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Tenzentemps

par El-Guellil

Le bébé, l'enfant, l'adolescent?, le père, et commence la galère. Il est salarié fi l'usine ou l'administration. Il le demeurera ou disparaîtra, c'est selon les lois. Quel que soit son statut, c'est un contribuable qu'on traira jusqu'à l'assèchement. Il est taxé ou détaxé, c'est selon qu'il paye l'impôt ou les pots, et le résultat est, de toute façon, le même pour ce pauvre bougre de contribuable.

Dès que son enfant est à l'école, il devient parent d'élève. Il évitera de faire partie de l'association des bailleurs de fonds de l'établissement où son fils n'a qu'un seul droit, avaler à fond un programme qui le mènera très loin, un programme que doit gérer le parent d'élève sans rechigner, mais en payant toutes les charges, en espérant qu'à son enfant serve, un jour, cette petite tête « décharge ».

Il est client quand il peut, consommateur de denrées chères imposées par la nécessité de survire, car son salaire lui permet à peine de bouffer et ne pas crever de faim. Avitaminose, manque de sucre, manque de protéines, manque de pot, le consommateur est souvent malade. Il se soigne aux herbes, le locataire des biens de l'Etat, et il n'arrive pas à se payer le statut chez le médecin distributeur d'ordonnances.

Assuré, lui, il l'était. Toute sa vie de travailleur syndiqué, il a été retenu sur son salaire des cotisations que son entreprise ne versait pas à la caisse. Qu'est-ce qu'il n'a pas vu dans sa vie, le malheureux coyote ! Que de qualificatifs n'a-t-il pas été affublé ! Il est tour à tour usager d'un transport qui sied au bétail, abonné à un téléphone souvent en hors champ, piéton sur des trottoirs squattés par les marchands, lecteur, auditeur, spectateur impuissant, confiné au rang de «ikhouani ou akhaouati» dans le discours officiel, mielleux, qui le courtise, lui, le votant qu'on voudrait électeur lucide pour un temps, lui qu'on met aux oubliettes jusqu'aux prochaines urnes, lui qui peut devenir notable ou jetable, c'est selon le ventre qui l'a porté.