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Tribunal criminel d'Oran: 20 ans de prison pour trafic de 425 kg de kif

par M. Nadir

Le Tribunal criminel de 1re Instance d'Oran a prononcé, hier, 4 condamnations à 20 ans de réclusion contre les membres d'un réseau de trafic de drogue opérant entre les wilayas de Tlemcen et Biskra. Un 5ème accusé, une femme poursuivie de complicité, a été acquittée.

L'affaire remonte à août 2016 quand, alertés sur les activités d'une bande spécialisée dans le trafic de drogue, entre Tlemcen et Oran, dirigée par un certain Ben Mounir, les services de la gendarmerie nationale ont interpellé un couple se trouvant à bord d'un camion frigorifique, dans une station-services de Sidi Benadda, wilaya d'Aïn Témouchent. La fouille du véhicule de maque Kia a permis la découverte de 425 kg de kif qui devaient, selon les enquêteurs, prendre la route vers la wilaya de Biskra.

Interrogé, le chauffeur répondant au nom de B. Mohamed, 35 ans, qui circulait avec un faux permis, a déclaré ignorer l'existence de la marchandise prohibée, étant sûr de transporter du mobilier pour le compte d'un ami dénommé Ben. Mounir. De son côté, la passagère, Bo. Souhila, coiffeuse de 36 ans, a affirmé qu'elle devait se rendre chez un dermatologue résidant à Oran.

Les investigations permettront de déterminer que le camion appartenait à Bel. Mekhissi, homme de 51 ans, résidant dans la localité de Sidi Benyebka, wilaya d'Oran. Interpellé à Remchi où il se trouvait avec un voisin de quartier, du nom d'A. Cheikh, Mekhissi reconnaîtra que le camion frigorifique est à son nom, qu'il lui avait été «donné» par Ben. Mounir avec lequel il devait faire commerce de fruits de mer et qu'il ne savait pas qu'il était question de trafic de drogue. A. Cheikh tiendra les mêmes propos, affirmant qu'il était allé à Remchi à la demande de son voisin Mekhissi qui devrait récupérer un véhicule en réparation chez un tôlier.

Par ailleurs, les enquêteurs parviendront à déterminer que les 425 kg saisis faisaient partie d'une quantité globale de 6 q importés du Maroc et mettront la main sur les 175 kg restants à Nedroma, dans un garage appartenant à l'oncle de B. Mohamed.

Après instruction du dossier, les hommes seront inculpés et mis en détention pour importation de produits stupéfiants tandis que la femme, poursuivie pour association, sera laissée en liberté.

A la barre, tous les mis en cause nieront les faits qui leur sont reprochés à l'exception de Ben. Mounir qui reconnaîtra les faits en admettant avoir joué le rôle d'intermédiaire entre un narcotrafiquant marocain se prénommant El Hadj et B. Mohamed, le chauffeur pris en flagrant délit : «J'ai été doublé. J'ai donné à Mohamed le numéro de téléphone d'El Hadj qui lui a envoyé 600 kg de kif. Je n'étais pas au courant que le camion frigorifique contenait de la drogue mais Mohamed le savait», dira-t-il en substance en signalant ne pas avoir alerté les autorités.

Dans son réquisitoire, la représentante du ministère public s'appuiera sur le flagrant délit et les aveux de Ben. Mounir pour conclure à l'existence d'un lien entre El Hadj le Marocain et B. Mohamed et la réalité d'un réseau de trafic de drogue. Elle requerra la prison à perpétuité pour l'ensemble des accusés. Ce qui suscitera l'ire des avocats de la défense qui dénonceront des réquisitions disproportionnées et l'absence de preuves matérielles soutenant l'accusation d'importation qui, rappelleront-ils, sous-entend une pénétration sur le territoire marocain.

Ce que le ministère public n'a pas démontré, diront ces avocats dont certains s'en sont, également, pris aux services de lutte contre le trafic de drogue qui n'inquiètent pas les véritables narcotrafiquants et se contentent de petites mains, souvent victimes de conditions sociales que les gros barons, en question, n'hésitent pas à exploiter pour faire prospérer leur funeste commerce : «Le fait que des barons marocains, comme El Hadj, entre à Maghnia sans être inquiété (ce que le président d'audience avait déploré, lors des débats, Ndr) démontre bien l'inefficacité de nos services de lutte», tranchera l'un des avocats. Hormis les avocats de B. Mohamed et Ben. Mounir qui plaideront les circonstances atténuantes, les défenseurs des autres accusés demanderont l'acquittement, pour absence de preuves accablantes contre leurs clients.

Après délibérations, le Tribunal condamnera B. Mohamed, Ben. Mounir, Bel. Mekhissi et A. Cheikh à 20 ans de réclusion et acquittera Bo. Souhila.