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La symbolique plus forte que le syndicat

par Mohamed Salah

Les dernières tensions au niveau du clergé sont sur le point d'être apaisées. C'est du moins ce qui apparaît des premières lectures des communiqués croisés entre les deux parties en conflit : le syndicat des imams et leur tutelle, le ministère des Affaires religieuses et des Wakfs.

Alors que la position de Mohamed Aïssa avait tout d'un dogme concernant les revendications salariales des imams et que le syndicat, de son côté, campait dans ses tranchées, demandant l'ouverture d'un dialogue sans plafond exigé, les choses semblent rentrer dans l'ordre. En cause : la menace du syndicat d'exporter le conflit dans la rue à «une date qui sera annoncée ultérieurement», suffisant pour que le gouvernement décrypte et comprenne la portée du message.

Si dans un premier temps, le ministre avait répondu en menaçant de recourir à la force de répression légitime, réflexe pavlovien des représentants du gouvernement devenu à force une norme dans la gestion des conflits sociaux, la crainte de l'après-confrontation a amené Mohamed Aïssa à adopter un ton plus conciliant. En effet, même si ce n'est pas une première dans le paysage contestataire national de sortir dans la rue, les pouvoirs publics sont confrontés, cette fois, aux représentants religieux d'un islam à l'algérienne longtemps présenté comme exemple d'une digue contre la radicalisation.

La symbolique est toute forte et les conséquences d'un mouvement, qui se durcit et qui dure dans le temps, sont à craindre sur la pérennité du dialogue socio-politique actuel.

Pourtant, s'il est difficile de croire que le ministère va fléchir directement sur la question des salaires, il est à parier que d'importantes concessions indirectes, à même de revaloriser les fiches de paie, ne manqueront pas d'être faites. Les enjeux de l'heure imposent la présence d'un vecteur de transmission de la politique générale du pays à propos des sujets d'actualité, à l'image de la violence, ou de la harga, entre autres dossiers sensibles. Des messages relayés par la mosquée qui est sortie, depuis longtemps, de son rôle purement théologique pour être au service de son employeur.

L'Etat, dans sa logique populiste, ne peut se permettre d'avoir sur le dos des imams fonctionnaires qui se sont déjà positionnés pour un cinquième mandat. Les risques de dérapage sont grands pour ouvrir la porte à une contestation aussi profane soit-elle dans un milieu religieux qui risque de prendre ombrage du peu d'intérêt qu'on lui accorde. La riposte peut entraîner des cas de figure que le gouvernement ne veut même pas imaginer, lui qui a été intransigeant lors des conflits sociaux qui ont émaillé presque tous les secteurs d'activité.