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Massacres, famine: La situation s'aggrave de jour en jour à Ghaza

par Mohamed Mehdi

Au 162e jour de l'agression sioniste contre Ghaza, le nombre de victimes a atteint 31.553 martyrs et 73.546 blessés, affirme un bilan annoncé hier par le ministère de la Santé. La même source a indiqué que l'occupation israélienne a commis 7 massacres durant les précédentes 24 heures, faisant 63 martyrs et 112 blessés.

Samedi, l'armée israélienne a continué à bombarder les habitants de Ghaza faisant des dizaines de martyrs et davantage de blessés dans les régions du centre et du sud de l'enclave assiégée.

Les attaques israéliennes se sont concentrées sur le camp de Nuseirat, dans la partie centrale de Ghaza.

Un correspondant d'Al Jazeera a rapporté que des avions militaires israéliens avaient lancé, depuis l'aube, une série de raids au nord du camp de Nuseirat, dans le centre de la bande de Ghaza.

Le bureau des médias du gouvernement a rapporté, dans un communiqué, plus tôt dans la journée d'hier, que l'armée d'occupation avait commis un massacre en bombardant une maison du nouveau camp de Nuseirat, au centre de la bande, appartenant à la famille Tabatibi. Dans un premier temps, la même source a indiqué que les bombardements ont fait 36 martyrs, pour la plupart des enfants et des femmes dont certaines étaient enceintes. « Nous tenons l'administration américaine, la communauté internationale et l'occupation [israélienne] entièrement responsables de l'escalade de ces crimes et massacres contre des civils sans défense», indique le communiqué publié sur Telegram.

Moins de deux heures plus tard, le bilan du massacre de Nuseirat a été revu à la hausse, selon le correspondant d'Al Jazeera, qui a fait état de 49 martyrs et des dizaines de blessés sur plusieurs zones du centre de Ghaza.

De son côté, le journaliste d'Al Jazeera English (AJE), Tarek Abu Azzoum, explique que les bombardements sur le camp Nuseirat «se déroulent dans un petit espace densément peuplé», ce qui démontre, dit-il encore, que l'entité sioniste «ne prend aucune précaution pour protéger les civils».

La chaîne Al Jazeera a montré des images des corps d'un grand nombre de martyrs de la famille Tabatbi entassés à l'entrée de l'hôpital des Martyrs d'Al-Aqsa.

Un autre massacre a eu lieu au centre de la ville de Ghaza, dans le quartier d'Al-Rimal, a rapporté samedi le correspondant d'Al Jazeera, faisant état de «dizaines de personnes disparues» sous les décombres après le bombardement d'un immeuble de 7 étages abritant des personnes déplacées. Le journaliste a également souligné que le bâtiment visé contient une source qui est la seule qui approvisionne en eau potable les résidents de la zone. A noter que les secouristes déblayent à mains nues les débris afin de tenter de sauver les survivants et retirer les corps des martyrs.

Par ailleurs, un bombardement d'une maison dans le quartier de Khirbet Al-Adas, au nord de la ville de Rafah, au sud de la bande de Ghaza, a fait 2 martyrs et 1 blessé.

La famine touche 31% des enfants de moins de 2 ans

Les nouvelles données sur la malnutrition des enfants à Ghaza, publiées par le Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), montrent que la prévalence a doublé aussi bien pour les moins de 2 ans que les moins de 5 ans. «Dans le nord de la bande de Ghaza, 31% -soit 1 enfant de moins de 2 ans sur 3- souffrent de malnutrition aiguë, une augmentation stupéfiante par rapport aux 15,6% de janvier», a indiqué, vendredi, le Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), dans un communiqué publié sur son site web.

Le document explique que la malnutrition chez les enfants de Ghaza «se propage rapidement» et «atteint des niveaux dévastateurs et sans précédent», en raison des «vastes répercussions de la guerre et des restrictions actuelles sur l'acheminement de l'aide».

«Les examens nutritionnels menés par l'UNICEF et ses partenaires dans le nord (de Ghaza) en février ont révélé que 4,5% des enfants hébergés dans les refuges et les centres de santé souffrent d'émaciation sévère, la forme de malnutrition la plus mortelle, qui expose les enfants au risque le plus élevé de complications médicales et au décès, à moins qu'ils ne reçoivent une alimentation thérapeutique et un traitement d'urgence, ce qui n'est pas disponible», ajoute l'organisation.

