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La loi des «parkingueurs» dans un pays de trottoirs

par Moncef Wafi

Un métier qui n'existe qu'en Algérie à l'abri des lois et de la justice. Des individus s'autoproclament propriétaires d'un trottoir, d'un espace public et font payer la dîme aux automobilistes. Et gare à ceux qui refusent. Insultes, agressions physiques, racket et vandalisme des véhicules, le répertoire agressif de ces parcmètres ambulants est impressionnant. La rue est devenue leur propriété personnelle qu'ils se partagent entre leurs semblables. Les parkings, un legs familial et les quartiers savamment découpés en territoire absolu. Si à Blida, 42 parkingueurs racketteurs ont été présentés devant la justice, il n'en est rien dans le reste du pays. Particulièrement à Oran. En effet, les automobilistes sont livrés en pâture à cette faune de prédateurs, criminels en herbe si ce ne sont pas des repris de justice aguerris, qui font leur loi, rackettant au su et au vu de la police le stationnement. De quel droit ? Cette appropriation de l'espace public laissé en jachère par l'Etat ne pouvait pas échapper à cette logique de biens vacants qu'on prend par la force. Du couteau ou du cousin bien placé dans les sphères d'Alger. Un bout de trottoir devient propriété personnelle comme d'autres ont privatisé tout un pays. On délimite un parking comme d'autres ont démoli l'économie nationale pour s'accaparer le foncier industriel au dinar symbolique. On exhibe un gourdin comme d'autres envoient les forces antiémeutes. Cette logique de la rapine n'est pas horizontale mais verticale s'épanouissant dans l'impunité mimétique. Et chacun y trouve son compte. Ainsi va l'Algérie. Au moment où on parle d'un Etat fort, de faire face aux dangers extérieurs, le gouvernement n'arrive même pas à juguler des petits voyous qui ont pris en otage les Algériens. Ils sont postés aux autres coins des rues, à deux pas des commissariats mais personne n'intervient. Ils ne peuvent pas intervenir parce que on ne l'a pas fait avec les grands voyous au col blanc. Ceux qui ont ruiné le pays, les corrompus de tous bords, ceux qui se cachent à l'étranger, qui possèdent des comptes off-shore et se payent des biens immobiliers avec l'argent de l'Algérien. Les intouchables. Alors pourquoi inquiéter les parkingueurs lorsqu'on refait les trottoirs et qu'on les repeint, moins d'une année après leur première réfection ? La question n'attend même pas de réponse.