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Sortie d'une nouvelle promotion d'opposants mous

par Kamel Daoud

Dans le cadre de l'opération «printemps arabe» contre fleurs en plastique, de nouveaux partis politiques algériens vont être agréés. Le FLN, vieil enfant gâté, revanchard et méchant, boude cette réforme de son Président d'honneur. Le parti de Belkhadem veut être encore l'enfant unique du couple Révolution-Indépendance, veut manger seul, ne veut pas qu'on touche à ses jouets. A l'APN, il bloque ce que veut faire Bouteflika, tergiverse et régresse vers le stade oral. Il use de ses leviers pour que les agréments à délivrer le soient après 2012 pour empêcher les « nouveaux » de lui rafler sa majorité artificielle.

Revenons au sujet cependant : quatre nouveaux partis annoncés pour les mois à venir. Les heureux gagnants du printemps arabe fait et vécu et payé par d'autres ? Pas des jeunes, pas vous et moi, pas lui, pas un moins de trente ans, pas du sang neuf, pas les délégués des chômeurs ou les représentants des immolés. Non. Il s'agit d'un islamiste domestiqué, Abdallah Djaballah pour un autre Front pour la justice et le développement; d'un Kabyle inoffensif pour le Parti de la liberté et de la justice avec Mohammed Saïd; d'un Mascarien pour les gens de l'Ouest avec le Front démocratique de l'ancien chef du gouvernement Sid Ahmed Ghozali et d'un « centraliste » assimilé pour l'Union pour la démocratie et la République de l'ancien cadre du RCD, Amara Benyounès. On retrouve la cartographie, aménagée, du casting 1990-2000, la conception que se fait le régime de sa cour et de son opposition hand made, et le mépris pour les 70% d'Algériens de moins de trente, destinés à l'abattage ou aux statistiques. Le « printemps arabes » ? Le jeune vous le promet, le vieux vous l'emporte. Aucun dans cette liste des futurs seconds rôles du régime n'est jeune, aucun n'est un opposant fabriqué par la rue et la colère, tous sont des employés, des ex-employés ou des ex-salariés du régime. Aucun n'a réussi à faire tomber amoureux le peuple algérien, et aucun d'entre eux n'a assez de dents pour constituer une menace sérieuse ou une possibilité d'alternative au Régime. L'Occident veut qu'on réforme ? D'accord, répond le régime : on revient à la façon 90 : on ressort un islamiste, un ancien Chef de gouvernement à l'époque du vote islamiste, un bureaucrate et un morceau d'histoire nationale. Du coup, c'est cela le pluralisme. Et les jeunes de ce pays ? Destinés à l'ANSEJ ou à regarder l'ENTV ou prier Dieu. Trop jeunes pour être nés et nés après 62, ce qui veut dire jamais. Les leaders algériens nés durant les dernières années ne sont pas admis, reconnus, associés mais seulement frappés, harcelés, fichés et mis sous mandat dépôt de temps à autre.

Aucune institution n'a le droit de produire des leaders en Algérie sauf le Pouvoir lui-même. C'est lui qui les adoube, adopte, gonfle ou dégonfle, accepte ou sélectionne, « descend » ou glorifie. On est donc partis pour un autre cycle de dix ans de fausse opposition, de faux pluralisme, de fausses élections et de fausse ouverture et de fausses réformes.