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Filiation

par Moncef Wafi

La déclaration d'Ouyahia, le SG du RND, sur le fait que «Bouteflika appartient à tous les Algériens» est en somme un désaveu de cette politique pure et dure des partis dits de la majorité qui n'ont d'autres raisons d'exister que de soutenir le programme présidentiel. Une vérité qu'ils brandissent à chaque occasion, rappelant sans cesse leur loyauté à l'actuel locataire d'El Mouradia. Le FLN et le RND en tête, le Taj ou le MPA en suiveurs, ces sigles politiques ont de tout temps revendiqué la filiation de Bouteflika allant jusqu'à s'inscrire en parfaits vassaux de la présidence.

Le comble est à chercher du côté d'Ould Abbès pour qui la figure présidentielle est une exclusivité partisane, lui donnant un quasi-droit messianique sur le reste des autres partis. Ouyahia, qu'on dit en perte de vitesse, lui qui vient d'être rappelé par la présidence sur deux sujets d'actualité en l'espace d'un mois, répond ainsi aux critiques à peine voilées de son adversaire du FLN et n'hésitant pas à porter, à son tour, une charge toute symbolique à l'endroit de l'ex-parti unique. Qu'on le veuille ou non, la scène politique reste rythmée par ces passe d'armes entre les deux formations politiques en perspective de la présidentielle de 2019. Il n'est un secret pour personne que le pays ne vit que pour ce rendez-vous et que tous les appétits sont aiguisés à l'extrême.

Entre un cinquième mandat ou la fin d'un règne, les prétendants se placent et les clans s'affrontent dans un duel qui déborde parfois sur les décisions les plus importantes concernant l'avenir économique de l'Algérie. Ould Abbès l'a compris et a tenté de verrouiller le jeu à travers sa prophétique déclaration sur l'identité du futur président du pays alors qu'Ouyahia préfère, lui, jouer profil bas après avoir essayé d'abattre ses atouts. Ce bicéphalisme imposé, barrant la route à toute alternative républicaine et citoyenne, plonge le pays dans un statu quo suicidaire d'autant plus que l'heure est à la recherche de portes de sortie de crise. Cette course parallèle vers El Mouradia, par procuration ou à titre personnel, induit un blocage à tous les niveaux des décisions prises. Les mises au point qui en résultent condamnent les Algériens à assister, à leur corps défendant, à une lutte sourde pour la succession de Bouteflika. Ce jeu d'échecs, parfois, se résume à des épreuves de force par le truchement des institutions de l'Etat.