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Constantine - Des centaines de tracteurs invendus: Menace sur l'avenir de plus d'un millier de travailleurs

par A.Mallem

«Un stock de 3.200 tracteurs invendus et exposés depuis bientôt trois années à la rouille et aux intempéries se trouve au niveau des parcs de notre entreprise et de l'entreprise PMAT, notre partenaire chargé de la commercialisation de notre produit et du produit agricole en général, dont les points de vente se trouvent éparpillés au niveau du territoire national», nous ont déclaré jeudi dernier des cadres et des syndicalistes de l'entreprise nationale de fabrication des tracteurs agricoles (ETRAG) de Oued Hamimime, dans la commun d'El-Khroub. Une entreprise qui comprend un effectif de 1.020 travailleurs. Nous avons cherché confirmation auprès des cadres dirigeants d'ETRAG, mais nous n'avons réussi qu'à prendre contact avec le secrétaire général du syndicat d'entreprise M. Ababsa Ahmed, les autres dirigeants étant en congé de détente.

Notre interlocuteur a confirmé l'information donnée en nous livrant toutes les données qui sont à la base de la situation catastrophique que traverse cette entreprise en ce moment, situation résultant d'une mévente totale de ses produits. «Parce que nous avons un seul client, un client exclusif, le fellah, a commencé M. Ababsa. Notre production est livrée entièrement à l'entreprise PMAT qui se charge de la commercialisation de tous les produits du machinisme agricole au niveau du territoire national, aussi bien des moissonneuses-batteuses de l'usine de Sidi Bel-Abbès que des bennes et des citernes fabriquées dans l'usine de Rouiba». «Or, a-t-il poursuivi, depuis que le gouvernement a décidé de réduire le soutien financier accordé au fellah pour lui permettre notamment d'acquérir notre matériel (un tracteur coûte dans les 310 millions de centimes), le faisant descendre de 30 à 10% seulement, depuis deux ans, les ventes des tracteurs ont enregistré une chute vertigineuse», explique notre interlocuteur.

La réduction du soutien financier «dissuade maintenant le fellah à acquérir nos tracteurs, estimant que le produit est trop cher pour lui. C'est pour cette seule raison que notre production n'est pas écoulée sur le marché». «Par conséquent, notre ligne de montage des tracteurs se trouve actuellement à l'arrêt», affirme encore notre interlocuteur. «Et malgré le fait que le soutien de l'Etat soit rétabli à son niveau initial (30 %), depuis quelques mois, les stocks n'ont fait que s'accumuler depuis 2016». Tout en déplorant cette situation, M. Ababsa a signalé que le matériel en stock ne cesse de se dégrader sous l'action du climat (pluie, soleil) et les engins nécessitent de profondes retouches pour les remettre à l'état neuf et pouvoir l'écouler. «Et cela va coûter cher à l'entreprise». Interrogé, ce syndicaliste a confirmé que l'arrêt touche également la chaîne de montage des tracteurs américains de la marque Massey Ferguson qu 'ETRAG monte sous licence de ce partenaire américain avec un taux d'intégration de 35% environ. Quant au tracteur ETRAG, il est fabriqué localement de A à Z, «de la fonderie jusqu'à la chaîne de montage en passant par la forge et la soudure», a déclaré le secrétaire général du syndicat d'entreprise.

«Cette situation n'a pas de répercussion sur les salaires des travailleurs pour le moment, mais l'entreprise commence à rencontrer des difficultés dans ce domaine à cause des sérieux problèmes de trésorerie qu'elle éprouve», a déclaré encore M. Ababsa. Le responsable du syndicat d'entreprise d'ETRAG a souhaité vivement que le gouvernement vienne à la rescousse de l'entreprise pour lui éviter une éventuelle fermeture, et ce par une action qui pourrait revêtir la forme d'un achat en masse des tracteurs en stock par le ministère de l'Intérieur, des Collectivités locales et de l'Aménagement du territoire au profit des communes. «C'est une action qui aurait le don de nous procurer une bouffée d'oxygène. Cela s'est produit déjà une fois par le passé», a-t-il dit. Ensuite, ce dernier a révélé qu'à l'avenir, l'ETRAG compte changer de stratégie pour sortir de cette situation de «client exclusif» et se lancer dans la sous-traitance au niveau du territoire national. «Et nous avons les moyens de faire cela dans le domaine de la maintenance avec n'importe quelle entreprise ou société», a conclu ce représentant d'ETRAG.