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Reggane: 58 ans après les essais nucléaires français, la situation toujours critique

par Bentouba Saïd

Aujourd'hui, 13 février, 58 ans se sont écoulés depuis les explosions nucléaires françaises au Sahara algérien et la situation est toujours critique, du fait des déchets nucléaires au niveau du site de Hamoudia, à quelques kilomètres de Reggane et Adrar.

Le cancer tue d'une manière inquiétante selon les services de la santé de la willaya d'Adrar. Selon des physiciens, le taux de radiation nucléaire à Reggane et Adrar est dix fois supérieur au taux admissible pour les êtres humains, la radiation est toujours supérieure aux normes de l'Agence internationale de l'énergie atomique et le Sahara est contaminé sur un rayon de 700 kilomètres. Aucune étude n'a été faite par l'Etat algérien depuis 1960 et aucune démarche n'a été entreprise pour ouvrir ce dossier qui peut provoquer la désertion de toute la région, vu l'inquiétude sur la radiation nucléaire excessive. Le nouveau dans le dossier est une carte de l'armée française de 1960, déclassifiée en 2013, qui montre que les retombées radioactives du premier essai nucléaire français dans le Sahara algérien ont été beaucoup plus importantes que celles admises à l'époque, s'étendant à toute l'Afrique de l'ouest et au sud de l'Europe, selon un document qui a été publié vendredi 14 février 2014 par le journal « Le Parisien ». Cette carte montre que, jusqu'au treizième jour suivant l'explosion aérienne, le 13 février 1960, de Gerboise Bleue, la première bombe française, les retombées radioactives se sont étendues à toute l'Afrique de l'Ouest, au sud-est jusqu'à la Centrafrique, ainsi qu'au nord, sur la côte espagnole et la Sicile. « Les militaires reconnaissent qu'à certains endroits les normes de sécurité ont été largement dépassées à Arak, près de Tamanrasset, où l'eau a été fortement contaminée, mais aussi dans la capitale tchadienne de N'Djamena », écrivait Le Parisien. La carte du zonage des retombées montre que certains radioéléments éjectés par les explosions aériennes, tel l'iode 131 ou le césium 137, ont pu être inhalés par les populations malgré leur dilution dans l'atmosphère, personne n'ignore aujourd'hui que ces éléments radioactifs sont à l'origine de cancers ou de maladies cardio-vasculaires et des malformations.

Classée secret-défense par l'armée pendant des décennies, cette carte a été déclassifiée le 4 avril 2013 dans le cadre de l'enquête pénale déclenchée par les vétérans des campagnes d'essais nucléaires français dans le Sahara au début des années 1960, puis en Polynésie dans les années 1970. C'est le 13 février 1960 à 7 h 04, sous le nom de code militaire « Gerboise bleue», qu'a eu lieu, à Reggane, le premier essai nucléaire français. Le tir est aérien et sa puissance est quatre fois supérieure à la bombe d'Hiroshima. Des anciens militaires de carrière français et des membres de la main-d'œuvre algérienne mis à contribution pour réaliser ce sinistre projet, témoignaient que les conséquences continuaient à ce jour d'affecter lourdement la santé de nombreuses familles qui vivent toujours dans un environnement radioactif.

La France a mis sous le sceau du secret toutes les archives relatives à la période des essais nucléaires, datant de 1960 à 1966, y compris les rapports médicaux sur la situation sanitaire à Reggane soulignant que par une loi de juillet 2008, la France a décidé de classer secret-défense pour l'éternité toutes les archives des essais nucléaires français en Algérie.

A Adrar, la seule action menée était l'initiative prise par l'ex-député Guerrot Mohamed en 2003, qui a pu collecter la signature de 46 députés à l'époque, où il a interrogé le gouvernement algérien sur les mesures prises par l'Etat pour protéger la population et faire pression sur le gouvernement français pour qu'il reconnaisse ces crimes contre la population au sud algérien.