Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

L'alliance présidentielle et les comités de soutien aux abonnés absents

par Kharroubi Habib

Pendant les journées d'émeutes, l'Assemblée populaire nationale a suspendu ses travaux pour soi-disant permettre aux députés de retourner dans leurs circonscriptions afin de contribuer à ramener le calme. Pourtant, il n'a été rapporté de nulle part que des députés «élus du peuple» ont été au contact des manifestants pour tenter de leur faire «entendre raison».

 Nos parlementaires n'ont pas été les seuls à s'être inscrits aux abonnés absents quand l'émeute et la violence se sont donné libre cours. Les partis de l'alliance présidentielle et la myriade de comités et d'associations de soutien à Bouteflika et à son programme ont fait de même. Le pouvoir n'a pu compter que sur les services de sécurité pour endiguer l'ouragan déchaîné. Tout ce que ses relais politiques ont fait en ce chaud moment a consisté à se fendre de déclarations de désapprobation des émeutes à l'abri dans des enceintes sécurisées.

 Ces partis, comités et associations se prétendent pourtant représentatifs et mobilisateurs parmi la population. Leur comportement et leur absence en la circonstance sont les preuves flagrantes du contraire. Ce qui n'est pas pour surprendre sachant sur quelles impostures est basée leur existence. En l'occurrence, ils n'ont même pas eu la «reconnaissance du ventre» qui aurait consisté à voler au secours du système qui les arrose en généreux profits, prébendes et privilèges. Pas fous nos députés et les profiteurs qui peuplent ces partis, associations et comités pour aller affronter une contestation populaire dont ils savent qu'elle les englobe dans l'exécration qu'elle a exprimée.

 Leur désertion n'a pas échappé au ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales qui l'a déplorée et fustigée en déclarant n'avoir vu sur le terrain «ni les militants des partis, ni les membres des multiples associations de la société civile agréées». Il ne pouvait en être autrement pour ce conglomérat dont l'engagement politique se résume à «traire la vache à lait».

 Bouteflika n'est pas dupe de leur attachement à sa personne et à son programme. Il continuera malgré tout à faire avec car le dispositif qu'ils constituent entretient l'illusion que la mouvance présidentielle est majoritaire dans le pays. Le calme revenu, les choses étant redevenues «normales», tout ce beau monde va s'agiter et faire assaut d'actions d'allégeance et de soutien à sa personne.

 Que les partis et autres segments en soutien au pouvoir et à Bouteflika fassent la preuve de leur déconnection d'avec la population, n'est pas pour surprendre. Mais que ceux de l'opposition se soient montrés frileux à aller à la rencontre de cette population en un moment crucial, est désespérant. Bien entendu que le pouvoir ne les aurait pas laissés faire. Mais ils n'ont rien tenté comme s'ils ne se sentent pas concernés par ce que la colère populaire a exprimé. Certains d'entre eux semblent avoir compris que le climat politique devient propice à l'initiative de rassemblement des oppositions. S'engageront-ils réellement sur cette voie? Rien n'est moins sûr tant ces oppositions se sont enferrées dans le rejet et l'anathémisation les unes des autres au détriment de l'essentiel qui est de combattre en front uni l'adversaire commun qu'est le système et son régime.