisiennes, mais c'est là, sans conteste, une gesticulation de malotrus en mal de hardiesse qui ne représentent qu'eux-mêmes.

A l'inverse, qu'elle le veuille ou non, la parlementaire française, célèbre par ses incartades, ne représente pas qu'elle-même. Ses responsabilités officielles font d'elle une représentante attitrée de la France, soumise et contrainte à l'obligation de réserve. Quelle qu'en soit son objectivité, l'insoumission qui caractérise son parti politique, en responsable avisée, ne l'autorise pas à galvauder avec légèreté une maladresse susceptible de contrarier des relations voulues sereines entre l'Algérie et la France.

Au-delà du choix très particulier de la ville Béjaïa comme terrain d'intérêt, la députée avait le loisir de déployer sa solidarité désintéressée envers l'Algérie dans d'autres carrés plus utiles et plus profitables pour les deux peuples.