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Madiba nous a quittés

par Kharroubi Habib

Jamais une personnalité ayant marqué de son empreinte l'histoire du monde au 20ème siècle et en ce début du 21ème n'a suscité à sa disparition hommages et éloges aussi unanimes saluant sa mémoire que le Sud-Africain Nelson Mandela qui vient de s'éteindre à l'âge de 95 ans au terme d'une vie et d'un destin hors normes. De partout affluent les marques de communion dans la tristesse qui afflige le peuple Sud-Africain à la perte du héros emblématique de sa lutte contre le régime inique de l'apartheid et le père fondateur de leur nation « arc-en-ciel » et de reconnaissance pour la grandeur d'âme qui a été la sienne dont les choix qu'il a faits pour réaliser les objectifs des luttes qu'il a menées.

Si Mandela suscite tant de ferveur et est encensé universellement c'est parce qu'il est parvenu à forcer le respect, y compris celui des adversaires de la cause dont il a été l'un des principaux combattants, en démontrant que l'humanisme fraternel auquel il aspirait rallier toutes les composantes de la nation sud-africain n'était pas que tactique pour amadouer les tenants du régime de l'apartheid mais conviction irrévocablement ancrée en lui et finalité de son combat. Jugé sur cela, Mandela mérite amplement le concert de louanges à sa mémoire qui se fait entendre dans le monde. Pour autant et alors que de son vivant il s'est vu mis au rang d'une icône parée de toutes les vertus, Mandela n'a pas succombé à l'oubli qu'il fut un temps long où la cause qui était la sienne et celle du mouvement d'émancipation dont il était l'âme et le symbole était loin de susciter l'admiration chez certains qu'ils vouent maintenant à sa réussite et à ses résultats.

L'homme, tout le monde le sait, a passé 27 ans d'internement et ses compagnons de lutte ont été confrontés à la pire répression qui soit de la part des tenants du régime de l'apartheid. Des Etats qui aujourd'hui ont fait des déclarations ou envoyé des messages dithyrambiques saluant sa mémoire ont soutenu à fond ce régime et considéré pendant longtemps que ses adversaires étaient des « ennemis du monde libre » dont la répression se justifiait.

Les Sud-Africains pleurent, et c'est normal, la disparition de leur héros national. La tristesse du continent est tout aussi sincère car Mandela n'a pas lutté uniquement pour l'émancipation de ses compatriotes, mais aussi pour celle de tous les peuples africains. La tristesse des Algériens l'est tout autant et encore plus parce qu'ils savent le lien spécifique et particulier qu'ont eu l'Algérie et Mandela aux heures de braises. Tous les authentiques militants des causes justes sont dans le même état d'esprit. Quant aux éloges de ceux qui n'ont « découvert » que tardivement la grandeur de l'homme et de son combat, il faut les considérer pour ce qu'ils sont, une hypocrite tentative de faire oublier qu'ils ont été responsables à des degrés divers que Mandela soit resté 27 ans enfermé et dans l'indifférence de leurs Etats et que le régime d'apartheid a sévi implacablement en Afrique du Sud pendant des décennies en partie grâce à leur connivence complice.

Mandela s'en est allé. Il laisse aux hommes de bonne volonté l'exemplarité d'un destin et d'un combat dans lequel ils puiseront les motivations de leurs combats pour un monde et des sociétés telles qu'il les a pensées humaines et fraternelles.