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Une tombe anonyme pour la Ligue

par Moncef Wafi

Il ne fait aucun doute dans l'esprit de la nation arabe, si elle existe toujours, que la Ligue arabe fait partie de l'histoire, de ses dates et de son décor. Le sommet de Nouakchott n'a fait qu'entériner une longue agonie et ce que nomment les sciences sociales un asservissement au maître du moment. Obsolète, vidée de toute sa substance, trahissant tous les principes, si jamais elle en a eu, la Ligue arabe est ce cadavre lourd enchaîné à la cheville du monde arabe. Un poids mort qui les attire vers les profondeurs, entravant toute velléité de lui échapper.

La Ligue arabe est devenue, à force des compromis mais surtout des complots institutionnalisés, un cercueil qui emprisonne des pays encore vivants. Si en termes politiques son existence est jalonnée de trahison surtout à la lumière du conflit palestinien, pour Ahmed Mahiou, spécialiste du monde arabe, la Ligue arabe n'a pas progressé et peine à passer de la coopération à l'intégration, laissant les pays occidentaux dicter leur choix dans la résolution de ses conflits. S'exprimant dans le cadre d'une conférence-débat organisée par l'Institut national d'études de stratégie globale (INESG) sous le thème: «Le monde arabe à l'épreuve de la mondialisation», l'ancien directeur de l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman (IREMAM) d'Aix-en-Provence mettra le doigt sur le mal de cette assemblée dont le principal échec «est son incapacité à résoudre les conflits internes, notamment la question palestinienne».

Sans défoncer des portes ouvertes, Ahmed Mahiou dressera un constat accablant de l'impuissance arabe, minée par les dissensions régionales, d'intervenir dans les conflits internes. La non résolution de la question palestinienne restera comme le point noir d'une organisation plus prompte à condamner un des siens qu'à lui porter secours s'il n'est pas dans les bons papiers de l'Arabie saoudite ou de l'Egypte. Que fait encore l'Algérie dans cette ligue, parmi ses membres qui lui vouent une inimitié tenace ? La question mérite au moins d'être posée parce que les Algériens veulent savoir ce qu'on a à gagner réellement de cette structure vide où le seul écho est celui des ordres reçus. La réponse ne peut être que diplomatique et on conçoit mal que le pays se désengage officiellement, lui qui est déjà affublé de l'étiquette d'empêcheur de tourner en rond. Faut-il alors créer un front des pays arabes non-alignés. Dans ce cas-là, l'Algérie sera le seul pays à y siéger, ce qui serait déjà mieux que de côtoyer des poignards dissimulés derrière une poignée de main.