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Mali : la guerre jusqu'à quand ?

par Kharroubi Habib

Les autorités algériennes ont vainement bataillé sur la scène régionale et internationale en faveur de la solution politique comme mode de règlement de la crise malienne. Elles ont échoué à la rendre possible et les événements dont le nord du Mali est le théâtre, depuis jeudi, les ont forcées à prendre acte de cette réalité, mais sans pour autant changer d'avis et surtout renoncer à considérer que l'option de la solution politique n'est plus de mise. Alors qu'une guerre est déclenchée au nord du Mali et que ses protagonistes sont déterminés à la mener jusqu'à réalisation de leurs objectifs respectifs, il peut paraître que l'Algérie s'est enfermée dans une conviction qui n'a plus aucune chance de rallier à elle les esprits et les actes des acteurs de la crise malienne qu'ils soient régionaux ou internationaux. Pourtant et bien que l'Algérie apparaisse désormais isolée seule à prôner encore l'option d'une solution politique, elle a fondamentalement raison en persévérant à le dire.

L'option de l'intervention militaire a triomphé. L'offensive lancée par des groupes armés en direction du sud du Mali a rendu indispensable une opération de ce genre faute de quoi la route vers Bamako se serait ouverte à ces groupes armés. Les autorités algériennes ne disconviennent pas qu'elle s'est imposée et qu'elle bénéficie d'un consensus international qui se justifie au vu de l'urgence créée par l'offensive des éléments des groupes armés occupant le nord du Mali. Il n'en demeure pas moins que l'intervention militaire en cours n'est pas et ne pourra être la panacée à la crise malienne comme le prétendent les partisans maliens et étrangers de la solution militaire. Elle a certes stoppé l'avance des groupes armés en direction du Sud malien et vers Bamako. En se poursuivant, elle leur infligera de lourdes pertes et les refoulera plus haut vers le Nord qu'ils occupent.

Mais au vu de l'étendue et de la configuration du terrain d'opérations, il ne faut pas en attendre l'éradication totale et définitive de ces groupes armés, d'autant que le tout militaire qui l'inspire ne s'embarrasse nullement de répondre favorablement aux revendications légitimes des populations du nord du Mali et que partagent une grande partie des éléments enrôlés dans les groupes armés qui sévissent dans cette région du Mali. Il en résultera inéluctablement l'enlisement dans la guerre avec pour conséquence la pérennisation de l'état d'insécurité. Tôt ou tard les autorités maliennes et les puissances qui se sont engagées à leur côté dans cette « guerre de reconquête » du nord du Mali s'apercevront que l'occupation du terrain n'extirpera pas les causes de la crise malienne. Elles se rendront compte qu'il faudra qu'elles négocient avec les représentants de ces populations une solution de sortie de crise. Ce qui la guerre se prolongeant sera plus complexe à atteindre d'autant qu'elle entraînera pour ces populations des souffrances et des blessures qui pèseront lourd sur leur rapport aux autorités de Bamako.

En attendant, l'Algérie est malgré elle face à une guerre à sa frontière sud dont elle a raison de craindre qu'elle déborde sur son territoire. Un scénario qu'elle a voulu exorciser en prônant le dialogue politique tant qu'il était temps entre le pouvoir central malien et la rébellion touareg du nord du pays dont les revendications sont loin d'être illégitimes et attentatoires à la souveraineté de l'Etat malien.