Après cette victoire à l'arraché
de l'équipe d'Algérie, une réflexion du célèbre entraîneur Hélénio
Herrera nous est revenue à l'esprit. S'adressant à ses joueurs de l'Inter
Milan, deux fois champions d'Europe, il leur a dit texto : « Les enfants, je
veux que vous sachiez une chose : on est toujours content d'une équipe qui
gagne ! ». Djamel Belmadi a sans doute eu la même
approche que Herrera, à savoir qu'il a le culte de la gagne, même dans les
matches amicaux ou d'application. Il faut se rappeler que le nul concédé face à
la Gambie lui est resté en travers de la gorge. Certes, il a reconnu que ses
protégés ont livré une prestation plus que convenable, mais il n'a retenu que
l'absence de victoire. Celle de mardi soir face à la Tunisie a dû le
réconforter. Et les raisons ne manquent pas. D'abord, il y avait en face un
mondialiste avec des joueurs athlétiques, très bons techniquement et
tactiquement. Ensuite, il a aligné une équipe avec des joueurs certainement
sous pression à la suite de la belle prestation de leurs coéquipiers, plus
jeunes et bourrés de talent. Même les stars comme Mahrez,
Feghouli, Taïder et Mandi devaient subir cet examen sous les yeux d'un
responsable technique impitoyable sur tous les points. Enfin, et c'est
également un paramètre très important dans ce derby maghrébin, les Tunisiens
tenaient à ne faire aucune concession à leurs collègues algériens et voulaient
prolonger leur série d'invincibilité. Ce match a revêtu deux aspects. En
première mi-temps, les Verts, grâce à un pressing haut, ont harcelé leurs adversaires
souvent regroupés dans leur périmètre, donnant l'impression de vouloir laisser
passer l'orage. Ce qu'il faut retenir de cette période, c'est la volonté des
Verts d'aller vers l'avant grâce à une bonne circulation du ballon. Ensuite, la
rudesse des interventions tunisiennes ont contrarié les Fennecs et n'ont pas
fait réagir l'arbitre. Tour à tour, Bounedjah, Mahrez, Feghouli et Benrahma ont été malmenés sous l'œil impassible de cet
arbitre, une attitude plus que condamnable pour un referee FIFA. Cet engagement
excessif donne raison à l'ancien international Kourichi,
qui a dit : « En Afrique, c'est debza si les nôtres
veulent s'en sortir ». Même s'il partage, en partie, cet aspect du football
africain, Belmadi rêve de voir l'équipe dominer ses
adversaires sur le plan du jeu, ce qui est louable et logique. Lorsqu'il
débriefera la vidéo du match, le sélectionneur national s'apercevra qu'il a
encore du pain sur la planche. Car, il faut reconnaître que lorsque les
Tunisiens se décidaient à appuyer sur l'accélérateur, ses protégés éprouvaient
des difficultés à y faire face. Les échanges de balles des poulains du coach
français Alain Giresse étaient précis et coordonnés,
donnant du fil à retordre à une équipe algérienne qui a sans doute laissé des
forces lors de la première période. Et, lorsque la réussite n'est pas au bout,
c'est frustrant et fatigant. Grâce à leur bonne prestation en seconde période,
les coéquipiers de Msakni ont rendu un fier service à
nos représentants et à leur sélectionneur. Celui-ci, avec l'aide de ses
adjoints qu'il a consultés en plein match, a récolté de précieux enseignements
avec du bon et du moins bon, concernant le replacement des hommes du milieu et
des défenseurs aussi bien en phase défensive qu'offensive. Il a dû relever les lacunes
ainsi que les points forts de ses poulains. Après cette revue obligatoirement
brève, beaucoup de sélectionneurs n'aimeraient pas être à la place de Djamel Belmadi. Il doit mettre tout à plat, analyser les
prestations de tous les joueurs, faire la part des choses et trancher en son
âme et conscience. Sur le plan positif, on relèvera la combativité et la
solidarité du groupe, sans oublier la concentration exigée par Belmadi qui a fait défaut face à la Gambie. Les Verts
avaient en face de très solides adversaires auxquels ils ont livré des duels
sans rechigner. Enfin, ils se sont créé plus d'occasions que les Tunisiens. Sur
le plan négatif, on mentionnera l'absence de réalisme au niveau de l'attaque.
Si Bounedjah avait fait preuve d'esprit collectif, le
score aurait été plus conséquent. Voulant trop bien faire, le n° 9 de l'EN a
fait preuve d'égoïsme, ce qui ne lui ressemble pas. En outre, à certains
moments, il a trop décroché au lieu de rester en pointe, perdant ainsi son
influence au sein de ce secteur clé. Belmadi a dû
remarquer aussi le retard de réaction de certains joueurs. Aura-t-il
assez de temps pour apporter les correctifs nécessaires ? Son choix sera
forcément cornélien. Va-t-il se fier à l'expérience de quelques cadres ou faire
confiance aux « jeunes loups » du match contre la Gambie ? Il pèsera le pour et
le contre, sachant que l'adversaire tunisien, battu par nos représentants, est
d'un tout autre calibre que la Gambie, qui est repartie avec le nul. «
Sélectionner, c'est sanctionner », dit-on dans le milieu du football. C'est le
lot de la concurrence actuelle au sein de l'effectif. Gageons que Belmadi va passer quelques nuits blanches avant d'arrêter
la liste des 23. C'est qu'il n'a pas le droit de se tromper, car il doit tenir
compte de nombreux paramètres à la veille de cet important rendez-vous
continental. En tout cas, à voir l'envie et l'ardeur des joueurs, on peut dire
qu'il est en train de jeter les bases d'une future bonne équipe. Il faut
reconnaître que beaucoup d'entraîneurs auraient refusé de s'atteler à cette
lourde mission de reconstruction. C'est là l'un des grands mérites de Djamel Belmadi.