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Yasmina Khadra présente son dernier roman «Khalil»: Une plongée dans les vertiges d'un «kamikaze»

par Houari Barti

  Yasmina Khadra était ce samedi à Oran à l'hôtel Liberté pour la promotion de son dernier roman, «Khalil», paru en août dernier aux éditions Kasbah. Deux années d'absence depuis sa dernière escale à Oran où il était venu pour la sortie de son précédent ouvrage «Dieu n'habite pas à La Havane», et voilà que l'auteur récidive avec, cette fois-ci, une thématique qu'il connaît très bien, le terrorisme. «Khalil c'est un roman nécessaire. Je voulais revenir sur les attentats du vendredi 13 novembre 2015 en France, pour repartir à la conquête de notre part d'humanité que nous sommes en train de perdre aujourd'hui, à cause de la diabolisation forcenée, à cause des réseaux sociaux un peu outranciers, à cause de la méconnaissance de ce sujet. J'espère avoir la légitimité et le courage de m'adresser à un large public pour essayer simplement d'apaiser les esprits, » dira l'auteur devant un public venu, comme à l'accoutumée, très nombreux à sa rencontre. Dans Khalil, Yasmina Khadra apporte un regard inédit en se plaçant dans la tête du kamikaze. Une histoire racontée à la première personne par la voix même de celui qui va commettre l'irréparable, Khalil. «C'est d'abord une plongée dans les vertiges d'un jeune homme qui a renoncé à ses rêves, et qui, par voie de conséquence, décide de s'attaquer aux rêves des autres,» explique l'auteur. A la lecture des premières pages du roman, on est d'abord distant par rapport à ce personnage qui se prépare à exécuter la pire des atrocités. Mais au fur et à mesure que le récit se déploie, on commence graduellement à s'attacher au personnage, à travers ses doutes, ses questionnements existentiels et ses interrogations sur sa foi, à lui donner visage humain, sans pour autant partager son point de vue. Un roman qui pousse vers la réflexion, en donnant du sens à des choses pas toujours faciles à cerner quand le regard est exclusif ou vindicatif. Une lecture dont on n'en sort pas indemne surtout si on évolue dans une société où le terrorisme est utilisé comme prétexte à la promotion de la haine de l'autre, au racisme et à la xénophobie. Khalil n'est, toutefois, «pas un roman polémique» répond l'auteur à une question de l'assistance. «Dans tous mes ouvrages, je n'ai jamais été polémique. J'essaye toujours d'écrire avec sincérité sur ce que je crois savoir, » précise-t-il. A travers le personnage de Khalil, ses incertitudes qu'il prend pour des vérités absolues, son égarement terrible, je propose, explique-t-il, «à un jeune lectorat d'avoir une longueur d'avance sur le discours insidieux des intégristes. Je suis persuadé que quelqu'un qui va lire ce livre, ne pourra jamais se laisser emporter par cette crue terroriste, absolument dévastatrice et repoussante.» Dans ce nouveau roman, Yasmina Khadra nous livre ainsi une approche inédite du terrorisme, d'un réalisme et d'une justesse époustouflants, une plongée vertigineuse dans l'esprit d'un kamikaze qu'il suit à la trace, jusque dans ses derniers retranchements, pour nous éveiller à notre époque suspendue entre la fragile lucidité de la conscience et l'insoutenable brutalité de la folie.