La même source précise aussi que «la prévalence de la malnutrition aiguë chez les enfants de moins de 5 ans dans le nord est passée de 13% à 25%», entre janvier et février.

« La rapidité avec laquelle cette crise catastrophique de malnutrition infantile s'est développée à Ghaza est choquante, surtout quand l'aide désespérément nécessaire est prête à quelques kilomètres seulement», a déclaré Catherine Russell, Directrice générale de l'UNICEF.

Mme Russell ajoute que les multiples tentatives «de fournir une aide supplémentaire», tout en demandant que «les problèmes d'accès auxquels nous sommes confrontés depuis des mois soient résolus», n'ont abouti à rien. «Au contraire, la situation des enfants s'aggrave de jour en jour. Nos efforts pour fournir une aide vitale sont entravés par des restrictions inutiles, et celles-ci coûtent la vie à des enfants».

Par ailleurs, selon le document, la famine touche également des enfants dans les deux gouvernorats du sud de Ghaza : Khan Younes et Rafah.

«Des dépistages effectués pour la première fois à Khan Younes ont révélé que 28% des enfants de moins de 2 ans souffrent de malnutrition aiguë, dont plus de 10% souffrent d'émaciation sévère», affirme l'UNICEF, ajoutant que «même à Rafah, ayant le plus grand accès à l'aide, les résultats des dépistages chez les enfants de moins de 2 ans ont doublé, passant de 5% de personnes souffrant de malnutrition aiguë en janvier à environ 10% à la fin du mois de février». «L'émaciation grave ayant quadruplé, passant de 1 à 4%», durant la même période, note également le document. «L'UNICEF a fourni aux enfants un traitement contre la malnutrition aiguë, notamment en utilisant des aliments thérapeutiques prêts à l'emploi (ATPE), des préparations pour nourrissons prêtes à l'emploi et des suppléments préventifs en micronutriments contenant du fer et d'autres nutriments essentiels pour les femmes enceintes. D'autres fournitures devraient arriver cette semaine, mais cela ne suffit toujours pas à répondre aux besoins», lit-on également dans le communiqué.

Mme Russell affirme que «la seule chance de sauver la vie des enfants et de mettre fin à leurs souffrances» est d'instaurer «un cessez-le-feu humanitaire immédiat». «Nous avons également besoin de plusieurs postes frontaliers terrestres qui permettent à l'aide d'être acheminée de manière fiable et à grande échelle, y compris dans le nord de Ghaza, ainsi que des garanties de sécurité et un passage sans entrave sont nécessaires pour distribuer cette aide, sans retards ni obstacles d'accès», dit-elle encore.

Importante malnutrition chez les femmes enceintes

Outre les enfants, la malnutrition touche également les femmes enceintes. Dans une déclaration sur la chaîne Al Jazeera English, Dr Brenda Kelly, obstétricienne consultante à l'hôpital universitaire d'Oxford et membre d'une équipe médicale de Ghaza, affirme que «les nouvelles mamans luttent désespérément pour rester en vie, elles et leurs nouveau-nés», en raison «des pénuries énormes et critiques de nourriture, d'eau et de soins médicaux». Dr Kelly a ajouté que ses collègues sur le terrain à Ghaza signalent une « énorme augmentation» des naissances prématurées et un «nombre croissant de fausses couches et de mortinaissances». Selon la définition de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) : une mortinaissance est «le décès d'un bébé après 28 semaines de grossesse, mais avant ou au cours de l'accouchement».

L'intervenante qualifie de «vraiment horrible» le «niveau de malnutrition» chez les femmes enceintes. « Nous savons que de nombreuses femmes, même avant ce conflit, qui tombaient enceintes souffraient d'anémie. Avec une malnutrition extrême, il est absolument vrai qu'il y a beaucoup plus de bébés qui naissent, beaucoup plus petits que prévu», explique-t-elle.

Sur le même sujet, Dominic Allen, représentant du Fonds des Nations Unies pour la population en Palestine (UNFPA), qui a récemment visité l'hôpital émirati de Rafah, estime que les conditions de vie à la maternité de l'établissement sont «profondément inquiétantes», faisant état d'une «forte augmentation du nombre de nouveau-nés souffrant de malnutrition et de bébés mort-nés». «Les médecins rapportent qu'ils ne voient plus de bébés de taille normale», a déclaré Allen à Al Jazeera. «Ce qu'ils voient, c'est davantage de bébés mort-nés et de décès néonatals», ajoute M. Allen.