Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Derrière l'annonce, la ruse politique

par Kharroubi Habib

Pour sûr que la révélation faite par Bouteflika que le projet de révision de la Constitution qui va être bientôt rendu public prévoit la constitutionnalisation d'un mécanisme indépendant de contrôle et surveillance des élections, a surpris et pris de court l'opposition dont c'est la revendication fondamentale commune à toutes ses composantes et leur cheval de bataille dans la campagne qu'elles mènent contre le pouvoir en place.

Il en a fait d'autres dont sur le principe l'objectif est, comme il l'a donné à entendre, de contribuer à « consolider » les libertés et à « raffermir » la démocratie. En ayant fait entrevoir que son projet de révision de la Constitution ne se résume pas ainsi que prétendu par elle à une opération de ravalement superficiel du système politique, Bouteflika n'attend certainement pas que l'opposition désarme et cesse de revendiquer que le pays aille à une transition démocratique qu'elle estime être le passage par où s'opèreront les changements constitutionnels garantissant l'émergence d'un Etat civil et de droit avec la démocratie comme mode de gouvernance. C'est pourquoi il a consacré une partie de son message à la nation à l'occasion de la célébration du 61ème anniversaire du déclenchement de la guerre de libération nationale à exhorter les citoyens à ne pas écouter et suivre les discours qui visent à « ébranler » leur confiance en leurs « dirigeants et cadres » et pour ce faire « exagèrent et dramatisent » les défis auxquels l'Algérie est confrontée.

Son exhortation est tout de même la preuve que le pouvoir a pris la mesure qu'il a en face de lui une opposition dont les actions de contestation s'avèrent plus audibles et entraînantes que celles qui ont été les siennes quand elle agissait en ordre dispersé contre lui. Il n'en demeure pas moins que maintenant que le pouvoir s'apprête à concrétiser son projet de révision de la Constitution, l'opposition doit réviser sa position qui consiste à ne voir dans son intention qu'une opération destinée à conforter le statu quo politique qui vitrifie le pays. Les changements constitutionnels dont Bouteflika a esquissé les contours dans son message à la nation ne sont pas de ceux que l'on doit rejeter « dans le fond et la forme » au motif qu'ils sont à l'initiative d'un homme d'Etat dont elle conteste la légitimité électorale et revendique qu'il quitte son poste. Le combat pour lequel l'opposition doit désormais se préparer est celui que les changements qui vont être constitutionnalisés s'accompagnent de garanties probantes que le pouvoir en respectera et l'esprit et les conséquences.

Pour en revenir au message du chef de l'Etat, l'on fera remarquer que celui-ci n'a pas révélé par quelle voie il va faire entériner son projet de révision de la Constitution. Probablement qu'il attend le retour d'écho qu'ont eu au sein de l'opinion algérienne ses divulgations sur ses grandes lignes et la nature du débat qu'elles susciteront.

Il ne fait aucun doute en tout cas qu'en remettant sur le devant de la scène la question de la révision constitutionnelle, Bouteflika contraint l'opposition à se positionner sur ce qu'il va entreprendre et non à camper sur le préalable d'une transition démocratique dont le principe a constitué le ciment de son unité face au pouvoir.