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L'Algérie qu'on aime !

par M'hammedi Bouzina Med

Le voilà, ce peuple oublié que l'on croyait soumis, de retour chez lui, dans les rues qui portent les noms de ses martyrs.

Le voici, ce peuple qu'on n'attendait plus, le voici de retour chez lui, dans la rue frappant le sol au son des you-yous, la poitrine nue face au vent précurseur du printemps, dans ses mains un bouquet de fleurs cueillies des vastes plaines et vallées de chez lui : Algérie ! Ton absence a pesé longtemps dans nos cœurs meurtris et nos mémoires blessées. Te revoilà ! Bienvenue chez toi. Mille baisers frères, sœurs, nous n'irons plus ailleurs que chez nous. Du nord au sud et d'est en ouest, les portes sont grand ouvertes pour nos retrouvailles. Célébrons-les comme il se doit, dans l'allégresse, sans rancune et sans colère pour les envieux, aigris, fripons et malandrins. Algérie, ta patience a été assimilée à de l'abandon, à de la reddition alors que tu n'es, comme ton histoire, que générosité, bienveillance et accueil. Comment on-ils cru, eux, ces voleurs de rêves, que tu sois aussi lâche que leur forfaiture et leur indignité ? Dieu ! Que ta patience a été immense, admirable malgré toutes les meurtrissures et les offenses subies. Te voilà de retour à l'annonce du printemps, de «Ton Printemps» à toi. Seule comme toujours face aux vents de ton Histoire. Comme hier tu a vécu dans la solitude et les larmes un si long hiver sans abdiquer, sans abandonner, tu reviens de nouveau, seule à la vie. Comment après ces épreuves du lointain passé et du passé simple d'hier que tu as su surmonter seule, sans jamais abdiquer, ont-ils cru que tu sois à terre pour toujours, prête à toutes les compromissions, peureuse face aux épreuves de la vie et de celles de tes usurpateurs ? N'ont-ils rien retenu de ta fabuleuse épopée jalonnée de batailles, de sacrifices pour garder ta «Maison», ton Algérie à toi, pour te croire aussi abjecte, désossée ? traîtres que leur foi et leurs desseins ! Te voilà de retour pour dénuder leurs mensonges, leur foi diabolique et leurs promesses emportées par le vent. Désormais il va falloir faire avec tous tes enfants, leur incommensurable besoin de justice, d'égalité et de liberté. Plus jamais d'injures, de mépris, d'arrogance, de violence, plus jamais. Que cela soit dit et inscrit sur les noms de tes rues qui portent ta mémoire. Ces rues qui s'ouvrent une à une sous tes pas aujourd'hui, qui résonnent de ton cri et celui de nos martyrs. Ces rues, cheminant dans tes veines, irrigant ton sang, libérant ton souffle du poids de tant de patience, de magnanimité et d'indulgence envers tes ignominieux tuteurs, autoproclamés tuteurs à vie. Que c'était beau ces retrouvailles tant désirées ! La lumière éclaire nos rues et mettra à nu les chacals tapis comme toujours dans l'ombre, guettant la moindre faille, le moindre faux geste, l'ombre d'un doute, l'imperceptible mouvement de répit.

La vigilance est de mise: gare aux escrocs de la dernière heure, aux faux prophètes et aux appels de sirènes qui calculent dans l'arrière-boutique de leurs antres diaboliques. Nous n'avons pas oublié ceux dont le «Printemps» devint un hiver sans fin et qui penchaient, en ces temps-là, leur regard condescendant sur notre patience comprise comme une soumission. Ont-ils oublié que notre de printemps nous l'avons vécu bien avant le leur, en plein automne de l'an 88? Qu'importe leurs jugements et leurs incartades, ils ne «savaient pas» et ils sont pardonnés. Cela est aussi une de tes qualités: le pardon et la mansuétude aux acrimonieux, aux calomniateurs, aux ignorants. Te revoilà de retour chez toi et c'est le plus important. Il va falloir reconstruire la maison Algérie, lui rendre ses couleurs joyeuses d'antan, panser ses blessures, la délivrer des forbans et carnassiers insatiables.

Toutes nos rues mènent chez nous et nous sommes libres de les prendre à toutes les saisons sans peur et sans se perdre. Droit devant, les fleurs dans nos mains, la voix claire et sûre pour reconquérir le droit à la Maison Algérie, le droit au paradis. Pour ne plus être triste et pleurer. «Irons-nous tous au paradis ? «Demain, bientôt, mais chez nous. Bienvenue.