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Les silences assourdissants de la Russie, de la Chine et d'autres puissances

par Kharroubi Habib

Les Etats-Unis étant l'architecte en chef du montage qui a abouti à la tragédie actuelle dont le peuple palestinien est la victime, l'on comprend tout en le condamnant que leurs alliés européens et les régimes arabes qui leur sont inféodés se soient positionnés par le refus de faire de réelles pressions sur l'agresseur sioniste pour qu'il cesse sa «guerre» contre la population de Ghaza.

Il est par contre des silences qui sont assourdissants parmi la communauté internationale. Ceux de puissances que l'on croyait affranchies de la dépendance aveugle aux injonctions de ces Etats-Unis. Qu'ont dit ou fait en effet, depuis plus de quinze jours maintenant que dure l'agression israélienne et que s'amplifie le massacre de la population de la bande de Ghaza, ces grands Etats et importants acteurs internationaux que sont la Chine, le Brésil, l'Inde et surtout la Russie ? Rien, sinon d'avoir timidement déploré et mollement condamné l'agression et les tueries qui en résultent. Et pour ceux d'entre eux qui sont membres permanents du Conseil de sécurité, d'avoir cautionné une résolution mettant sur le même pied d'égalité l'agresseur et l'agressé, le criminel et ses victimes, et de toute façon condamnée à l'obsolescence par l'abstention des Etats-Unis.

Le temps découvrira au prix de quelles promesses certains de ces pays ont opté pour un profil bas face au complot tramé contre le peuple palestinien et sa cause nationale.

Il n'est pas néanmoins besoin que le temps fasse son oeuvre pour appréhender les raisons qu'a eues la Russie d'adopter une attitude effacée sur la tragédie qui se déroule à Ghaza. C'est une certitude que ce pays, hanté et obsédé par les manoeuvres d'isolement et d'encerclement dont il est l'objet de la part des Etats-Unis et de leurs alliés européens, a dû faire le calcul qu'en s'abstenant d'une position en pointe dans la dénonciation et la condamnation de l'agression sioniste, il obligerait de cette façon l'allié américain d'Israël, ce qui faciliterait ainsi la conclusion d'un deal global avec Washington sur les dossiers faisant contentieux dans leurs rapports.

Est-ce un simple hasard si Moscou s'est engagé dans un bras de fer avec l'Ukraine sur la question gazière presque à un moment synchrone avec le déclenchement de l'agression israélienne ? Ce serait pécher par naïveté de croire cela et bien méconnaître la froide détermination des maîtres du Kremlin dans leurs calculs. L'épisode gazier avec l'Ukraine lui servant de prétexte, le duo Medvedev-Poutine rappelle ainsi aux Etats-Unis et aux Européens qu'ils leur faut, en contrepartie de la compréhension de son pays sur leur politique au Proche-Orient, faire à leur tour preuve de la même attitude dans les dossiers où les intérêts stratégiques de la Russie sont en cause. Celui ayant trait à l'intégration à l'OTAN de certains pays anciennement faisant partie de l'ex-URSS, celui du déploiement des radars américains aux frontières de cette Russie, celui du conflit russo-géorgien et d'autres.

Cela ne serait pas vrai, comment expliquer que la Russie de Medvedev et Poutine, qui poursuit une politique de retour en force sur la scène politique internationale, ne saisisse pas l'occasion de cette agression israélienne, massivement condamnée par l'opinion mondiale, pour démontrer qu'elle peut désormais peser sur les évènements internationaux ?

La tragédie dans laquelle est plongé le peuple palestinien a pour enseignement que les Etats n'ont que des intérêts. La Russie en fait la plus cynique démonstration en restant en retrait du grand mouvement de désapprobation de l'agression israélienne et en essayant en sous-main de monnayer son attitude pour arriver à un accord «donnant-donnant» avec le concepteur du complot anti-palestinien.