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Banalisation de la violence: Le dur constat de l'absence de prise en charge

par Yazid Alilat

La violence a été tellement banalisée qu'elle est devenue quotidienne, en Algérie, ce qui pose de sérieuses questions quant à sa prise en charge, a souligné, hier mercredi, le Pr Mustapha Khiati, président de la FOREM.

Il a expliqué à la Radio nationale qu' «il y a banalisation de la violence, on le constate dans la rue, dans la famille, dans les stades et les images de violences sont présentes, malheureusement, au quotidien». «Il faut comprendre le phénomène lui-même, la violence est multi-factorielle, elle n'a pas une seule cause», estime le Pr Khiati, selon lequel «il y a des causes historiques liées au colonialisme avec transmission transgénérationnelle, celle du vécu qui se transmet depuis l'indépendance.» Expliquant les raisons de cette violence, il estime qu' «il y a une superposition de plusieurs facteurs pour que la violence prenne un visage aussi hideux, dur. La décennie noire a joué un rôle important, avec la dislocation des familles, les meurtres au quotidien, ce n'est pas facile, et il y a l'exode rural qui joue un rôle, et cela influe sur les enfants.» Et, «ce sont les jeunes d'aujourd'hui qui charrient, malheureusement, beaucoup d'actes de violences inconsciemment».

Selon le Pr. Khiati, «le trauma de l'enfant est un concept nouveau, depuis les années 1980, et la survenue de ces images a pris les responsables de l'époque de court et on n'a pas su riposter à ce phénomène, et donc seule la sécurité était prioritaire, les autres aspects étaient secondaires, et on a évacué la violence des enfants.» Il y a, également, la violence urbaine, provoquée, selon le président de la FOREM, par l'absence d'infrastructures sociales dans les nouvelles cités d'habitation. «Il y a des problèmes réels dans les nouvelles cités, car il n'y a pas d'infrastructures sociales pour les gens qui habitent ces lieux. «Aujourd'hui, on construit des cités alors qu'il n'y a pas d'infrastructures sociales, et on se demande quel est le vécu des enfants de ces cités», s'est-il interrogé. Quant à la violence dans les stades de football, il a relevé que «je pense que la FAF a arrêté des mesures de lutte restées consignées dans les feuilles, et donc il faut passer à la pratique et suivre ces mesures.» Le Pr. Khiati, relève, en fait, qu' «il y a des lois, mais ce qui manque à ces lois, c'est l'application, et alorsil faut penser à mettre en place un mécanisme de suivi de ces lois.» Entre 1991 et 1999, il y a eu, a-t-il indiqué, près de 16.000 enfants en moyenne, qui ont été présentés devant un juge des enfants pour des délits jugés graves», car, estime t-il, «les enfants sont facilement influençables et peuvent s'adonner à une violence inouïe, d'autant que l'Internet a amplifié ce phénomène, et qu'il faut prendre en charge au niveau global.» «Il y a une réflexion dans ce domaine, a-t-il dit, car les enfants sont le maillon faible de la société et très influençables», ajoutant que «cette violence n'a jamais été prise en charge de façon rationnelle et étudiée. Il s'agit dorénavant, de mettre en place, peut-être, des groupes de travail composés de sociologues, de psychologues et d'éducateurs». Certes, a-t-il admis, il existe un dispositif de protection de l'enfance, avec la loi de 2015, dont un téléphone vert (11/11) mis en service qui permet de relever tous les problèmes dont celui de la maltraitance.

Le président de la FOREM a, ainsi, relevé qu' «il y a eu environ 10.000 cas de violence sur des enfants, dont 2.000 cas d'agression sexuelle». «On pense que ces chiffres sont beaucoup plus élevés, à 50.000 dans le cas de la maltraitance des enfants, soumis à des actes sévères et il faut que cela soit dénoncé.» Signe positif, «aujourd'hui l'infrastructure de prise en charge existe, et donc il faut saisir la délégation à l'enfance, car elle regroupe des partenaires de la société civile».

Pour le cas des mères célibataires, «on peut identifier le père biologique et donner un nom à l'enfant, et donc on peut les intégrer socialement», affirme t-il, par ailleurs, avant de souligner que «le Conseil supérieur islamique peut réfléchir sur cela et proposer des décisions qui peuvent devenir des règlements pour les enfants nés sous X.»

D'autre part, il a indiqué qu'environ 1 million d'enfants ont été victimes de traumatismes liés à la violence du terrorisme et seulement 5% ont pu bénéficier d'une prise en charge adéquate. «Mais, pour le ministère de la Solidarité nationale dans les années 90, il n'y a pas eu de traumatisme, ce qui explique le retard dans la prise en charge de ces enfants», indique, encore, le Pr. Khiati, selon lequel, il y a eu une prise en charge des enfants, nés dans le maquis, par l'ANP, dans les milieux sanitaires et sociétaux. «La prise en charge a été menée sans poser de problème, car leur nombre n'était pas excessif», a-t-il ajouté.