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L'Otan fête son 60e anniversaire

par M'hammedi Bouzina Med, Notre Correspondant de Bruxelles

En 20 ans, de 1989 à 2009, l'Otan est passée d'une organisation de défense strictement militaire des intérêts nord-américains et ouest-européen, à une organisation de dimension mondiale qui se déclare défenseur des libertés et de la démocratie. Son ennemi principal, en ce début de siècle, est le terrorisme international.

L'Otan a entamé et continue sa mutation. Ici, résumés quelques repères.

Hier et aujourd'hui, L'Organisation transatlantique Nord, l'Otan, célèbre à Strasbourg (France) et Kehl (Allemagne) le 60ème anniversaire de sa naissance. Unique et seule Organisation militaire supranationale, l'Otan fascine les uns qui tapent à sa porte et inquiète d'autres qui redoutent l'hégémonie des puissances occidentales, en particulier celle des USA sur le destin du monde.

Née au lendemain de la 2ème Guerre mondiale et de l'arrivée sur la scène internationale de l'ex-URSS communiste comme puissance politique et militaire, l'Otan, qui se voulait être un « rideau » protecteur contre la progression du communisme en Europe et ailleurs, se retrouve aujourd'hui face à de multiples nouveaux défis : ceux dits du 21ème siècle.

Si les raisons qui ont prévalu à sa naissance, à savoir la défense des valeurs idéologiques et politiques de l'Occident et leurs expressions sociétales de liberté et de démocratie n'ont pas changé, ses méthodes, son organisation, son fonctionnement, sa dimension et ses ambitions ont changé depuis la chute du régime soviétique et ses deux principaux symboles : le Pacte de Varsovie et le mur de Berlin. Aussi, parce que l'Otan concerne d'une manière ou d'une autre et à des degrés variables les pays du monde entier, donc l'Algérie aussi, est-il légitime de s'interroger sur ce qu'est, aujourd'hui, cette super-organisation militaire mondiale, quels sont ses buts et que fait-elle dans le monde. Autrement dit, examiner son évolution depuis qu'elle s'est retrouvée seule à intervenir çà et là dans le monde pour X raisons.

 

LA RECONQUÊTE DU RESTE DE L'EUROPE



Au début des années 80, l'ex-URSS autant que ses 12 pays alliés de l'est européen vivent d'énormes difficultés économiques et sociales. Le coup d'envoi de l'effondrement du communisme est symbolisé par la chute du mur de Berlin le 9 novembre 1989. L'URSS empêtrée dans des « guerres » internes entre clans politiques (libéraux, communistes) pour la prise du pouvoir ne peut rien faire.

Au contraire, le glas sonne pour la fin du régime communiste le 25 décembre 1991. Mikhaïl Gorbatchev, promoteur de la Pérestroïka et de la Glasnost (réformes) abandonne le pouvoir au profit des partisans de Boris Eltsine, maire de Moscou et héraut du libéralisme.

En cette journée de Noël 1991, le drapeau rouge frappé de la faucille et du marteau cède la place à la nouvelle bannière tricolore russe sur la Place rouge de Moscou : l'URSS est morte, la Russie est ressuscitée. Les unes après les autres, les anciennes Républiques soviétiques se séparent de la Russie. L'Occident avec les USA en tête ont, désormais, le terrain libre pour reconfigurer la carte du monde selon leurs vœux. Le moyen d'appui, outre le commerce et la culture, est le positionnement stratégique militaire. L'Otan entre en jeu.

Les tourmentes qui ont balayé les pays d'Europe centrale et orientale (PECO) menacent la stabilité et la paix dans toute l'Europe. Au nom de leur histoire commune et de leur géographie, les pays d'Europe de l'Ouest déjà membres de l'Otan volent au secours de leurs voisins de l'est menacés de désintégration et de guerres. Il faut reconstruire l'Europe, toute l'Europe sur l'idéal du libéralisme et de la démocratie. L'Otan actionne alors l'article 10 de son traité : les membres de l'Otan peuvent inviter à devenir membre « tout Etat européen susceptible de favoriser le développement des principes du présent traité et de contribuer à la sécurité de la région de l'Atlantique Nord ».

