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Une certitude contredite par le durcissement de la répression

par Kharroubi Habib

L'injonction venue du vice-ministre de la Défense et chef d'état-major de l'ANP intimant l'accélération du processus électoral pour une organisation de la présidentielle dans les plus brefs délais a été reçue « cinq sur cinq » par le président de l'Etat par intérim, l'exécutif conduit par Noureddine Bedoui et le Parlement.

Le premier s'est exécuté en convoquant aussitôt un Conseil des ministres qui a endossé les recommandations proposées dans son rapport par l'instance de dialogue et de médiation susceptibles de lever l'obstacle de l'opposition populaire à l'organisation de cette élection. Le second a sans attendre établi les moutures des textes législatifs afférents aux recommandations de l'instance et prestement transmis aux deux chambres parlementaires qui les ont adoptés sans hésitation ni murmure. Pour que démarre sans retour le processus électoral, il ne manque que la signature par Abdelkader Bensalah du décret de convocation du corps électoral qui interviendra à n'en point douter dans l'imminence vu que le chef de l'armée a fixé la date du 15 septembre à cet acte administratif.

Apparemment satisfait par la célérité avec laquelle son injonction s'est traduite dans les faits, le chef de l'armée n'a pas été avare en bonnes et élogieuses paroles à l'endroit des acteurs qui ont ainsi donné le coup d'accélérateur voulu par lui au processus électoral. Mais le plus intrigant chez Gaïd Salah est qu'il semble certain d'avoir engagé le pays sur la bonne voie en mettant en branle à la hussarde ce processus électoral et tout aussi certain qu'il a l'approbation d'une grande majorité des citoyens. Une certitude qui lui a fait affirmer qu'il y aura une grande affluence d'électeurs dans les bureaux de vote le jour du scrutin.

Toutefois, à supposer que le chef de l'armée a puisé sa certitude des rapports établis à son intention par les services de renseignement confirmant cette perspective, pourquoi a-t-il alors choisi l'option du musellement répressif des milieux d'opposition à l'option électorale qui entraîne pour le pouvoir de fait qu'il incarne d'être perçu comme liberticide alors qu'il a multiplié les promesses quant à sa volonté de respecter la liberté d'opinion et d'expression ? La contestation même la plus radicale s'exprimant contre l'option prônée et mise en branle par l'homme fort de l'armée et du pays est restée jusqu'alors dans le cadre pacifique qui caractérise la révolution populaire du 22 février.

Le durcissement répressif opéré par le pouvoir en guise de réponse à cette contestation n'augure pas d'un climat qui va été apaisé alors que se met en place le processus électoral. En s'en prenant avec une main lourde aux activistes qui comme Karim Tabbou tiennent des propos radicaux contre la gestion du haut commandement de la crise politique, Gaïd Salah alimente l'impression que contrairement à ce qu'il a déclaré avoir comme certitude, il est plutôt en plein désarroi au constat qu'il a fait un pari de l'organisation de l'élection présidentielle qu'il n'est pas du tout certain de tenir avec succès. Ce qu'il pense peut-être gagner en intimidant ses détracteurs et en mettant hors circuit les plus virulents d'entre eux. C'est l'effet contraire qui risque d'en résulter.