Jamais le
terrorisme au non de l'islam ne s'est autant amplifié que depuis que la
communauté internationale s'est engagée dans la «guerre globale contre le
terrorisme». Curieux.
Septembre 2001 :
les USA entrainent, à juste titre, la communauté internationale dans la « lutte
globale contre le terrorisme d'obédience islamiste ». Cinquante-trois pays
coalisés pourchassent les Talibans en Afghanistan avec pour but l'éradication
de l'organisation terroriste Al-Qaïda sous commandement d'Oussama Ben Laden qui
venait de revendiquer les attentats du 11 septembre contre les USA. Al-Qaïda
était localisée dans le nord-est afghan, aux frontières du Pakistan voisin. 15
années se sont écoulées : Al-Qaïda, loin d'être éradiquée, s'est démultipliée
dans toute la région du Moyen-Orient, en Irak, en Syrie, au Yémen, en Egypte et
ailleurs, au Maghreb, dans la bande du Sahel, en Somalie ou encore en
Tchétchénie?etc. Depuis 2014, l'autre organisation criminelle dénommée Daech,
Etat islamique, apparue et proclamée aux frontières communes syro-irakiennes
semble suivre, inexorablement, la même logique. Du nord irakien qu'elle a
conquis, l'organisation Daech plante son « drapeau noir » en Libye, dans la
bande du Sahel et fait jonction avec l'autre secte d'assassins Boko Haram qui
lui a fait allégeance. Déduction inévitable : le terrorisme d'obédience
islamiste a gagné en ampleur ces quinze dernières années, alors même que la
communauté internationale a multiplié les moyens de lutte pour l'éradiquer.
Autrement dit, l'ampleur et le développement du phénomène terroriste sont
directement proportionnels à l'ampleur (le niveau) de mobilisation de la
communauté internationale conte lui. Aussi sinistre que soit la déduction, le
constat est indiscutable, hélas, après quinze années d'engagement international
contre le fléau de la violence terroriste. Du coup, la question est inévitable
: pourquoi ? Le terrorisme islamiste se nourrit-il du niveau et de l'intensité
d'engagement de son ennemi qu'est le reste du monde libre ? Comment expliquer
l'échec de la coalition mondiale avec les impressionnants moyens militaires, de
police, du renseignement, de l'opinion?face à des bandes de barbares fous qui
tuent, brûlent, violent, détruisent de plus en plus partout où ils s'implantent
? Et si l'explication de l'échec, car s'en est un, tenait à la stratégie de
lutte engagée par la communauté internationale qui, rappelons-le, se limite et
s'enferme dans la seule réponse par les armes ? Le terrorisme organisé
islamiste semble utiliser la théorie de « l'héliocentrisme » : il se place au
centre de tout mouvement et aspire par la loi de la gravitation tout ce qui
l'entoure ou est dans son champ de vision ou de conquête. Autrement dit, le
terrorisme allume avec quelques dizaines d'hommes armés un foyer quelque part
dans une contrée affaiblie du monde, frappe l'opinion internationale par un
acte spectaculaire, puis attend la réaction du reste du monde qui se précipite
dans la dite contrée. Le terrorisme multiplie ça et là des actions
spectaculaires, très vite relayées par les médias du monde entier, et finit par
créer l'illusion qu'il contrôle des pays entiers. Le terrorisme a d'excellents
« public-relations » que sont les médias lourds (télés) occidentaux
particulièrement, sans qu'il débourse un dollar ou un euro. D'aucuns croient
aujourd'hui que l'éradication du terrorisme islamiste ne verra jamais la fin.
La peur et la terreur qui sont le but du terrorisme sont aujourd'hui enracinées
dans l'esprit des sociétés les plus sécurisées. Ne répète-t-on pas à longueur
de propagande que le « terrorisme islamiste frappe quand il veut et où il veut
» ? S'il est évident qu'il ne faut jamais baisser la garde face à la menace
terroriste, autant qu'il est évident qu'il faut lui riposter par les armes, il
n'en reste pas moins de reconnaitre que cela n'a pas suffi. Autrement dit, il y
a une dimension, un aspect, quelque chose qui manque à la stratégie de « lutte
globale contre le terrorisme » telle que menée à ce jour. Le bon sens voudrait
que l'on s'interroge sur les « raisons profondes » qui sont à l'origine de
l'apparition du phénomène terroriste islamiste et qui favorise ces derniers
temps sa « croissance ». Qui niera que la violence et les guerres ont, depuis
l'existence des hommes, toujours été la conséquence d'une autre violence qui
s'appelle l'injustice, le déni de droit, l'usurpation de la liberté,
l'oppression, l'humiliation ? C'est à dire l'inhumanité ? Et si le terrorisme
islamiste était la conséquence de tant de tares et d'injustices que des hommes
affligent à d'autres hommes ? Les Etats et pouvoirs politiques sont-il
étrangers et totalement dédouanés de la responsabilité de l'apparition et
l'amplification du phénomène terroriste ? Comment peut-on éviter à un citoyen
d'un pays pauvre soumis à l'oppression, la dictature et la pauvreté de refuser
l'offre de vengeance d'un groupe islamiste ou de toute autre bande de criminels
contre le dictateur et l'oppresseur ? Qu'est-ce que le sens de la citoyenneté
sous la dictature et la misère ? Quelle influence peut avoir chez un musulman
un discours humaniste et légaliste face au discours de l'islamiste dans
l'instrumentalisation de la question palestinienne ? Comment expliquer au
musulman la perpétuation et l'extension de la colonisation de la Palestine par
Israël ? Jérusalem Est, troisième lieu saint de l'islam, saigne dans le cœur de
tous les musulmans du monde et dans celui de tous les hommes épris de justice.
Le drame palestinien sert, dans une très grande mesure, le discours radical et
djihadiste. Le nier est une imposture grave. La réponse militaire au terrorisme
n'est pas la panacée. Elle ne suffira jamais. La preuve nous est donnée par les
conséquences irréfléchies de l'intervention armée franco-britannique et
américaine en Libye. Idem en Syrie. Sans la mise en route d'un véritable
processus politique sincère et inclusif de toutes les parties en conflit, sans
de vraies réformes politiques démocratiques dans les pays arabes et africains,
sans la solidarité effective des démocraties occidentales, la violence
terroriste persistera autant que persisteront les injustices, les humiliations,
la colonisation et les connivences entre les pouvoirs des pays libres et
démocratiques avec les pouvoirs dictatoriaux, là où ils survivent encore.