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L'onde de choc Trump

par Pierre Morville

Stupeur du reste de la planète : le 45e président des Etats-Unis s'appellera Donald Trump

Contrairement aux prévisions des sociétés de sondage, contrairement à l'avis de la quasi-totalité des médias américains, contrairement à l'opinion d'innombrables experts et spécialistes de la politique américaine qui donnaient jusqu'à hier soir Hillary Clinton gagnante, le très controversé candidat républicain a déjoué tous les pronostics. L'évènement plonge l'Amérique et le monde entier dans une incertitude vertigineuse.

Donald Trump l'emporte sur sa rivale, la démocrate Hillary Clinton, qui espérait devenir la première femme présidente du pays. Celle-ci a d'ailleurs reconnu sa défaite en téléphonant à son rival pour le féliciter. « Je viens de recevoir un appel d'Hillary Clinton, qui nous a félicité pour notre victoire. Je l'ai félicitée pour sa campagne, elle a bien combattu », s'est réjoui Donald Trump, devant une foule de supporters, réunie dans son QG de campagne new-yorkais.

Le nouveau président, connu pour ses propos provocants, populistes et xénophobes, a dans sa première déclaration tenu des propos rassurants et mesurés, appelant à l'unité des Américains. « « Je serai le président de tous les Américains » a-t-il promis.

Reste à connaitre le programme qui sera tenu dans les quatre prochaines années. Lors de cette très longue et violente campagne électorale, Donald Trump a multiplié les propositions des plus radicales, souvent teintées de xénophobie : expulsion de quelque 11 millions d'immigrés clandestins, construction d'un mur hermétique entre les États-Unis et le Mexique, interdiction de l'entrée dans le pays à tous les musulmans, légalisation de la torture dans la lutte contre le terrorisme, proposition de faire assassiner les familles des djihadistes pour les dissuader de commettre des attentats?

Sur le plan de l'environnement, Donald Trump ne croit pas aux risques de la pollution : il propose tout simplement de rompre l'accord de la Cop21 signé à Paris l'an dernier. Pour lui, le gaz de schiste doit continuer à être au maximum exploité et il propose même de rouvrir les mines de charbon.

Inquiétudes des classes populaires

Sur le plan de la politique économique, son programme reste largement imprécis, si ce n'est sa promesse de réduire de moitié l'ensemble des impôts des classes populaires comme ceux des couches les plus privilégiées ! La baisse de la fiscalité bénéficierait également aux entreprises. Donald Trump défend le retour à une politique très protectionniste en taxant fortement toutes les importations et même de sanctionner les entreprises américaines qui délocaliseraient à l'étranger leurs activités. Il souhaite sans trop en préciser le contenu, le lancement de grands projets de construction qui favoriseraient la relance de l'économie. Comment tout cela sera-t-il financé ? Mystère.

Le nouveau président veut également revenir sur l'Obama Care, la très prudente réforme de l'assurance santé tentée par son prédécesseur. Il est également opposé à une université gratuite, alors que des millions d'étudiants rentrent dans la vie active plombés par un lourd endettement du aux emprunts nécessaires qu'ils ont dû contracter pour payer leurs études.

Donald Trump pourra en tous cas profiter du soutien du Congrès américain où les Républicains sont majoritaires tant au Sénat que la Chambre des Représentants. Il a surtout bénéficié du vote de protestation d'un électorat populaire et des classes moyennes. Barack Obama avait réussi à reconstruire l'économie américaine après la crise de 2008/2010 : le PIB des États-Unis s'est accru de 13% pendant ses deux mandats contre un peu moins de 3% sur la zone Euro dans la même période. Le chômage avait fortement baissé de 10% à moins de 5% aujourd'hui. Mais ces améliorations sont allées de pair avec une forte aggravation des inégalités, à une stagnation voir souvent un recul du revenus des classes populaires et des classes moyennes. Et pour ces catégories, le vote Trump est apparu comme l'expression d'une révolte et la promesse d'un changement, alors que la croissance américaine bénéficiait principalement aux couches les plus fortunées de la société.

Importantes révisions diplomatiques à venir

Au niveau international, la victoire de Trump est vécue dans une certaine stupeur. A l'exception de Vladimir Poutine qui avait quasiment appelé à voter pour lui. Alors que les tensions russo-américaines ne cessent de croître, Donald Trump est vu à Moscou en possible allié. Avec Hillary Clinton, les tensions risquaient au contraire de s'intensifier. Et le même Donald Trump ne dit que du bien de Vladimir Poutine.

La Chine, très grand fournisseur de produits sur le marché américain ne peut que mal réagir à l'idée de Trump de vouloir créer une taxe de 45% sur le prix des importations chinoises. Donald Trump a par ailleurs annoncé son intention de renégocier un a un tous les accords économiques avec les partenaires étrangers, et notamment la Chine, avec laquelle il s'apprêterait à se lancer dans une véritable guerre commerciale. « Ils ont pris nos emplois, ils ont pris notre argent. Ils ont tous pris, a-t-il ainsi lancé en parlant du gouvernement chinois. Ce qu'ils nous ont fait est la plus grande escroquerie de l'Histoire de l'Humanité ».

Donald Trump a également annoncé la remise en cause de l'accord irano-américain, ce qui inquiète beaucoup Téhéran. Le nouveau Président, au grand dam de ces alliés, a également prévu le retour aux États-Unis des troupes américaines réparties dans le monde.

En Europe, l'ensemble des gouvernements était persuadé qu'Hillary Clinton serait la 1ère femme présidente des USA. Les premières réactions font la preuve d'un désarroi devant le succès de ce candidat jugé populiste et volontiers démagogue. En France, seule Marine Le Pen s'est rapidement félicité de l'élection de Trump. Après le choc du Brexit qui a vu le départ du Royaume-Uni de l'Union européenne, les Européens se voient obligés de revoir leurs relations avec les USA. Bruxelles a proposé la tenue rapide d'un sommet Europe/Etats-Unis.