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UN BOUT DE VERITE

par Abdou BENABBOU

Nous ne savons pas si l'heure du bilan complet de la gouvernance du président déchu est arrivée, mais elle est propice pour qu'un bout de vérité soit dit.

L'une des grandes erreurs d'Abdelaziz Bouteflika est sans conteste de s'être mis une large partie des médias à dos. La traitant dès sa première investiture de tous les noms de coq et bien qu'elle n'attendait de lui aucune mise à l'honneur particulière, il lui avait de facto tourné le dos en la gratifiant de tous les qualificatifs désobligeants, allant même jusqu'à la souiller de griefs insultants. Sans doute là aussi il avait gardé une rancune et une rancœur pour une partie de la corporation qui s'était immiscée dans ses déboires lors de ses mésaventures avec la Cour des comptes. Les commentaires journalistiques et la coloration des états des lieux ont souvent l'odeur de la peinture du moment et ceux qui les font sympathisent avec ceux qui leur ouvrent les portes.

Ses prédispositions revanchardes reposaient aussi sur des préjugés innés d'un système politique privilégiant avec outrance la suspicion et le culte du secret nés au maquis avec la guerre d'indépendance. Pour lui comme pour sa génération, la force de la communication n'est opérante et efficace que quand elle est motus et bouche cousue ou à la limite quand elle se manifeste seulement par les clameurs obéissantes et par la débilité des applaudimètres.

Des étincelles se produisent cependant pour obliger des caractériels à admettre qu'il y a péril à délaisser un espace médiatique vide susceptible d'être occupé par une force capable de mettre leur pouvoir en danger.

La naissance avant terme des chaînes de télévision sans statut clair a répondu à cet esprit car l'ancien chef de l'Etat avait appris qu'une équipe de professionnels algériens connus et reconnus avait été sollicitée pour redresser un média télévisuel de droit français qui périclitait. L'objectif de la reprise était de reconfigurer et de donner une dimension maghrébine et méditerranéenne à la chaîne et il n'était pas dans l'esprit des repreneurs de s'évertuer à chercher des poux dans les têtes.

La lenteur des accommodements financiers et des accommodations personnelles avaient ralenti le projet permettant à Abdelaziz Bouteflika et son armada secrète d'occuper au plus vite le terrain estimant que les chaînes nationales conventionnelles n'avaient pas le mordant suffisant pour porter ses manœuvres politiques.

L'imbroglio qui caractérise aujourd'hui la scène télévisuelle algérienne est au cœur de ce bout de vérité.