Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Brahimi : colère et amertume

par Kharroubi Habib

Diplomate, ancien ministre des Affaires étrangères, Lakhdar Brahimi, rappelons-le, a été émissaire de l'ONU pour le conflit syrien, poste dont il a démissionné au constat qu'il ne parvenait pas à convaincre les parties prenantes à s'entendre sur une issue négociée. Le conflit syrien a été le thème de l'interview qu'il a accordée samedi à Al-Jazeera english. Plein d'amertume, le diplomate algérien s'en est pris dans cette interview à toutes les parties impliquées dans l'atroce conflit en leur reprochant de ne pas avoir mis «l'intérêt du peuple syrien en première priorité». «Il n'y a pas de gens bien dans la tragédie syrienne», a-t-il encore ajouté. Attribuant la majorité de la responsabilité de cette tragédie aux forces extérieures, les gouvernements et autres, qui soutenaient un camp ou l'autre, l'ex-émissaire onusien a soutenu qu'il aurait été toutefois possible de résoudre le conflit en 2012 si toutes les parties avaient écouté les Russes un peu plus qu'elles ne l'ont fait».

Tout en n'exonérant nullement la Russie de sa part de responsabilité sur la tragédie syrienne, il considère qu'à l'époque ce pays avait «une analyse bien réaliste de la situation que pratiquement tout le monde» parce que ses dirigeants avaient une réelle et meilleure compréhension de ce qui se passait en Syrie.

Sur le sort du président syrien dont les ennemis intérieurs et leurs alliés étrangers en font la pierre d'achoppement des négociations qui ont repris lundi à Genève, Brahimi a estimé que Bachar al-Assad ferait «partie de la solution» en précisant que «faire partie de la solution ne signifie pas qu'il va continuer à gouverner pour 40 ans supplémentaires» et qu'il lui faudra accepter sa responsabilité dans le massacre en Syrie. L'on retiendra de ce que Brahimi a dit du conflit syrien que ce sont les ingérences extérieures qui l'ont attisé et transformé en une confrontation armée ayant atteint le summum de l'atrocité et de la souffrance pour le peuple syrien.

Puissent-elles cesser pour laisser les Syriens régler leur problème national ! Mais, si certaines puissances semblent avoir convenu de leur en offrir l'opportunité (la conférence de Genève en est une), d'autres, par contre, feront encore tout pour que la Syrie reste le champ de bataille où, par combattants syriens interposés, elles videront leurs querelles nées des ambitions irréconciliables que chacune nourrit au plan régional.

En 2016, la Russie est encore la puissance dont l'analyse est la plus réaliste qu'il faut cette fois écouter et prendre au sérieux les gestes qu'elles fait pour favoriser la conclusion d'un accord de paix pour la Syrie. La rencontre de Genève en cours est probablement l'ultime chance d'arrêter le conflit syrien et de sauver la face à l'humanité qui est ternie par la mégalomanie de certains de ses dirigeants prétendant agir au nom de ses valeurs ou pour la défense de ses croyances religieuses.