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BOUSSEMGHOUN: Accorder la priorité au désenclavement

par Hadj Mostefaoui

Considérée à juste titre comme unique îlot amazighophone dans tout l'ouest du pays, la daïra de Boussemghoun, qui compte 3.200 âmes, réparties sur 586 km², est avec ses sept vieux ksour, dont Agham, l'une des dernières citadelles encore debout, rappelant aux visiteurs un pan de l'histoire de cette riche contrée. Rien ne vaut un verre de thé à la menthe au milieu de l'une des cours du vieux ksar, situé à la jonction d'un dédale de ruelles, constituant ainsi un labyrinthe que seuls les initiés arpentent.

En sus des autres sites et monuments historiques, la région compte dans son répertoire 03 sites de gravures rupestres respectivement aux lieux-dits Nkhila, Garat Lahbar et Ouled Moussa, qui n'ont pas encore livré leurs secrets. On y découvre des représentations d'équidés, de reptiles ainsi que celle d'une jeune femme. Même l'éminent Ibn Khaldoun a évoqué dans l'un de ses illustres ouvrages cette ville mystérieuse, qui garde jalousement son riche et tumultueux passé. Son oasis a été le point de jonction et carrefour principal des caravanes venant du Maghreb et se rendant aux Lieux saints, comme en témoigne le séjour prolongé (1781-1798) de Sidi Ahmed Tidjani, fondateur de la « Tarika Tidjania » où il créa une zaouïa qui draine jusqu'à nos jours des milliers de disciples. La ville tire son nom du saint Sidi Boussemghoun.

Les élus locaux qui se sont succédé à la tête de l'hôtel de ville se sont distingués par le maintien du décor féerique des allées et avenues de la ville. Région à vocation foncièrement touristique, elle peut se targuer de posséder l'un des plus vieux ksars du sud du pays, rénové et remis à niveau récemment, ainsi que d'une vaste palmeraie réputée pour la production de dattes dont la plus renommée est la « Boufegous Gharas » aux vertus médicinales et thérapeutiques. Cette ville mystique et mythique à la fois est un haut lieu de la culture et des arts. D'une beauté rare et incomparable, elle semble sortir d'un conte de fées. Incrustée telle une perle dans son écrin de verdure, la ville de Boussemghoun, située à mi-chemin entre Chellala et la station thermale d'Ouraka (W Naama), sort peu à peu de sa torpeur habituelle en se battant avec l'énergie du désespoir contre l'enclavement et de ce côté-là, tout porte à croire qu'elle est sur la bonne voie. Trois axes routiers ont été réalisés et ouverts à la circulation, notamment vers la ville d'El-Abiodh Sid Cheikh sur 77 km, vers El-Bnoud sur 74 km et enfin en direction du nord, vers la station thermale sur 28 km.

Pour M. Djamel Eddine Chergui, le chef de daïra au visage pétillant, il est également prévu la réalisation d'une bretelle de contournement du centre-ville, sur plus de 06 km. Ces nouvelles voies de communication offriraient de réelles chances de réussite et assureraient sans l'ombre d'un doute le décollage socio-économique de cette ville autrefois repliée sur elle-même. Selon M. Omar Gasmi, chef de l'exécutif communal, la collectivité locale a bénéficié dans le cadre du PCD/2012 de 07 opérations pour une enveloppe financière d'un montant global de 80 millions de DA, lesquelles ont été menées à terme bien avant la fin de l'exercice. Elles ont porté sur la réalisation et la rénovation du réseau assainissement sur 3.000 m linéaires, sur l'aménagement d'un espace vert, un module de jeu pour enfants et enfin sur la viabilisation urbaine.

Sur un autre registre, il y a lieu de signaler que contrairement au reste des 21 communes de la wilaya, celle de Boussemghoun ne subit aucune pression en matière de demandes de logements, eu égard au nombre très bas de demandes enregistrées. Dans cette même optique, rappelons que la daïra a pu bénéficier d'un quota global de 110 logements sociaux dont 50 ont été lancés et 920 autres de type rural, retenus au titre des programmes quinquennaux 2005/2009 et 2010-2014, connaissent quant à eux un taux de réalisation très appréciable puisque plus de la moitié de ce volume de logements a été attribué.

En parallèle, 05 transformateurs ont été réalisés et ceci dans le but d'enrayer définitivement les chutes de tension d'électricité enregistrées lors de la période chaude qui s'étale dans cette région du mois de mai à septembre.

Le seul point noir qui ne cesse de tarauder l'esprit des citoyens de cette collectivité locale demeure sans conteste celui lié au secteur de la santé lequel est réduit à sa portion congrue. En effet, la seule polyclinique, qui n'est dotée que de deux lits, réservés exclusivement aux cas urgents de premiers soins, avec pour seul encadrement un médecin généraliste et une sage-femme, ne répond nullement aux besoins immédiats et aux attentes d'une population dont les malades ou les cas jugés graves, comme par exemple les cas de césarienne ou accidents, sont éternellement confrontés aux sempiternelles évacuations onéreuses vers l'hôpital le plus proche, soit 80 km de la ville d'Aïn Sefra (W Naama). Concernant le PCD/2013, l'ensemble des 10 opérations inscrites pour un montant global de 41 millions de DA portant plus particulièrement sur la remise à niveau des secteurs liés à l'aménagement urbain et viabilisation a été lancé tout au début de cette année en cours. Le seul vœu émis par la population locale qui mérite d'être exaucé, demeure la réalisation d'un hôpital digne de ce nom, répondant aux aspirations légitimes des citoyens de cette région enclavée, doté de tous les équipements adéquats et d'un personnel qualifié et spécialisé. Même si beaucoup reste à faire, Boussemghoun avance à petits pas car de réels progrès ont été enregistrés, plus particulièrement dans les domaines socioéducatifs et culturels.

Nous quittons cette ville avec dans nos oreilles la célèbre chanson d'un enfant de la ville, qui a fait le tour du Maghreb, intitulée « Ah Boussemghoun ! Ah Boussemghoun !», accompagné seulement du luth traditionnel, en un mot un hommage vibrant à la langue amazigh. Le chef de la daïra ne cesse de son côté de multiplier les appels du pied à l'adresse de potentiels investisseurs privés, intéressés par l'oléiculture et l'agriculture saharienne. Plus de 100 hectares de terres fertiles situés au lieu-dit Nkhila sont en jachère depuis plus de deux décades par manque de bras vigoureux.