Au Sommet de Madrid de 1997, l'Alliance transatlantique invite trois premiers pays à la rejoindre : la Tchéquie, la Hongrie et la Pologne. Le 12 mars 1999, ils font leur entrée officielle à l'Organisation nord-atlantique. La même année, lors du Sommet de Washington, l'Otan lance un Plan d'action pour l'adhésion (MAP) d'autres pays. 7 pays entament les discussions d'adhésion en novembre 2002 et rejoignent l'Alliance le 29 mars 2004. Il s'agit de la Bulgarie, la Roumanie, l'Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la Slovaquie et la Slovénie. L'Otan compte 26 Etats membres. Quant à la Croatie, l'Albanie et la Macédoine, elles poursuivent leurs discussions au sein du MAP pour l'adhésion. C'est à ce titre que ces trois derniers pays sont invités aux cérémonies du 60è anniversaire. Le long de cette période d'élargissement, l'Otan construit en parallèle une nouvelle « diplomatie » avec la Russie. Car, malgré le démantèlement de l'ex-empire soviétique, la nouvelle fédération de Russie demeure toujours la deuxième puissance militaire mondiale, voire la première puissance atomique, compte tenu du volume de son arsenal d'armes nucléaires.

 

LE RAPPROCHEMENT OTAN - RUSSIE



Dès la naissance en 1991 de la nouvelle fédération de Russie, la situation se complique aux Balkans qui sont au bord de l'implosion. Compte tenu de ses liens et de son passé avec la région, la Russie est, malgré ses propres difficultés internes, amenée à s'impliquer dans le « magma » des Balkans. L'Europe de l'Ouest et l'Otan font de même : la guerre est à leurs portes. Immédiatement, une structure de concertation Otan-Russie est mise en place en 1991 : le Conseil de coopération nord-atlantique : CCP. Il permettra aux deux protagonistes de coopérer pour éviter l'affrontement violent, les guerres entre les Etats balkaniques et ailleurs.

A l'exception de l'ex-Yougoslavie qui vivra une guerre effroyable, les Etats balkaniques feront leur mue vers la démocratie sans trop de casse. Cependant, la « méfiance » est toujours là entre une Otan envahissante et une Russie en construction. Ce n'est que suite aux attentats du 11 septembre 2001 que les deux partenaires vont évoluer vers une collaboration plus intense face à la nouvelle menace mondiale : le terrorisme international. La coopération est rehaussée et le CCP devient le Conseil Otan-Russie (COR).

Une mission de liaison militaire de l'Otan s'installe à Moscou, en contrepartie de celle des Russes installée à l'Otan depuis 1998. Le COR va servir de cadre de consultation quotidienne pour des actions communes sur les questions de sécurité et de prévention des risques à travers le monde. Des groupes de travail et des commissions conjointes sont mises en place sur le terrorisme, la prolifération des armes nucléaires, le maintien de la paix, les plans civils d'urgence, la coopération scientifique etc. Sans doute, est-ce pour ne pas remettre en cause les acquis de cette coopération poussée pour la paix que l'Otan n'a pas encore estimé le moment venu d'accueillir les ex-Républiques soviétiques, la Géorgie et l'Ukraine, en son sein.

Cela peut attendre encore. Dans ces circonstances de remise en ordre de l'ordre géostratégique mondial, restait la Méditerranée, frontière sud de l'Europe. Là aussi, les stratèges de l'Otan vont s'atteler à impliquer les pays de la rive sud méditerranée dans la construction de la paix et la prévention et la lutte contre le nouveau risque majeur de ce siècle : le terrorisme international.

 

LE PARTENARIAT EURO-MÉDITERRANÉEN



Cette coopération va concerner sept pays du sud méditerranée et sera lancée sous le vocable de « Dialogue méditerranéen » en 1994. Cinq pays y adhèrent dès le départ et qui sont le Maroc, la Tunisie, l'Egypte, Israël et la Mauritanie.

Ils seront rejoints pas la Jordanie en 1995 et l'Algérie en 2000. C'est le Conseil de l'Atlantique Nord qui va superviser le dialogue et servir de cadre aux débats politiques bilatéraux et multilatéraux.

La coopération portera sur divers domaines tels la diplomatie, la gestion des crises, les plans civils d'urgence, l'action humanitaire, l'environnement, les stratégies de défense... Très vite, le dialogue va évoluer vers une coopération plus poussée entre les partenaires. Au Sommet d'Istanbul (Turquie) de juin 2004, il est rehaussé à un niveau supérieur et devient le « Partenariat euro-méditerranéen ». Cela implique que les rencontres passent du niveau des ambassadeurs à celui des ministres et des chefs d'Etat. Les chefs d'Etat se rendent au siège de l'Alliance à Bruxelles (le président algérien Abdelaziz Bouteflika se rendra le 10 décembre 2002). A son tour, le SG de l'Otan visitera les sept pays du sud méditerranée (il commencera par l'Algérie le 25 novembre 2004). A partir de 2004, des plans d'entrainement militaires pratiques sont initiés pour permettre l'interopérabilité des forces armées. L'Otan assiste les pays du Sud dans la réforme et la modernisation de leurs armées. L'objectif étant de mener ensemble des missions de prévention des risques terroristes. C'est l'exemple de l'opération « Endeavour » menée en mer Méditerranée pour sécuriser les routes maritimes.