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12ème vendredi de la contestation: «Non à une transition à l'égyptienne»

par M.A.

«Makach intekhabat ya El Issabat» «il n'y aura pas d'élections les gangs» est la sentence prononcée par les manifestants, en ce 12ème vendredi de la protestation.

La manifestation d'hier vendredi a montré que le jeûne n'est nullement un facteur qui peut conduire à l'essoufflement du Hirak. Bien au contraire, les Algériens étaient très nombreux à investir les espaces publics, et ce, à travers les grandes villes du pays, pour «déloger le système en place».

A Alger, les manifestants ont commencé à se rassembler vers les coups de 9h du matin, au niveau de la Grande Poste d'Alger et celle du 1er Mai. Une minute de silence a été observée à la mémoire des martyrs des massacres du 8 mai 1945.

La détermination des manifestants est restée intacte après plus de deux mois de protestation (depuis le 22 février). Des femmes avec leurs enfants, des jeunes et des personnes âgées ont occupé la rue pour dire «Non à l'élection du 04 juillet prochain» et «Oui pour le départ de tous les symboles du système corrompu en place».

Des manifestants ont appelé au départ de Bensalah et Bedoui, et même le vice-ministre de la Défense, Gaid Salah n'a pas échappé aux appels l'invitant à quitter son poste, en ce 12ème vendredi. Une suite logique qui répond en fait, à ses appels insistants pour la tenue de l'élection présidentielle dans «les délais» et le maintien de Abdelkader Bensalah chef d'Etat par intérim et le gouvernement Bedoui. A cela s'ajoute la vague d'arrestations et de détentions opérée par l'institution militaire, à l'encontre de personnes civiles, sans précisions ou éclaircissement.

Les manifestants ont scandé «Gaid Salah dégage» au moment où les policiers ont tenté d'arracher une banderole hostile à Gaïd Salah à la Grande Poste d'Alger. D'autres manifestants étaient eux plus «cléments» vis-à-vis du vice-ministre de la Défense en scandant «Gaid Salah on vous a fait confiance, si vous trahissez la confiance du peuple, vous allez connaître le même sort que Bouteflika» ou «Gaid Salah vous êtes contre la volonté du peuple».

D'autres protestataires on brandi une grande pancarte sur laquelle était écrit «l'application et le maintien de l'article 102 n'est qu'une tentative de clonage du système mafieux en place», «Où sont les articles 7 et 8 de la Constitution, votre propagande et vos scénarios pour une élection bidon, sponsorisée par des délinquants, ne nous intéresse pas».

Sur une autre pancarte on pouvait lire «56 ans de régime militaire dont 25 ans de corruption, de prédation et d'usurpation à tous les niveaux, BARAKAT, nous rêvons d'un Etat de droit, de dignité et de citoyenneté dans une nouvelle république libre et démocratique». D'autres préviennent à travers leurs banderoles «Etat civil et non militaire» ou «Non à une transition à l'égyptienne».

A Constantine, pour ce 12ème vendredi consécutif, des manifestations contre le système politique, coïncidant au premier vendredi du ramadhan, les citoyens étaient au rendez-vous, et par milliers. Bien sûr, leur nombre a relativement diminué, mais les manifestants se comptaient par milliers, comme toujours. Comme toujours, donc, les cris ont fusé dans la foule pour dénoncer «le gouvernement de bricolage». «Ni Bensalah ni Bedoui», «non au gouvernement de bricolage», scandaient les manifestants dans cet après-midi assez chaud. C'est aux environs de 14h30mn que le centre-ville de Constantine a été investi par les manifestants, venus de tous les quartiers, enveloppés dans l'emblème national ou le laissant flotter au vent. Organisés dans des carrés, les manifestants reprenaient en chœur les slogans chers au mouvement populaire, en l'occurrence «système dégage». Sur une large banderole, on pouvait lire une revendication qui exige la dissolution des partis politiques de l'ex-alliance présidentielle, en l'occurrence le FLN, RND, TAJ et MPA, ou encore des photos de Bensalah et Bedoui, avec des croix rouge qui barraient leurs portraits.

Le message est clair, «dégagez tous autant que vous êtes», certains s'attaquent à l'armée. «Non au pouvoir militaire», scandaient des manifestants, et reprenaient en chœur «Gaid salah, nous voulons des faits pas des paroles», «itihad wa silmia nabni dawla qaouiya» (uni et pacifique on construit un pays solide). D'autres insistaient dans leur slogan sur «l'unité nationale», sur «la liberté» et «la démocratie». On ne manquera pas également de dénoncer à gorges déployées les voleurs qui ont dépouillé le pays (klitou labled ya sarakine). Les milliers de manifestants qui, comme à l'habitude, ont afflué de tous les quartiers vers le centre-ville pour participer à cette 12e marche, maintiennent la pression pour changer radicalement le système politique, y compris durant le ramadhan, période durant laquelle on croyait qu'il y aurait un relâchement dans les manifestations à cause de la fatigue et de la soif. «Le peuple ne se fatiguera pas de dire : dégagez tous», pouvait-on lire sur une large banderole.