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INTEMPERIES DES QUATRE SAISONS

par M. Abdou BENABBOU

Quand l'armée est appelée à prendre en charge la gestion du problème du M'zab, il devient certain que le sujet n'était pas un passager épiphénomène et qu'à bien observer on se rend compte que le «printemps» algérien est bien là. Il est présent comme partout ailleurs avec ses différents angles et facettes avec toujours l'essoufflement criard d'une communauté humaine incapable de se prendre en charge. Sauf qu'à Ghardaïa il y a eu une coulée de sang gratuite et qu'avec ou sans l'armée le dossier de cette région, hier encore symbole de paix et de presque effacement, n'est pas clos et ne le sera pas de sitôt.

Le chef du gouvernement s'y est rendu pour la sempiternelle fois cette semaine pour tenter d'enterrer des haines qui se croisent avec fracas et que ne sont pas parvenus à éteindre des courtes randonnées et le stérile papillonnage de personnalités officielles qui n'avaient pas grand-chose à offrir à une population qui avait tellement de réclamations à présenter qu'elle en était arrivée à ne plus se souvenir de ce dont elle avait vraiment besoin. Monsieur Sellal a même essayé comme arme d'appoint l'apparat de l'habit traditionnel local ne se rendant pas compte que la société algérienne entière a été meurtrie par l'exacerbation de la science du folklore et l'abus des verbes d'apparat.

La lourde panoplie des besoins d'un peuple quand elle est accompagnée d'approximatifs chants de cygnes d'un système politique moribond et chancelant ne prédispose pas seulement à l'incandescence de la braise d'un printemps. Il ouvre la voie à une folie des intempéries de quatre saisons jusqu'à se demander si la résurrection et l'intervention de tous les prophètes réunis viendraient à bout de cette poussée généralisée qui entraîne chaque Algérien à se faire hara-kiri. Car il faudrait bien en convenir, le fatal printemps n'est pas à attendre au tournant des rues sombres, il est là, il suffit de bien voir pour le surprendre derrière les faits et gestes de chacun et au fond des soupirs de tous. Ici le printemps comme chaque jour de toute l'année est fait de quatre saisons et tout Algérien passant, errant ou égaré est en soi Ghardaïa meurtrie et lacérée incapable de se défaire du parapluie de l'armée et empêché de se rendre définitivement compte que la juste solution est en lui.